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“A l’avenir, les grossistes devront encadrer plus fortement les garages”

Publié le 23 avril 2014
Par Clotilde Chenevoy
7 min de lecture
Jean-Pierre Clémenceau, c’est l’exemple du “self made man”. Après un début de carrière comme magasinier, il a, au fur et à mesure de son parcours, gravi les échelons. Son dynamisme et sa vision proche du terrain lui ont permis de construire un groupe solide, imposant le nom d’Autodistribution Sofar en Charente et en Charente-Maritime.
Jean-Pierre Clémenceau, président, Autodistribution Sofar

Pouvez-vous revenir sur le rachat de Lhériteau ?

En 2008, Alain Redheuil et son équipe sont venus me voir pour me racheter. C’était l’époque où le groupe souhaitait filialiser. J’ai décliné l’offre en précisant que je n’avais pas fait le tour de mon métier. Quelques mois plus tard, ils sont revenus pour me proposer une fusion. Cette offre m’intéressait, mais uniquement la partie VL car nous ne faisons pas de PL. Par ailleurs, la structure possédait quatre points de vente, La Rochelle, Royan, Saintes et Cognac. Sur cette dernière ville, nous avions déjà un magasin, et le nom de Sofar a pris plus d’importance que Lhériteau. Les trois autres points de vente ont été rachetés, l’Autodistribution conservant des parts dans l’entreprise. Je voulais qu’il soit partie prenante de cette opération. Ce rachat a permis à la Sofar de couvrir le territoire en Charente et en Charente-Maritime.

Nous réalisons un chiffre d’affaires de 9,5 millions d’euros, uniquement sur le VL, avec un atelier ouvert aux garages pour des opérations de climatisation et des tests d’injecteurs ou de pompes Common rail. Quant aux prochains développements, ils se feront certainement sans moi, puisque, à l’horizon 2015-2016, je compte prendre ma retraite. Je travaille déjà sur ma succession afin de finir les choses aussi bien qu’elles ont commencé. J’ai toujours autant de passion pour ce métier, mais je compte profiter un peu de mon temps libre.

Vous évoquez les garages, en animez-vous sous enseigne ?

Nous animons 4 carrosseries AD, 20 garages AD et 28 Autoprimo. Les réseaux se révèlent très importants et, sans faire de l’élitisme, nous cherchons surtout des garages qui veulent toujours aller plus loin. Nous avons des structures qui se positionnent réellement comme des agents multimarques. Depuis quelques années, nous recrutons d’ailleurs de plus en plus d’agents de marque. Nous organisons beaucoup de sessions de formation. Même si nous devons sans arrêt les sensibiliser sur le sujet. En résumé, dès qu’il y a une complexité, nous poussons nos garages à se former. Nous faisons régulièrement la promotion de Diag24, la hotline technique d’Autodistribution. Nous avons un référent également en interne, qui peut intervenir si besoin.

Et combien de clients avez-vous sous Autossimo ?

Au total, 300 garages passent commande sur Autossimo, ce qui représente 14 à 18 % du volume. Nous avons beaucoup travaillé ce point et nous pouvons encore progresser. Nous espérons atteindre un taux de commandes de 25 % d’ici deux ans. Il sera complexe d’aller au-delà, les garages restant attachés au téléphone. Pourtant, cet outil se révèle de plus en plus performant et simple dans son utilisation. Le portail a évolué dernièrement, avec la partie technique qui est désormais rattachée à Autodata. Nous avons d’ailleurs organisé trois jours de formation, sur lesquels nous avons accueilli 8 garages par demi-journée, soit 48 clients formés.

Comment s’est déroulée l’année 2013 pour la Sofar ?

J’ai eu beaucoup d’inquiétude durant le premier semestre, nous étions en baisse à fin juin. Le deuxième semestre a, lui, été très bon, et nous avons fini l’année en croissance de 3 % avec des marges qui ne se sont pas affaiblies. Nous avons constaté un certain attentisme sur les six premiers mois, qui avait déjà commencé fin 2012. In fine, nos performances s’expliquent par une reprise du marché et également notre organisation interne. En effet, nous avons connu des années complexes, en 2008 et 2009, avec la reprise d’AD Lhériteau. Dès 2010, nous sommes repartis sur les chemins de la rentabilité et, depuis, nous n’avons fait qu’augmenter notre chiffre d’affaires. Et début 2014, le dynamisme reste de mise. Nos ventes au comptant ont également repris.

Quelle part tient le particulier dans vos résultats ?

Il représente 18 % de notre CA. Nous avons mis en place depuis quelques années une politique pour contrecarrer le développement des sites Internet. Ainsi, nous avons revu nos grilles de tarifs pour les pièces très concurrencées et fait en parallèle la promotion d’Isotech, la marque de distribution de l’Autodistribution. Garantie deux ans, équivalente à l’origine, et dépositionnée de 20 à 30 %, elle nous permet de répondre sans être comparés. Et avec l’arrivée des amortisseurs, l’offre sera vraiment complète dans l’année. Grâce à ces solutions, qui permettent de réduire l’écart avec les tarifs du Web à environ 10 points, les clients préfèrent acheter à notre comptoir, notamment s’il y a des soucis de retour. Nous communiquons d’ailleurs ouvertement sur le sujet depuis trois ans en placardant dans le magasin notre offre Isotech, avec la phrase “Ne perdez plus votre temps à chercher sur Internet”. Cette démarche 100 % Sofar nous a permis d’enrayer la baisse des ventes aux particuliers. Nous avons besoin de cette clientèle afin d’améliorer notre trésorerie. Notre objectif est d’atteindre 20 % de CA dans chaque magasin.

Investir Internet est-il une nécessité ?

Il est impératif d’aller sur Internet, mais pas pour y faire n’importe quoi n’importe comment. Nous n’avons aucun intérêt à nous positionner en frontal face à Oscaro et autres pure player de la pièce. Nous devons construire une offre avec notre réseau. La vente de prestations en ligne me semble cohérente. Après, il faut également que les garages se mettent à niveau sur le Web. Certains n’ont toujours pas créé leur propre page sur le site ad-auto.fr. Nous allons mener une campagne de rappel prochainement, en rappelant l’importance de cette présence. D’autant que si nous voulons également les recommander, ils doivent disposer d’un site.

A notre niveau, nous commençons à bénéficier de trafic venant du Web. Nous recevons de plus en plus de demandes de devis. Sur 2014, nous devrions connaître une montée en puissance du Web.

Le groupement accentue son offre de pièces techniques. Qu’en est-il au sein de la Sofar ?

Sur ce sujet, nous nous sommes pleinement appuyés sur le programme du groupement et, depuis trois ans, nous enregistrons une progression de nos ventes de 30 %. L’Autodistribution nous a apporté de la formation, des catalogues et nous a incités à investir dans du matériel, comme le banc de contrôle pour pompes et injecteurs Common rail. Nous disposons d’un référent technique dans le groupe, mais l’ensemble des magasiniers suivent régulièrement des formations. Nous disposons du stock courant, avec des turbos, des vannes EGR ou encore des sondes lambda, mais aussi des pièces de climatisation. La Sofar s’appuie sur deux stocks conséquents sur Angoulême et La Rochelle. Cognac, par sa position géographique qui permet de servir les deux départements, dessert deux fois par jour les magasins pour les pièces à faible rotation ou encombrantes. Nous avons mis en place un système de navettes internes pour approvisionner les sites entre eux, et même aller sur Bordeaux pour nous dépanner auprès des plates-formes régionales. Et depuis environ un an, nous sommes reliés à Logistéo, la plate-forme nationale de l’Autodistribution. Nous avons pris le temps car j’attendais que cette plate-forme soit pleinement opérationnelle, avec un accès informatique complet, permettant une vue sur le niveau des stocks. Nous tâchons désormais de privilégier cette solution.

Quel sera à l’avenir le rôle du distributeur ?

Les distributeurs devront disposer d’une très bonne logistique, et donc travailler avec un groupement ou un groupe disposant des solutions pour livrer rapidement. Par ailleurs, il sera nécessaire de s’appuyer sur les réseaux de garages, et s’impliquer davantage dans leur fonctionnement.

Auparavant, il aurait été inconcevable d’imaginer gérer nos clients garagistes, mais force est de constater que cela devient nécessaire. Les grossistes devront les encadrer plus fortement. Quand je vois que certains de mes clients restent sur un taux de main-d’œuvre à 35 euros, je leur dis que cela ne sera plus possible dans le futur. Ils doivent revoir leurs tarifs, mais, en revanche, accorder une remise sur la pièce. Deux typologies de garages devraient cohabiter : l’expert qui se révèle demandeur de solution pour avancer, et le petit garage qui touche à tout et survivra grâce à sa proximité.

Que pensez-vous du rachat d’ACR Group ?

Il nous fallait des plates-formes régionales. ACR était aussi un concurrent, notamment via ses contrats avec la nouvelle distribution. Je suis assez content qu’il passe sous pavillon AD ! Cette structure nous apportera également une véritable profondeur de gammes, notamment en machines tournantes. Nous attendons encore les détails de cette opération qui doit être validée par les Autorités de la concurrence.

Utilisez-vous la plate-forme Cora ?

La pièce de carrosserie a été un secteur sur lequel nous nous sommes lancés récemment et qui représente un axe de développement pour les années à venir. Nous commercialisons toutes les gammes que propose la plate-forme Cora, à savoir optiques, feux, rétroviseurs et radiateurs. Les commerciaux ont été motivés sur les ventes et nous avons enregistré une très forte progression. Un chiffre facile, puisque nous partions quasiment de zéro. Mais la mise en place de contrats tripartites, entre Cora, nous et le garage, nous a permis de toucher d’autres clients, qui ne venaient pas chez nous pour la pièce.

Par ailleurs, depuis six mois, nous avons embauché un responsable peinture, afin de développer le réseau AD carrosserie. Après, nous avons beaucoup de professionnels en zone rurale, pour lesquels adhérer à un réseau peut s’avérer lourd en termes d’investissement. Toutefois, nous constatons depuis quelque temps qu’ils nous sollicitent de plus en plus.

Vous avez connu l’ancienne et la nouvelle équipe de l’Autodistribution. Quel regard portez-vous sur la gestion de Tower Brooks ?

En 2008, à la fusion Sofar Lhériteau, j’étais tout de même inquiet. Aujourd’hui, je peux dire que je suis complètement rassuré. La nouvelle équipe a su s’intéresser à notre métier et prendre en compte nos particularités. Ils ont su fédérer filiales et indépendants, et l’Autodistribution a été remis sur les rails.

Vous êtes président d’une grande région pour la Feda ! Quelles actions menez-vous pour l’animer ?

En effet, ma zone part des Deux-Sèvres jusqu’aux Pyrénées. Globalement, les distributeurs ne sont pas assez impliqués dans la vie de leur syndicat, alors que la Feda est le bras armé contre les constructeurs. Ils se tiennent informés, consultant les synthèses qu’ils reçoivent, mais chacun reste tout de même la tête dans le guidon, afin de faire tourner son affaire. J’ai réussi à en mobiliser un certain nombre pour une formation en 2013. En partenariat avec l’Afcodma, j’ai organisé une session portant sur le thème “Comment répondre aux arguments du Web, comment faire des ventes additionnelles ?”. Je pense renouveler l’opération en 2014, avec de nouvelles thématiques. Nous faisons également une assemblée générale annuelle durant laquelle Michel Vilatte et Yves Riou reviennent sur les différents dossiers, et à laquelle environ 50 % des adhérents participent avec une bonne diversité de réseaux. L’aide de la Feda a été précieuse pour le métier, et on leur doit de nombreuses choses, comme l’accès aux fichiers 3A ou encore la campagne contre les idées reçues. Concernant la démarche de l’Eco entretien, il faudra faire preuve de pédagogie car je ne suis pas sûr que tout le monde ait bien compris ce dont il s’agit.
 

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