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Essuyage : La bataille des racks

Publié le 19 février 2015
Par Clotilde Chenevoy
5 min de lecture
Des chiffres stables, une distribution qui ne change pas, pour des produits, eux aussi, évoluant peu. Le marché de l’essuyage, qui pourrait passer pour triste, cache en fait une intéressante concurrence sur la rationalisation des gammes et sur la conquête de parts de marché.
Des chiffres stables, une distribution qui ne change pas, pour des produits, eux aussi, évoluant peu. Le marché de l’essuyage, qui pourrait passer pour triste, cache en fait une intéressante concurrence sur la rationalisation des gammes et sur la conquête de parts de marché.

En 2013, la pluviométrie record du premier semestre avait permis au marché d’enregistrer de belles performances. Et, même si la seconde partie de l’année s’était révélée moins favorable, l’exercice global fut satisfaisant. A ce titre, l’ensemble des acteurs attendaient logiquement une année 2014 légèrement inférieure en volumes. “Ce qui s’est confirmé, mais dans des proportions inférieures à ce que nous craignions”, estime Jean-Sébastien Bignozzi, directeur marketing de Valeo Service. Car, même si les balais avant se sont un peu moins bien vendus, compte tenu du succès des silhouettes break et monospaces, qui sont équipées de balais arrière, les volumes restent stables.

Pour Arnaud Bozon, Product Expert LV Beru-Champion chez Federal-Mogul Motorparts, “le Gipa évoque un marché de 30 millions d’unités, nos analyses internes tablent plutôt sur 24 millions d’unités. Dans tous les cas, le marché se révèle sous-exploité, la moyenne étant d’un remplacement tous les trois ans. In fine, on s’aperçoit que les premiers propriétaires d’une voiture ne changent pas leurs essuie-glaces. Le plus gros du marché se situe entre quatre à neuf ans”. De plus, si le freinage, par exemple, représente un enjeu de sécurité évident auprès de l’automobiliste, il n’en va pas de même avec les balais d’essuie-glaces, considérés comme des produits de confort. “Il s’agit pourtant d’un composant de sécurité majeur, et il est dommage que certains automobilistes jugent suffisant un produit bas de gamme”, déplore Nicolas Devallière, chef de marché essuyage chez Bosch.

Au final, selon les fournisseurs que nous avons interrogés, le marché en 2014 oscille entre - 1 et - 2 %. Avec des ventes relativement stables dans les réseaux de vente par délégation, MRA et autres. L’essentiel du recul se constate sur les GMS et centres-autos, gros pourvoyeurs du “Do it”, ce qui tend à montrer que ce phénomène, lui aussi, est sur le déclin, même pour les balais d’essuie-glaces. D’après une étude Ipsos évoquée par Federal-Mogul Motorparts, le canal des hypers et supers atteint 40 %, dont environ 10 % de Web. “Même si Internet propose des prix inférieurs à la distribution traditionnelle, ce ne sont que quelques euros, avec une contrainte supplémentaire, forçant l’internaute à choisir lui-même sa référence, sans compter les frais de port”, analyse Jean-Sébastien Bignozzi. Le canal OES se contente de 25 % tandis que les indépendants prennent 25 % (majoritairement les centres-autos avec 20 % de ce canal). Les premiers prix en MDD commencent entre 3 et 4 euros. Sur les gammes Medium, le prix moyen en technologie classique tourne autour de 11 à 12 euros, et entre 14 à 15 euros pour le Premium. En technologie balais-plats, pour les produits Medium, il faut compte 18 à 20 euros. En Premium, le prix grimpe à 50 euros, car les balais sont souvent vendus par paire, et la facture monte très vite, particulièrement pour les véhicules disposant d’une importante surface vitrée, comme les monospaces.

Explosion de références

Aujourd’hui, compte tenu de l’explosion des références, les fabricants doivent composer avec une vraie problématique de place attribuée dans les linéaires des hypers et centres-autos. C’est la raison pour laquelle les fournisseurs leader disposent de gammes standardisées, dont seuls les connecteurs sont spécifiques aux véhicules, et occupent moins d’espace. Dix à quinze références suffisent ainsi à couvrir l’essentiel du parc, en balais traditionnels. En balais plats, la standardisation se révèle complexe, car il existe une dizaine de montages possibles. Il faut donc inclure dans les boîtes les différents connecteurs et une notice d’information très large.

La MDD plus qualitative

Chez Valeo, on confesse produire des MDD pour de grandes enseignes, avec un phénomène intéressant. Pour Jean-Sébastien Bignozzi, “nous remarquons la volonté des enseignes de capitaliser sur une image plus qualitative de leur MDD en essuyage. Cette maturité du marketing des MDD en GMS, qui a commencé sur l’alimentaire, se constate maintenant sur d’autres rayons, dont l’automobile. Désormais, nous sommes face à des vrais responsables de marques”. Toutefois, “on a aussi pu constater que les MDD ont tendance à baisser en volumes. C’est paradoxal, mais en période de crise, les gens se rassurent avec des grandes marques. Donc, ils changent moins, mais ils recherchent la qualité”, affirme Nicolas Devallière. Chez Federal-Mogul Aftermarket, Arnaud Bozon dresse le même constat, les marques Premium résistent aux MDD : “L’essuyage reste un marché où il y a une perception de la marque. Nous sommes d’ailleurs aidés, avec Champion, par la notoriété dont nous disposons en bougie.”

Des armes différentes selon les acteurs

Chez Valeo, on capitalise sur les moteurs d’essuie-glace. Le leader en première monte sur le sujet continue d’élargir son offre rechange au prix d’un gros travail de mise à jour de la gamme, qui se poursuit. “Ce marché, majoritairement trusté par la rechange constructeur, commence à revenir en IAM, et pour nous, c’est aussi l’occasion de parler d’essuyage”, se félicite Jean-Sébastien Bignozzi.

Chez Bosch, l’opération avec les centres Carglass a donné une immense notoriété à l’offre essuyage de l’Allemand. Pourtant, certains acteurs de l’après-vente s’insurgent contre cette opération. Tous s’accordent sur l’excellent coup de communication, mais le fait de donner les essuie-glaces se révèle mal perçu par le marché et dévalorise le produit… Bosch assure pourtant se différencier par la technique. “Il y a deux ans, nous avons lancé une gamme de balais plats adaptables permettant le rétrofit sur des véhicules équipés de balais conventionnels, détaille le responsable produit. Et ce, pour seulement un euro de plus.” D’une certaine manière, une opération pour contrer la MDD, en montrant de surcroît qu’un balai de qualité, en l’occurrence plat, avait la capacité d’essuyer mieux.

Chez Federal-Mogul Aftermarket, les produits essuyage ont bénéficié d’un important travail avec une refonte de l’offre. L’équipementier s’appuie désormais sur deux gammes, Easy Vision pour les produits Medium (40 références, 90 à 92 % du marché couvert) et Aerovantage pour le Premium (210 références pour 99 % du parc). “Depuis Equip Auto 2013, date du lancement de notre programme Champion essuyage, nous avons eu de bons retours du marché, et avons signé de nouveaux référencements”, explique Arnaud Bozon.

Du côté de Trico, qu’il s’agisse de produits traditionnels, plats ou hybrides, l’équipementier bataille sur tous les fronts, comme l’explique Olivier Hardouin, directeur des ventes France : “Notre force, c’est d’avoir rattrapé notre retard sur le segment des balais plats et d’avoir renforcé notre position sur les balais hybrides.”

Un atout qui lui permet désormais de revendiquer 4 % de PDM, tout en envisageant de croître de 15 % à 20 % cette année, bien aidé par l’arrivée d’un nouveau packaging et par le lancement du Trico Flex, “une solution multiconnecteur, riche de 14 références en balais plats, couvrant 98 % du marché”. Celle-ci ne sera pas la seule nouveauté de 2015, puisqu’Olivier Hardouin confie être en pleine discussion avec Renault pour un partenariat à horizon 2016, mais aussi, dans un autre domaine, avec des enseignes d’entretien comme Point S et Norauto.

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Trico en reconquête

La reconquête du marché européen, entamée depuis fin des années 2000, se poursuit. Spécialiste mondial de l’essuyage, l’équipementier américain était tombé très bas à l’orée du changement de siècle, la faute à une stratégie commerciale inadaptée et à l’absence de produits spécifiques au Vieux Continent. Se faisant, Trico ne comptait plus alors qu’entre 1 % et 1,5 % de parts de marché dans cette région, contre 15 % quelques dizaines d’années plus tôt. Puis l’Américain a entamé sa mue en se redéployant sur le segment de la pièce de rechange d’origine et sur l’aftermarket. En France, ce changement a d’abord pris la forme d’un rapprochement avec PSA, devenu, depuis, l’un des principaux clients de l’équipementier, puis avec Promauto dans un second temps, qui s’est vu confier la distribution de la gamme américaine. Cette stratégie porte aujourd’hui ses fruits puisque l’équipementier a enregistré l’an dernier une croissance à deux chiffres. Une dynamique qui s’explique essentiellement par une offre optimisée pour répondre à toutes les demandes.
 

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