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Distribution

Le frondeur Yon Bellecave

Publié le 8 janvier 2015
Par Clotilde Chenevoy
4 min de lecture
Le président des établissements Bellecave se montre très discret sur ses succès locaux, mais monte au créneau, pour ses clients et son équipe, face à Internet et aux discrédits que le canal a jetés sur la profession.
Yon Bellecave souligne que le secteur connaît un déficit de main-d’œuvre jeune et qualifiée. “On favorise toujours les filières généralistes, l’apprentissage représentant une orientation par défaut, analyse-t-il. Un bon mécanicien gagne pourtant très bien sa vie !”

Yon Bellecave a été nominé dans le cadre des Trophées de la Rechange pour le prix du Jeune Manager, et décroche le prix du Distributeur de l’Année. “Tant mieux, nous a assuré le président-directeur général des établissements Bellecave, c’est mieux que ce soit l’entreprise, et donc mon équipe, qui remporte, que moi personnellement.” Le rendez-vous est alors pris pour discuter plus longuement du succès du grossiste. En effet, le distributeur enregistre chaque année une progression de ses résultats. Il a réalisé un chiffre d’affaires de 4,4 millions d’euros en 2013, et 2014 devrait également se terminer sur une croissance.

Mais, sur place, le dirigeant annonce la couleur. Pas question de parler gestion d’entreprise et axes de développement, la concurrence fait rage dans le secteur, et surtout, ce n’est pas le style de la maison de communiquer… Succinctement, le jeune dirigeant accepte de rappeler l’histoire de la société, implantée sur Bayonne depuis 1972, et fondée par son grand-père, René Bellecave. Son père, Jean, reprendra le flambeau familial, avant de le céder en 2007 à son fils. Jean Bellecave continue toutefois d’apporter son soutien à l’entreprise, en gérant les réapprovisionnements et en donnant des coups de main ponctuels sur certains dossiers. Diplômé de Sup de Co Toulouse, Yon Bellecave aurait pu commencer son aventure dans la pièce auto juste après ses études. Il a préféré refuser une offre de Valeo, pour se constituer une expérience en dehors de l’automobile, chez Sodexo. Contrôleur de gestion en région parisienne, Yon Bellecave a rapidement eu envie de revenir dans sa région natale et, naturellement, le projet d’intégrer l’entreprise familiale a germé. Ne connaissant rien à la pièce détachée, le futur dirigeant a décidé de prendre des cours de mécanique à domicile, pour mieux appréhender cet univers. Avant de plonger dans le bain, Yon Bellecave fera deux stages de trois semaines au sein de la Sobedi, puis chez Chiron Electro Diesel.

La conversation dévie alors très vite vers un sujet qui lui tient à cœur, Internet ! Des projets, Yon Bellecave en a pour son entreprise, mais le dirigeant veut profiter du coup de projecteur pour défendre ses clients face au discrédit que les sites de vente de pièces en ligne ont jeté sur la profession. Il rappelle que le distributeur local doit faire face à la complexité et à la technicité du métier, qui supposent des investissements dans du personnel qualifié et des outils.

Parallèlement, le canal Internet s’est développé “avec, comme seul argument, le prix !”. Si la multitude de sites qui existait il y a quelques années s’est réduite à seulement 3 ou 4 acteurs majeurs, les conséquences, selon le dirigeant, se révèlent néfastes. “Lorsque l’on se met à la place d’un particulier, qui voit un jeu de plaquettes ou des filtres avec des remises qui vont au-delà de 65 %, quelle est sa réflexion ? Un sentiment d’avoir été dupé par son garagiste depuis vingt ans, analyse Yon Bellecave. Et, réaction en chaîne, le garagiste, lui, ne comprend pas que son distributeur local ne lui permette pas d’obtenir des prix et des remises pour rivaliser avec les prix de la Toile. Le plus grave effet d’Internet reste ce discrédit et cette mauvaise image de notre métier, aux yeux des automobilistes. Tous les groupements mettent ce sujet au sommaire des réunions régionales et nationales, sans apporter de réelles solutions. Chaque acteur de la chaîne de distribution a besoin de marges pour vivre.”

Agir à la source

Face à ce constat, que beaucoup partagent dans la profession, Yon Bellecave avance une solution pour redonner confiance aux clients réparateurs, afin de réguler les taux de remise. “Le poids de la distribution traditionnelle se révèle bien plus puissant que les quelques sites Internet qui se partagent les ressources de ce canal, détaille le dirigeant. Et, si les distributeurs suivent une ligne de conduite au quotidien, une régulation des remises en ligne se révèle possible. Ces dernières devraient s’établir entre 40 à 45 % pour que les deux canaux cohabitent de façon constructive. Pour tendre vers cet objectif, il faut s’attaquer au schéma économique des sites, qui ne supportent aucun stock et s’approvisionnent majoritairement auprès de grandes plates-formes nationales. Cette réflexion nous amène à nous pencher sur le rôle de ces plates-formes. Les distributeurs indépendants représentent pour elles un fonds de commerce important, avec une certaine stabilité financière et, surtout, de la rentabilité. Tandis qu’un site Internet comme client fragilise plutôt une plate-forme sur le long terme, avec des marges réduites et des moyens humains à déployer pour le servir, créant ainsi une certaine dépendance. Nous devons jouer sur ce point. La distribution traditionnelle doit se mobiliser et boycotter ces structures. Leur équilibre financier s’en trouvera alors dégradé et les obligera à un réalignement des taux de remises.”

Le message est lancé ! Yon Bellecave milite également auprès de ses clients garagistes, pour que ces derniers concèdent à faire des remises sur la pièce à leur client automobiliste, tout en valorisant davantage leur main-d’œuvre. “Nos clients MRA progressent face aux centres-autos et autres concurrents de la réparation, alors qu’on avait annoncé leur déclin, déclare le grossiste. Ils ont su s’adapter aux nouvelles technologies, en se formant et en investissant dans les outils. Intervenir sur le volant bi-masses faisait peur il y a quelques années, alors que cette opération devient monnaie courante. C’est la technique qui les fait vivre et ils doivent valoriser cette expertise auprès de leurs clients.”

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Sandra Henric, responsable des réseaux de réparation de Précisium.

“Bravo aux Etablissements Bellecave, société adhérente à Précisium Groupe depuis 8 ans. Au cours de ces dernières années, cette entreprise familiale a su faire preuve d’un dynamisme commercial hors du commun.”
 

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