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Le Made in France attire les Chinois

Publié le 23 mai 2013
Par Clotilde Chenevoy
5 min de lecture
Sur le salon AMR, Celette France, Gys et Exeltools exposaient leurs produits au travers de leurs importateurs chinois. L’image France s’exporte bien, mais impose le choix d’un bon partenaire local.
Sur le salon AMR, Celette France, Gys et Exeltools exposaient leurs produits au travers de leurs importateurs chinois. L’image France s’exporte bien, mais impose le choix d’un bon partenaire local.

Sur les 100 000 m2 du salon pékinois, à l’intérieur de l’espace dédié aux exposants internationaux, le visiteur pouvait découvrir quelques exposants français. Ainsi, Celette France, spécialiste du marbre, a commencé à prospecter la Chine dès 1985, mais le marché restait alors très fermé. Une première coentreprise a été fondée en 1996 avec la société chinoise Zonda. Celette a alors décroché un contrat pour équiper l’ensemble des réseaux du groupe Volkswagen. Toutefois, le seul point noir de ces accords avec les constructeurs, c’est le prix. Même si les réseaux de marque cherchent de la qualité, ils veulent également des produits à prix local. Quelques soucis de copie et de fonctionnement interne avec la coentreprise ont poussé Celette à rompre cette alliance et à reprendre un schéma plus classique en optant pour un importateur exclusif.

Désormais, le fabricant français travaille avec Sinews Hoye, qui s’occupe de la distribution des produits, provenant directement de France. “Tout part de l’Hexagone, explique Jean-Claude Docher, directeur du développement de Celette. C’est la seule solution pour conserver le contrôle des produits. Et l’homologation auprès des constructeurs nous sert de carte d’entrée sur le marché. En Chine, les marques imposent à leurs réseaux de distribution un équipement spécifique homologué, qu’ils doivent impérativement acquérir s’ils veulent ouvrir leur point de vente. Les contrôles du siège sont stricts. Nous apportons également avec nos produits toute la formation nécessaire, délivrée par notre importateur. Les opérations de marbre, qui se raréfient en France, restent des opérations courantes en Chine, car la main-d’œuvre se révèle bon marché.”

Au global, Celette réalise 40 % de son chiffre d’affaires en Chine. Le fabricant français travaille pourtant avec à peine un tiers des réseaux en place, à savoir Volkswagen (plus de 1 000 concessions), BMW (280 concessions), Audi (320 concessions) ou encore Porsche, Mercedes et Volvo. Et le fait d’être français et européen présente un certain avantage puisque l’ensemble des homologations se jouent au niveau des sièges sociaux des marques… basés en Europe. Celette reste donc très présent auprès des constructeurs bien implantés en Chine, tel le groupe Volkswagen. “En tant qu’Européen, on a du mal à imaginer la taille du marché, témoigne le dirigeant français. Le pays compte plus de 1 400 concessions Toyota, plus de 1 200 pour Volkswagen. Et le rythme d’ouvertures annuelles dépasse la centaine. La croissance reste toujours aussi forte année après année.” Par ailleurs, il s’agit d’un marché d’acquisition et non de renouvellement comme en Europe. Les volumes d’achats se révèlent conséquents. Ce qui explique aussi le nombre croissant de copies, il faut approvisionner le marché… Beaucoup de fabricants chinois ont d’ailleurs réduit leur export pour fournir le marché local, notamment la rechange indépendante, qui ne peut amortir le coût de nos outils.

Celette France fait également face à des copies, mais la qualité, mauvaise, ne nuit pas à l’original ! Pour répondre à des besoins spécifiques, la société a créé un bureau technique en Chine qui se charge de réaliser des solutions pour des clients ayant des demandes spécifiques, et suit également les exportations au niveau local. “Il est capital de disposer d’un bon partenaire, et de mettre à disposition des clients un service de qualité, pour assurer une utilisation optimale du produit, certifie Jean-Claude Docher. La formation représente environ 40 % de notre valeur ajoutée et c’est ce qui nous permet de nous différencier de nos concurrents. La main-d’œuvre qualifiée manque et nous devons former le personnel, non seulement aux produits Celette, mais également aux méthodes de réparation définies par le constructeur.” Au final, l’activité carrosserie représente entre 45 à 50 % de l’activité des centres, et il n’existe pas vraiment de réseau indépendant pour ce type de prestations. Par ailleurs, les Chinois se montrent très exigeants sur la qualité de service et de maintenance. Ils veulent que leur véhicule soit entretenu dans les règles de l’art. “Si les prestations ne sont pas à la hauteur, et qu’il s’estime lésé, le consommateur chinois n’hésitera pas à saisir la justice”, explique le responsable de Celette.

Débosselage sans peinture, un art nouveau

A l’opposé, sur le salon AMR, le petit nouveau est la société Exeltools, venue faire découvrir ses outils de débosselage sans peinture, pratique peu répandue, mais qui a grandement intéressé les visiteurs. Jean-Jacques Brunie, directeur de l’entreprise, découvrait le salon : “Le potentiel pour le débosselage sans peinture est très important, puisque la main-d’œuvre se révèle peu coûteuse en Chine. La commercialisation devra en revanche s’accompagner de formations importantes, car c’est une vraie nouveauté pour les réparateurs. Par mon importateur, j’ai déjà un accord avec le réseau Toyota pour fournir les outils et la formation.” Le produit se positionne sur le haut de gamme, justifié par le dépôt de 10 brevets, et la production provient de France ! Pour le directeur, il était impensable de délocaliser la fabrication en Chine, dans un souci de contrôle de la production. L’entrée du Français sur le marché chinois a été plutôt simple, puisqu’il a été contacté par un importateur chinois, BZL, une coentreprise détenue également par le fabricant d’équipements français Gys ! Même si les discussions ont été longues pour définir clairement la stratégie et, surtout, les marges des distributeurs…

Du côté de chez Gys, la Chine n’est plus un mystère, et dispose de la structure nécessaire pour produire, acheter et distribuer sur le marché. Ainsi, pour commercialiser ses produits, Gys passe par l’importateur chinois, BZL, dirigé par Michael Zhao. Plus exactement, le fabricant français a créé il y a un an et demi une coentreprise, Michael Zhao étant un collaborateur travaillant chez son ancien importateur. “Nous exposons sur AMR depuis quatre à cinq ans, précise le directeur, et auparavant, nous faisions les foires. Avoir un stand nous permet d’entretenir les relations avec les décideurs, notamment les constructeurs. Montrer ses produits se révèle important.” La formation représente une clé cruciale dans les négociations commerciales et Gys possède son centre, situé dans une université de Shanghai. Le groupe a conclu un accord afin de disposer des locaux, en échange d’un partage de l’utilisation des équipementiers.

Le groupe dispose également depuis 2006 d’une usine basée à Shanghai. Le site produit surtout des petits produits, comme les chargeurs de batterie ou les postes à souder, ainsi que quelques produits pour la carrosserie. Le gros de cette production est ensuite expédié sur Laval pour approvisionner l’Europe. En revanche, dès lors que de la technique est requise, les produits réalisent le chemin inverse, quittant l’Europe pour naviguer vers la Chine. De plus, l’usine chinoise sert à réaliser des pièces semi-ouvrées, qui seront ensuite intégrées sur les chaînes de montage. Dans cette optique, Gys a d’ailleurs dû créer, conformément à la loi, une société pour réaliser du trading. En effet, “en Chine, il est imposé de distinguer la partie achat et vente, explique Nicolas Bouygues, président de Gys. Chaque composant et produit acheté se trouve scrupuleusement contrôlé avant utilisation, et nous devons être très méticuleux sur ce point pour nous assurer du suivi qualité”. Et de rajouter : “En Chine, la compétition est terrible, et on ne peut rester uniquement sur des produits haut de gamme, homologués et sophistiqués. Nos tarifs seraient beaucoup trop en décalage avec les prix chinois.”

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Celette France, toujours plus d’export

Depuis la reprise de l’entreprise début 2011, l’organisation interne de Celette a été revue, et des investissements ont été réalisés, notamment dans l’outil de production. L’objectif pour 2011 consistait à atteindre un CA de 10 millions d’euros, et l’entreprise a dépassé les 13 millions d’euros. En 2012, les résultats atteignent 18 millions d’euros, en raison de prises de commandes très importantes en Chine, avec la signature d’Audi comme nouveau client. Le pays du Soleil levant pèse tout de même 40 % du CA. Par ailleurs, le développement de véhicules low cost, comme Dacia, justifie à nouveau des passages au marbre et cela recrée de l’activité en Europe.

Le nouveau temps fort pour Celette sera l’ouverture prochaine d’une usine en Thaïlande. En effet, pour toucher les marchés comme la Chine, ou l’Inde et l’Amérique du Sud, il faut pouvoir fournir des produits d’entrée et de milieu de gamme, ce qui suppose une production à bas coût. D’où la nécessité de disposer d’un outil industriel dans un pays où la main-d’œuvre se révèle moins onéreuse. Le site se trouve actuellement en cours d’installation, et devrait être opérationnel d’ici juillet.

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