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208 HYbrid FE, bien plus qu’un démonstrateur

Publié le 20 décembre 2013
Par Frédéric Richard
5 min de lecture
Les premiers tours de roues de la 208 constituent une véritable prouesse technologique, mais également une révolution chez le constructeur sochalien, qui a laissé Peugeot Sport et Total tenter l’expérience du concept-car. Avec brio, au regard du résultat.
La 208 HYbrid FE se distingue assez peu de son homologue routière. Toutefois, les jantes, la calandre ou les rétroviseurs, remplacés par des caméras, ont fait l’objet d’un travail singulier.

C’est bien Peugeot Sport qui est à l’origine de ce projet atypique. Il y a maintenant plus d’un an, les équipes de Christophe Mary, chef de projet FE chez Peugeot Sport, se mettent en tête de concevoir un véhicule capable de passer sous la barre des 50 grammes de CO2 par kilomètre. Un Graal qui va occuper les efforts des équipes de compétition pendant plusieurs mois. Mais pourquoi Peugeot Sport ? Pourquoi pas les équipes de la Dria (Direction de la Recherche et de l’Ingénierie avancée) de PSA, plus rompues à ce type d’exercice ? Simplement parce que ce projet émane des équipes de compétition, qui, à l’annonce du retrait de Peugeot du programme d’endurance, se sont senties, sinon menacées, au moins remises en question dans leur utilité, en dehors du programme compétition client, qui poursuit, lui, sa route.

Alors, les ingénieurs motoristes, les spécialistes des composites, les sorciers de la synthèse dynamique, aidés de quelques personnels de la maison mère, les designers de Gilles Vidal notamment, se sont penchés sur le défi, qui se matérialise aujourd’hui par la 208 HYbrid FE, un démonstrateur technique consommant 1,9 litre aux 100 km, et émettant 46 grammes de CO2 par kilomètre !

Un projet collaboratif

La 208 FE est avant tout le fruit d’une réflexion menée avec plusieurs partenaires, au premier rang desquels le groupe Total. En effet, le pétrolier a choisi de s’impliquer à plusieurs niveaux dans le projet en apportant ses connaissances pour améliorer le graissage des composants, la lubrification moteur, et en donnant accès aux offres de ses filiales, Hutchinson pour commencer. Bref, comprenez que ce véhicule tout à fait exceptionnel résulte de l’utilisation conjointe de nombreuses technologies de pointe, pour parvenir au but. Alors que, dans le cadre d’un programme série, on privilégie des équipes travaillant par module (moteur, intérieur, design, trains roulants…) qui opposent chacune leurs contraintes, la 208 FE a été pensée comme un véhicule de compétition, avec le seul impératif du résultat, en s’affranchissant volontairement du budget de l’ensemble.

Creuset de technologies

“Lorsque l’on veut passer sous les 50 grammes en cycle NEDC avec une 208, il faut intervenir sur tout, revoir toute la voiture !”, résume Christophe Mary, qui connaît bien son sujet, puisque longtemps en charge des développements moteur F1 chez Ferrari puis chez Mercedes-AMG. Fin de la parenthèse, qui en dit long sur les capacités de l’ingénieur et de l’équipe qu’il a choisie…

La base sélectionnée, une 208 1.0 VTi 68 ch, homologuée à 99 grammes, va donc se voir torturée, démontée, analysée, améliorée sur tous les points, pour perdre les 53 grammes qui “nuisent” à son bilan carbone. Design, aérodynamisme, allégement et moteur composent alors la savante recette de la baisse de consommation et d’émissions de ce démonstrateur technique.

21 grammes gagnés grâce à l’allégement, l’aérodynamique et les pneumatiques

Sur 208 HYbrid FE, les aérodynamiciens et les designers ont poussé l’exercice à son paroxysme, afin d’obtenir un Cx légèrement inférieur à 0,25. Une prouesse, sur un véhicule dont l’habitabilité et le coffre ont été préservés ! Les pneumatiques, spécialement développés par Michelin, sont de type Tall&Narrow, c’est-à-dire de grand diamètre et faible largeur. Ils sont montés sur des jantes de 19’’ en aluminium sur lesquelles des volets aérodynamiques en carbone comblent l’espace entre chaque rayon. Des caméras remplacent les rétroviseurs, tandis que le dessin du toit se prolonge de façon quasi horizontale à l’arrière, donnant naissance au béquet du hayon. La partie basse de la poupe reçoit un extracteur d’air, qui évacue le flux qui se propage sous la voiture grâce au fond plat. Enfin, les feux à LED de la 208 HYbrid FE reçoivent de fines dérives verticales, inspirées du concept-car Onyx, qui minimisent les turbulences.

Une masse de 975 kg en niveau Access pour la 208, c’était bon, mais pas suffisant. “Pour parvenir à diminuer de 20 % la masse de la voiture, nous avons mené une étude pièce par pièce, et doté la 208 HYbrid FE des matériaux les plus novateurs en provenance de Hutchinson, CCP Composites et de l’activité Polymères de Total”, résume Philippe Girard, délégué direction scientifique Total. La 208 HYbrid FE part d’une base prélevée en sortie de ligne de montage, donc d’une structure porteuse métallique. Des éléments composites remplacent ensuite les panneaux de carrosserie et le plancher, permettant de faire passer la coque de 295 à 227 kg. La peau extérieure d’un seul tenant (pesant seulement 20 kg), le fond plat, les panneaux de portière et le bouclier avant sont réalisés à base de fibre de carbone. Le capot et les ailes sont en composite VER/Carbone, un matériau divisant le poids des pièces par deux, à propriétés mécaniques comparables. Enfin, à l’exception des vitres de portes, le vitrage fait appel au polycarbonate pour gagner 5 kg. Une véritable innovation là encore. Il apporte une réduction de masse de plus de 50 % par rapport au verre classique. De son côté, l’hybridation permet la suppression de l’alternateur, du démarreur et du pignon de marche arrière à l’avantage de la masse, des pertes mécaniques, mais aussi de l’encombrement.

11 grammes gagnés sur le moteur La 208 HYbrid FE est propulsée par une motorisation hybride essence-électrique. Elle associe une évolution du 3 cylindres EB0, à une batterie et un moteur électriques, issus du programme endurance de Peugeot Sport, sur la 908 HYbrid4.

Le moteur 3 cylindres a connu plusieurs évolutions : augmentation de la cylindrée, réduction des pertes par frottement, optimisation du cycle… Toutes ces avancées aboutissent à une consommation réduite de 10 %, pour une puissance maintenue à 68 ch (50 kW). Par exemple, le vilebrequin en acier nitruré, les bielles en titane et les pistons en alliage d’aluminium-cuivre, la culasse, sont taillés dans la masse. Leur masse est ainsi réduite, malgré l’augmentation de cylindrée. Quant aux pertes par frottement, elles sont réduites d’environ 40 %, notamment grâce à un revêtement “Diamond Like Carbon” sur le vilebrequin, les pistons et leur axe, les segments, les linguets. Pour se voir homologuée à 46 grammes, 208 HYbrid FE a passé le cycle d’émission de CO2 avec un carburant Super 95 de référence. Toutefois, une huile moteur spécifique à viscosité extrêmement faible a été élaborée par Total Lubrifiants. De grade 0W12, cette huile unique développe ses propriétés très rapidement avec un temps réduit de montée en température.

21 grammes gagnés grâce à l’hybridation

Le moteur électrique développe 30 kW en moteur et 100 kW en freinage. Cette machine électrique assure les fonctions de démarreur, et de marche arrière, par inversion du sens de rotation. Elle donne également accès à du roulage ZEV, c’est-à-dire en électrique pur. La batterie lithium-ion, d’une capacité de 0,56 kWh, pèse 25 kg, et se loge, avec le réservoir d’essence de 20 litres, sur un berceau sous la voiture, à l’aplomb de la banquette arrière. L’onduleur et le calculateur sont quant à eux disposés sous le capot. L’hybridation n’a ainsi aucun impact sur l’habitabilité de la voiture.

Et ça roule !

Lors des phases de ralentissement, que ce soit au lever de pied ou au freinage, le véhicule est décéléré en priorité par le moteur électrique. Le circuit hydraulique n’intervient qu’à la fin du freinage, lors de l’arrêt complet. Durant cette phase, le moteur électrique fonctionne en récepteur pour récupérer l’énergie et recharger la batterie. Sur un cycle d’homologation, cette récupération se chiffre à 25 %. Puis, lors des accélérations, l’énergie est restituée et assiste le moteur essence.
Au chapitre des performances, la 208 FE réalise un joli 8 secondes de 0 à 100 km/h, soit seulement 1 seconde de plus qu’une 208 GTi.
A voir et essayer le véhicule, on ne peut qu’espérer que la direction de Peugeot soit sensible à l’exercice de style. Et si Peugeot Sport, en marge de sa quête de podiums, devenait, à l’avenir, une branche officielle de recherche avancée du constructeur ?

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