24 Heures de Daytona, les coulisses de l’extravagance
Depuis 1966, Daytona Beach, en Floride, accueille l’une des courses les plus mythiques au monde, les 24 Heures de Daytona. Mythique puisqu’elle se tient sur le non moins mythique ovale de l’International Speedway, un circuit aux virages relevés (bankings) jusqu’à 31 %, qui accueille également chaque année la célèbre course de NASCAR, le “Daytona 500”. Les vitesses sur ce type de circuit atteignent 320 km/h et le Daytona 500 se place comme la course la plus suivie au monde, avec 170 000 spectateurs sur place et près de 20 millions de téléspectateurs !
Certes, les 24 Heures de Daytona restent plus confidentielles, mais se révèlent bien plus exigeantes pour les pneumatiques et les mécaniques, bien plus évolués que les “stock-cars” qui courent en NASCAR. Quant à l’ambiance, elle se rapproche grandement de celle que peuvent vivre les spectateurs des 24 Heures du Mans, mais à la sauce américaine !
Le circuit des 24 Heures de Daytona se tient en fait sur un tri-ovale (ovale triangulaire), auquel les organisateurs greffent quelques boucles supplémentaires, à l’intérieur du tracé de base. Le circuit affiche donc 5,7 kilomètres, et son principal intérêt réside dans la proximité avec les spectateurs, qui disposent d’une vue panoramique sur l’ensemble du parcours, contrairement aux courses européennes. Si les visiteurs accèdent à des gradins tout autour du circuit, la majeure partie des aficionados du sport automobile américain se retrouvent au centre de l’ovale, à quelques mètres des voitures de courses, pour passer un week-end… des plus festifs.
Ainsi, à partir du jeudi précédant la course, des ballets de camping-cars (enfin, de motor-homes) s’organisent pour camper au plus près de la piste. Des véhicules absolument hallucinants, qui seraient sans doute interdits en France compte tenu de leur largeur et de leur poids, sans un permis poids lourd ! A partir de là, il s’agit de bricoler les installations les plus folles pour mieux profiter du spectacle et se démarquer du voisin. Par exemple, nombreux sont ceux qui ont aménagé des plates-formes sur le toit de leur véhicule afin de profiter d’un emplacement de choix, à hauteur. Au sol, l’intendance s’organise. Les groupes électrogènes se mettent en place, on branche les réfrigérateurs et l’on prépare les barbecues. On notera la passion de l’un de nos interlocuteurs, qui a passé sans doute beaucoup de temps à modifier un fût de 200 litres en barbecue géant, décoré d’un carburateur initialement monté sur un gros V8, servant désormais à gérer l’arrivée d’air de combustion. Sans oublier les incontournables collecteurs d’échappements qui évacuent la fumée de cuisson ! Ils sont fous ces Américains ! Comme au Mans, le spectacle se trouve donc aussi sur les parkings, qui cachent une foule de véhicules tous plus excentriques les uns que les autres, et dont les photos suffisent à faire rêver.
Les succès français à Daytona
Nombre de pilotes français participent à divers championnats américains de sports mécaniques. Le plus célèbre d’entre eux, Sébastien Bourdais, s’il s’est permis une incursion en F1 en Europe en 2008 et 2009, a choisi de s’exiler aux US depuis longtemps. Et son palmarès, peu connu en France et occulté par des résultats mitigés dans la discipline reine du sport auto, se révèle pourtant impressionnant. Sébastien Bourdais capitalise notamment quatre titres consécutifs en Champ Car. Cette année, il venait défendre son titre à Daytona, puisqu’il a remporté l’épreuve en 2014. Il a finalement terminé la course en deuxième position dans la catégorie Prototype, au volant de sa Corvette DP de l’écurie Action Express, à moins de deux secondes du leader, la Riley Ford du Chip Ganassi Racing, pilotée par le Néo-Zélandais Scott Dixon. Interrogé sur sa vision de la course automobile aux US, il nous déclarait : “Ici, tout est plus ouvert, plus simple. Les courses sont organisées pour le plaisir du public. Les spectateurs accèdent partout, échangent avec nous, dans une atmosphère bon enfant.”
Simon Pagenaud, autre Français, inscrit dans le championnat IndyCar Series 2015, pilotait aux 24 Heures de Daytona une Corvette C7.R pour l’écurie Corvette Racing, avec l’Anglais Oliver Gavin et l’Américain Tommy Milner. Après avoir réalisé la pole dans la catégorie GTLM, sa voiture franchissait la ligne d’arrivée en troisième position, derrière la voiture sœur de l’écurie Corvette Racing, qui a remporté la victoire. “Daytona est la première course de la saison aux US. L’engouement est incroyable pour les courses d’endurance. Je roule aujourd’hui pour Corvette, et cette marque est une icône ici. Je remarque beaucoup de similitudes avec Le Mans, c’est un peu un warm up avant l’épreuve mancelle ! les fans sont en général très érudits. L’approche est juste un peu moins technologique, moins pointilleuse. Ici, l’équipe fait en sorte que la voiture soit parfaite pour les pilotes, et non pour la piste.”
Frédéric Makowiecki, dit “Mako”, pilote officiel Porsche North America, acquiesce : “Ici, on retrouve la proximité avec le public, que l’on a perdue en Europe. Comme à Sebring, les paddocks et les stands, ainsi que la piste, sont ouverts au public, sans payer des sommes considérables, c’est très agréable, ils nous reconnaissent. Mais cela ne sous-entend pas que les disciplines soient prises à la légère. Les organisateurs ont juste compris que c’était une condition pour que les spectateurs continuent de s’intéresser au sport auto. N’oublions pas que, dans ce type de course, où le safety car sort souvent, il est difficile de creuser vraiment l’écart. On se différencie par un show global.”
Enfin, Patrick Pilet, autre pilote français, nous a confié que “les gens ici sont vraiment passionnés, ils supportent tous une marque et nous avons beaucoup de fans avec Porsche. L’atmosphère est complètement différente, on s’approche des garages, des voitures. Tout est pensé pour le spectateur ! Et le niveau est très élevé. Depuis que les deux championnats US sont réunis, les meilleurs pilotes courent ensemble. La difficulté, c’est de gérer des circuits courts, avec beaucoup de voitures, car cette année, par exemple, 60 équipages prenaient le départ”.