Automechanika Istanbul : un nouvel Orient
A force d’écouter les informations fortement médiatisées sur la Turquie, on en aurait presque oublié l’ineffable plaisir que procure la cité d’Istanbul, et ses mélanges incessants et prodigues de cultures plus attirantes les unes que les autres (on essaiera d’oublier, dans ce tableau idyllique, les miasmes de la circulation, vrai calvaire des Stambouliotes). Ce vrai “melting-pot” constitue une excellente introduction au salon Automechanika, qui ne cesse de s’étendre et de croître, tant sa situation géographique le rend précieux aux yeux de tous ceux auxquels la géopolitique n’a pas échappé. Et si la géopolitique ne vous parle guère, il suffit de livrer un élément pratique pour mieux comprendre l’envolée d’Istanbul. Afin de conquérir toujours plus de nouveaux marchés, la Turquie ouvre ses portes à tous les visiteurs, et ne les condamne pas à attendre des semaines des visas. C’est pourquoi l’on a pu voir des centaines d’Africains du nord et du centre, autant de visiteurs du Moyen Orient et bien sûr d’Européens. Pas de visas, c’est la liberté de venir simplement et de faire du commerce. Et cela renvoie à leurs délires de persécution tous les Cassandre qui appellent à l’apocalypse en Turquie, comme en atteste G. Alex Mungiuri, vice-président de Schaeffler Automotive Aftermarket Moyen-Orient, Afrique et Turquie, et d’origine turque : “Les fournisseurs n’ont pas de problème ici, même si on parle beaucoup de politique. En ce qui concerne l’après-vente automobile, je me suis aperçu que la politique n’avait aucune influence sur le marché. La confiance sur le marché demeure et, si l’on considère le Moyen-Orient dans sa globalité, ou l’Europe de l’Est, nous sommes plutôt stables ici ! D’ailleurs, on voit que l’automobile investit plus ici qu’ailleurs, Mercedes vient d’implanter des centres de Recherche et Développement par exemple”. On ne manquera de conclure par cette petite phrase de Catherine Cirrotto, responsable du marché d’Amérique du sud pour la maison turque, Klas, elle qui a passé des années en Algérie : “Le négoce international n’a pas de religion et ne fait pas de politique.” Clair, non ?
Et si on achetait ?
Si le marché régional s’avère très fructueux pour les exposants, il recèle également bien des attraits pour les acheteurs, en atteste la présence de l’équipe de choc de Lucile Olivas, directrice des achats pour Groupauto ou encore celle de Jean Rousseau, relevant quelques bonnes idées pour ACR et, pourquoi pas, pour Autodistribution, entre deux commentaires sur les voitures anciennes… Les commentaires de ce routard de la filière sont précieux, aussi, n’hésiterons-nous pas à vous en livrer quelques-uns, comme celui-ci, fondateur : “Je parcours beaucoup de salons pour voir si de nouveaux produits sortent ou de nouveaux fabricants qui naissent. Je suis persuadé que c’est ici qu’émergent de nouvelles sociétés qui se rendront après à Frankfurt. Nous assistons à une nouvelle dynamique qu’il n’y a pas ailleurs, à mon sens. Il y a beaucoup d’idées à prendre, il faut les chercher bien sûr”. Et des créateurs de bon niveau, on en découvre beaucoup sur le salon, “une évidence” pour Tiphaine Bugnot, de Business France, qui a depuis longtemps relevé “le bon niveau de formation des acteurs de la filière après-vente. Les jeunes n’hésitent pas à aller se former en Allemagne, acquérir des savoir-faire d’ingénieurs et reviennent ici pour monter des structures ou apporter de nouveaux débouchés aux groupes existants. Ce sont d’excellents interlocuteurs aussi pour nos exportateurs”. Jean Rousseau ne démentira pas, lui qui cherche ici “les produits nouveaux qui n’existent pas encore en distribution indépendante ou qui n’ont pas encore été déclinés.” Une aubaine pour ses “patrons” qui “attendent des produits finis, prêts à être consommés”. Et Jean Rousseau de donner une leçon de choses qui ne laisse pas de nous esbaudir : “Dans ce pays, on fabrique, on est dynamique, la créativité est vraiment là. Alors, effectivement, la copie prolifère, mais dans une région où se fabriquent beaucoup de copies, on peut trouver des professionnels qui proposent autre chose, ils savent copier, parfois à la perfection, cela signifie qu’ils savent fabriquer. Cette culture automobile est bénéfique par les savoir-faire qu’elle met en permanence à jour”. Reste que savoir acheter nécessite quelque expérience. Un élément qui n’a pas échappé aux nouveaux propriétaires d’ACR… Au vu du nombre d’industries locales qui se développent et de celles implantées par les constructeurs et équipementiers internationaux, nous sommes convaincus par ce discours de la méthode.
En termes de marché
A l’occasion d’Automechanika Istanbul, Muriel Domenach, Consule Générale de France à Istanbul, a reçu les professionnels de l’automobile, français et turcs au Palais de France, non loin de la place Taksim. Son discours ne laisse pas d’ambiguïtés quant aux opportunités pour les acteurs français de venir en Turquie, y compris en rechange. Se félicitant de la réussite de Speedy (Autority Group), le Consul a rappelé que les entreprises françaises avaient l’opportunité d’amener leur savoir-faire pour accompagner le marché face aux nouveaux besoins et technologies. “Avec plus de la moitié des véhicules âgés de plus de 16 ans et des contraintes environnementales fortes”, le marché de l’après-vente s’avère une manne pour tous ceux qu’une progression à deux chiffres intéresse. De même, Madame la Consule Générale a encouragé les acteurs de l’industrie automobile française à développer les coopérations avec les professionnels turcs, “à même de les aider aussi dans la conquête de nouveaux marchés dans les pays environnants”. Parallèlement, il fut aussi question de la forte présence de l’industrie automobile française en Turquie et du soutien qu’elle peut apporter aux nouveaux entrants (objet de cette réunion !) : “L’industrie automobile s’avère l’un des exemples les plus probants du succès de la coopération franco-turque dans le secteur industriel. Grâce aux récentes implantations des constructeurs en partenariat avec les entreprises turques, (principalement, Renault avec Oyak depuis 1969), suivies par les équipementiers les plus importants comme Valeo, Faurecia, Plastic Omnium, Dourdin, MGI, jusqu’à l’installation des centres de Recherche et Développement les plus modernes, les entreprises françaises ont largement contribué, ces 50 dernières années, à ce qu’est devenue l’industrie automobile turque aujourd’hui, une industrie majeure et compétitive au niveau international, au 6e rang européen et, depuis des années, occupant la première place des secteurs d’exportation du pays (…)”.