L’illusion de La maîtrise ou La maîtrise de l’illusion ?
Certes, tout cela devrait se passer sans licenciements, mais il ne faudrait quand même pas que cette “illusion d’optique” masque une autre réalité : avec le non-remplacement de ces postes, ce sont des emplois qui ne seront plus disponibles pour accueillir les nouveaux arrivants sur le marché du travail, soit, au final, des chômeurs potentiels qui viendront gonfler un peu plus les statistiques nationales. Mais la ligne rouge n’étant pas, paraît-il, franchie, on peut penser que “ça va mieux que si cela allait plus mal”.
Les causes affichées pour expliquer cette situation sont connues : manque de compétitivité des usines françaises et chute des volumes de vente et donc de production. L’autre cause également connue mais moins affichée pourrait s’appeler “délocalisation de la production”. On peut alors regretter que les ventes de nos constructeurs nationaux soient tombées aussi bas et l’excuse de la chute des marchés européens et du marché français n’est qu’un mauvais alibi. En effet, d’une part, la chute du marché français est du même niveau que celle du marché européen si l’on compare 2012 au marché socle national de renouvellement de ces 10 dernières années, hors effet artificiel “E.P.O” des primes à la casse et bonus divers, et, d’autre part, la chute des constructeurs français est malheureusement très supérieure à celle du marché. Ce qui traduit bien, il ne faut pas se bercer d’illusions, une performance commerciale assez catastrophique, surtout comparée à ce que font d’autres constructeurs généralistes. Erreurs stratégiques produits ? Stratégie industrielle délibérée ? Mauvaises performances ventes et services ? Nous nous garderons bien de juger même si, en tant qu’acteurs majeurs de l’Après Vente, nous avons bien quelques idées sur le sujet. Alors, la surcapacité de production des sites nationaux, la nécessité de réajuster (à la baisse) le point mort des usines françaises… Tout cela ne fait pas que traduire l’incapacité de produire efficacement mais plutôt, ou surtout, de produire des véhicules que les clients potentiels aient envie d’acheter.
Alors, que faut-il penser de l’implication de l’Etat dans tout cela ? Que l’Etat se préoccupe de la compétitivité générale des entreprises françaises et tout particulièrement de l’industrie est très pertinent. Qu’il fasse partager ses préoccupations et les solutions à mettre en œuvre avec les partenaires sociaux est tout autant pertinent. Par contre, qu’il veuille intervenir dans la stratégie des entreprises et jouer de la carotte (subventions – protection) et du bâton est tout à fait illusoire et déplacé à l’époque où les affaires se traitent au niveau mondial par des groupes internationaux. Les stratégies déployées par Philippe Varin ou Carlos Ghosn, bonnes ou mauvaises, sont leurs stratégies et ce sont leurs actionnaires qui apprécieront, n’en déplaise à nos ministres et leur 15 % de participation dans Renault.
Les derniers événements en date en sont la parfaite illustration. Evénements qui font suite à d’autres ces dernières années, qui s’inscrivaient, aussi sous la précédente législature, dans la même tonalité.
Alors, il est temps d’arrêter de s’illusionner ou de vouloir illusionner le “bon peuple” sur la capacité de l’Etat à maîtriser la situation. Est-ce d’ailleurs à lui de chercher à maîtriser quelque chose qui n’est pas franco-français mais planétaire et qui, de toutes les façons, lui échappe inéluctablement.
Il est plutôt temps de s’intéresser à ceux, PME-PMI-Artisans de la distribution et des services de l’automobile, qui pèsent bien plus que les seuls industriels de la construction automobile, qui génèrent de la valeur ajoutée et de l’emploi, qui s’approvisionnent à plus de 90 % auprès de sociétés établies en France et qui ne demandent pas de subventions payées par la collectivité. Ces PME-PMI veulent simplement pouvoir travailler librement, sans les entraves des monopoles passéistes accordés aux constructeurs nationaux. Ces privilèges déplacés ne les empêchent pas de conduire, comme ils le veulent, leurs stratégies, et cela se comprend, n’en déplaise aux politiques qui ont l’illusion de croire que les faveurs qu’ils leur accordent seront payées de retour.
Enfin, il ne faut pas oublier les millions de citoyens automobilistes, à qui l’Etat impose de payer pour les faveurs accordées aux constructeurs (subventions diverses, prime à la casse et prix excessifs sur les pièces détachées sous monopole). C’est clair que ces dépenses imposées et dont ils ne bénéficient pas en retour, plombent un pouvoir d’achat déjà bien malmené et que ce n’est pas comme cela qu’ils vont pouvoir relancer la dynamique d’une consommation dont la France a bien besoin.
Alors, messieurs les politiques, ouvrez les yeux, ne vous laissez pas bercer d’illusions et ne cherchez pas non plus à nous illusionner. Pensez à des acteurs bien concrets, bien nationaux, nos PME-PMI-Artisans et nos citoyens automobilistes et laissez-les enfin bénéficier de la libre concurrence dans l’entretien et la réparation de leurs 31 millions de véhicules.
Si vous ne savez pas comment faire, reposez-vous simplement sur les recommandations éclairées et pertinentes de l’Autorité de la Concurrence publiées début octobre 2012.