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“Mon objectif est la rentabilité, avec un chiffre cohérent avec la taille de l’entreprise”

Publié le 21 février 2013
Par Clotilde Chenevoy
6 min de lecture
Emilie Revelut, gérante Accessoires Automobiles Jura - Emilie Revelut a fait une entrée dans le monde de la pièce de façon abrupte, prenant la succession de son père, sans formation ni expérience dans le domaine. Un véritable challenge pour cette jeune femme âgée alors de 25 ans, qui a mis à profit son bon sens et sa logique pour redresser la barre. Huit ans plus tard, les établissements Revelut n’ont jamais été aussi profitables…
Emilie Revelut, gérante Accessoires Automobiles Jura - Emilie Revelut a fait une entrée dans le monde de la pièce de façon abrupte, prenant la succession de son père, sans formation ni expérience dans le domaine. Un véritable challenge pour cette jeune femme âgée alors de 25 ans, qui a mis à profit son bon sens et sa logique pour redresser la barre. Huit ans plus tard, les établissements Revelut n’ont jamais été aussi profitables…

Comment s’est passée la reprise de l’entreprise en 2005 ?

Ce fut très compliqué. Nous avons perdu 25 % de chiffre d’affaires en neuf mois. La société avait été laissée aux mains des employés, il manquait un capitaine à bord. La prise de contact avec les employés n’a pas été simple, car ils me connaissaient, et savaient que je n’avais pas d’expérience dans le secteur. De plus, le monde de l’automobile reste un monde très masculin, même si mon statut de gérante me sauve quelque peu. Environ 50 % du personnel a préféré partir pour de nouveaux horizons. En février 2006, je me suis lancée dans un audit complet de l’entreprise. J’ai alors découvert de mauvaises pratiques, pour ne pas dire des escroqueries.

Quelles ont été vos premières actions ?

J’ai notamment dû recruter du personnel, dont un commercial. Je me suis fiée à mon instinct. J’ai opté pour un garagiste plutôt qu’à un profil de commercial, afin que les clients puissent discuter avec un interlocuteur qui connaisse leur métier et leurs attentes. De plus, ayant des connaissances en marketing, j’ai travaillé rapidement sur ce point, notamment pour contrer la concurrence. Une boutique s’est montée à quelques rues de nous peu de mois après le décès de mon père. Nous avons donc communiqué pour rappeler que Accessoires Automobiles du Jura, dit aussi les Etablissements Revelut, restait pleinement opérationnel. L’enseigne aussi a été modernisée afin de signifier un changement de propriétaire, et insuffler une nouvelle dynamique. J’ai rencontré tous nos fournisseurs. La plupart m’ont aidée, certains en ont profité. Cela m’a permis d’apprendre et, aujourd’hui, nos relations fonctionnent bien. Au final, il m’a fallu trois ans pour remonter l’entreprise. Je n’ai pas suivi de formation, j’ai tout appris sur le tas. J’ai pris le temps d’analyser les situations, faisant appel au bon sens et à la logique, et mettant à profit les quelques notions de commerce que j’avais.

Aujourd’hui, comment se porte la société ?

Nous réalisons un chiffre d’affaires de 1,8 million d’euros, avec 10 personnes. J’ai dépassé les résultats que réalisait mon père, les multipliant par quatre. Et ce, grâce à l’équipe qui m’a suivie. L’entreprise a complètement changé, avec une moyenne d’âge de 36 ans. Mon objectif est qu’elle soit rentable, avec un chiffre d’affaires cohérent avec sa taille. La philosophie de la société n’a, en revanche, pas changé. Mon père a toujours mis un point d’honneur à ne jamais dire non à un client. Les établissements Accessoires Automobiles du Jura se trouvent reconnus pour leur accueil et leur qualité de service. Pour ne jamais dire non à nos clients, nous stockons donc environ 50 000 références, pour une valeur de stock de 360 000 euros. Nous nous approvisionnons en direct chez certains équipementiers ou auprès de la plate-forme de l’Agra. Nous pouvons aussi avoir recours à des collègues de l’Agra, ou encore à des plates-formes régionales, le but étant de répondre rapidement à la demande de notre client.

Vous évoquez l’Agra. Comment avez-vous intégré le groupement ?

J’ai découvert, en reprenant l’entreprise, que mon père faisait partie du conseil d’administration de l’Agra. Et j’ai repris sa place. La société est membre du groupement depuis les premières heures. Mon père a donc connu les turbulences du début des années 2000, lors du départ d’André Brutinel. Le groupement a su rebondir, avec le retour d’André Brutinel. En 2007, les banques ont suivi à nouveau nos développements. Nous avons alors investi sur Décines, pour une structure plus grande et plus accessible pour les transporteurs. Le service aux adhérents s’est amélioré, ce qui a entraîné une croissance importante pour le groupement. Enfin, en 2012, nous avons encore été obligés de bouger pour continuer de croître, sur un bâtiment de 18 000 m2, à Meyzieu. Parmi les autres réalisations du groupement, on peut aussi citer la marque de distribution Tecdrive, qui a bénéficié d’une belle mise à jour marketing et d’une extension des références. Il reste toutefois encore du travail sur ce dernier point. Cette MDD nous permet de répondre à une demande de prix, pour les véhicules de plus de 10 ans, avec une marge correcte. La conjoncture économique a entraîné une hausse de la demande de premiers prix, et donc de la MDD, au détriment de la marque Premium.

Que pensez-vous du rachat de Précisium par Groupauto ?

Je n’aime pas cette démarche où l’on impose ce choix aux garagistes. Je me sentirais trahie de savoir que mon voisin concurrent devient maintenant de la même famille. Il faut se différencier sur le marché pour développer les ventes. Après, je conçois que cette concentration soit une suite logique dans le commerce et je souhaite que cela ouvre des portes de prospection pour l’Agra. Personnellement, je reste indépendante dans mon univers de Lons-le-Saulnier, qui a déjà lui-même ses particularités.

Quels services mettez-vous en place pour fidéliser votre clientèle ?

J’ai créé un service de livraison express, qui livre quatre fois par jour dans un rayon de 25 à 30 km. Nous disposons pour ce service d’un camion maison et faisons aussi appel à un transporteur, notamment pour les points plus éloignés. Auparavant, la livraison se faisait par les commerciaux, qui ne pouvaient pas optimiser leurs tournées. Ce service permet aux garagistes de ne pas se soucier de sortir de leurs ateliers, et de gagner du temps en se concentrant sur la réparation du véhicule. La concurrence avec la nouvelle distribution est forte, nous devions leur offrir une solution pour disposer rapidement de la pièce, et ainsi capter les opérations d’entretien courant. Ce service représente clairement une valeur ajoutée, avec un coût. Notre grille tarifaire reste intéressante, sans être la moins chère du marché. Elle est cohérente avec le service que nous rendons. La qualité du service commence, d’ailleurs, dès que le téléphone sonne. Je tiens à ce que quelqu’un décroche avant cinq sonneries. Notre secrétaire sert également de standardiste, pour faire tampon si tous les magasiniers sont en ligne. Face aux grosses structures, comme celle de l’Autodistribution, nous arrivons à prendre notre place.

Au-delà de la livraison, quelles actions organisez-vous ?

Je cherche également à fidéliser régulièrement nos clients, en organisant des repas conviviaux et des soirées techniques afin de les tenir informés des dernières innovations. J’ai souvenir de mon père discutant avec les clients de tout et de rien autour d’un bon café. Désormais, j’ai une équipe qui sait très bien le faire. De mon côté, j’ai dû décrypter les codes et leurs fonctionnements, et j’ai trouvé ma place. Chez nous, tous les clients sont traités avec respect, et nous avons à cœur de répondre à leurs attentes.

Comment se compose votre CA en professionnels et particuliers ?

Les professionnels représentent 75 % de notre chiffre d’affaires pour 25 % de particuliers. Je souhaite augmenter la part de ces derniers. Nous engageons des travaux pour changer le sens de circulation du magasin, et créer un comptoir spécifique pour eux. Nous communiquerons d’ailleurs davantage vers cette cible pour créer du trafic, notamment en mettant en avant toutes les pièces et consommables, que les automobilistes achètent en grande surface, centre-auto ou encore sur le Web.

Avez-vous été impactés par le développement des ventes de pièces sur Internet ?

Internet a fait beaucoup de mal aux tarifs. De telles remises représentent pour moi une concurrence déloyale. Nous devons nous adapter et valoriser notre qualité de service. Les professionnels n’achètent pas forcément en ligne, car cela suppose tout de même de passer du temps devant l’ordinateur pour trouver la pièce. Chacun son métier. Généralement, ils nous appellent et le magasinier se charge de trouver la référence. Le particulier, en revanche, prend le temps de trouver le prix le plus intéressant. Pourtant, le do-it se complique avec la technicité des véhicules, et les automobilistes prennent le risque de se retrouver avec des pièces mal montées, sans garantie ni recours en cas de problème. Je suis moi-même une utilisatrice du e-commerce, mais je ne mets pas en jeu ma sécurité. Quand un professionnel vient nous voir avec un devis du Web, nous devons lui rappeler l’importance du service, de l’accueil. Nous restons commerçants malgré tout. Par exemple, si nous ne disposons pas de la pièce, nous offrons les frais de port.

Réfléchissez-vous à des axes de diversification ?

Il est impératif de se diversifier car le secteur de l’automobile est chancelant. Le marché change, mais on ne sait pas encore dans quelles directions. Ainsi, nous avons établi un partenariat avec Promauto pour devenir spécialiste de la batterie, en prenant le panneau ProxiVolt. Nous sommes actuellement en pleine prospection clients. Nous avons encore beaucoup de possibilités. Nous réfléchissons par exemple aux pièces techniques ou à l’outillage. Ces deux familles restent encore peu travaillées. Notre objectif consiste à élargir notre portefeuille clients, en touchant d’autres secteurs d’activités professionnelles, industriels et agricoles.

Irez-vous sur Equip Auto ?

Oui, nous comptons rencontrer nos fournisseurs, faire un peu de négoce. C’est aussi l’occasion pour les équipes de découvrir des nouveautés, suivre les conférences et prendre le pouls de la profession.

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Bio Express

Emilie Revelut, 33 ans, diplômée en design industriel, a commencé sa carrière en Suisse, en travaillant pour un studio de design spécialisé dans la conception et la fabrication de stands d’exposition pour les entreprises de luxe à travers le monde.
Elle reprend en avril 2005, suite au décès de son père, Pierre Revelut, l’entreprise familiale dont il avait lui-même hérité de son père, Raymond Revelut.

 

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