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AD Talbot, docteur de la pièce

Publié le 9 mars 2012
Par Clotilde Chenevoy
5 min de lecture
Thierry Talbot, accompagné de sa famille et de son équipe, a su transformer l’affaire familiale en un grand groupe, devenu un incontournable du secteur. Radiographie d’AD Talbot, Distributeur de l’Année 2011.
Afin d’impliquer les employés dans la vie de l’entreprise, Thierry Talbot envoie personnellement, tous les matins, un compte rendu des chiffres de la veille, ainsi qu’un cumul depuis le début du mois, en parfaite transparence.

Prix du Distributeur de l’Année Groupe

AD Talbot représente 8 sites, emploie 130 personnes et a généré sur 2011 un chiffre d’affaires de 28 millions d’euros. A cette activité, il faut ajouter de la technique et de la vente de véhicules avec Talbot Mécanique Rectification (TMR) et Saga Automobiles (concession Peugeot). Ainsi, cette année, le chiffre d’affaires global atteint 51 180 000 d’euros, un record pour le groupe. Et pourtant, quand Thierry Talbot apprend qu’il remporte le prix du Distributeur de l’Année des Trophées de la Rechange, l’entrepreneur semble surpris et s’empresse de mettre en avant le travail de son équipe. Et lors de la cérémonie de remises des prix, il attaque son discours en avouant qu’il est un médecin raté ! En effet, Thierry Talbot a commencé par des études de médecine à Angers, ratant à 50 % ses partiels. Il tente en parallèle le concours d’une école de commerce à Bordeaux, qu’il réussit. Hésitant toujours entre les deux carrières, l’étudiant partira finalement en Gironde pour trois années. Il trouvera quelque part un compromis, puisqu’il travaillera par la suite pour un laboratoire vendant des produits aux hôpitaux. De commercial, il passera ensuite directeur des ventes, ses qualités de négociateur s’étant vite révélées. Elles lui seront d’ailleurs très utiles pour la suite de son parcours au sein de l’entreprise familiale…

Retour dans la société familiale

En effet, en 1989, ses parents et son frère lui demandent de rejoindre la société Talbot, fondée en 1954. Le choix ne fut pas simple, Thierry Talbot dirigeait alors une équipe de 40 commerciaux et 15 administrateurs des ventes, alors que la structure familiale ne comptait que 18 personnes. De plus, la pièce automobile ne l’attire pas, et il déteste la technique, contrairement aux autres membres de la famille, formés initialement dans ce domaine. Par exemple, son frère, Jean-Luc, qui gère la filiale TMR, est ingénieur des Arts et Métiers. Le poids de la filiation ou le goût du challenge amène donc Thierry Talbot à prendre en main la gestion des ventes ainsi que le service informatique de l’entreprise.

Vers la fin des années 1990, le développement de la société familiale s’accélère. En 1997, un troisième site est créé à Parthenay. Même opération en 1998, à Bressuire. Plus une reprise d’un cinquième site sur Niort, que l’Autodistribution lui propose de reprendre, et qui sera très vite installé dans de nouveaux locaux. En trois ans, la société a ainsi couvert la totalité du département des Deux-Sèvres, ainsi que le sud de la Vendée et le nord de la Vienne. “Ce développement était nécessaire pour ne pas mourir, justifie le P-dg. Toutefois, nous restons dans une gestion d’endettement maîtrisée, et nous n’ouvrons pas de nouvelle structure tant que le dernier magasin créé n’est pas pleinement opérationnel.”

Une pause suivra donc cette croissance, le temps de consolider le groupe. En 2004, avec le site de Poitiers, Thierry Talbot saisit une opportunité, les fondateurs de la société voulant vendre. Le prochain projet “maison” se fera en 2006, avec la création du septième magasin, à Châtellerault. Enfin, la dernière ouverture date d’avril 2009, avec une antenne sur Fontenay-le-Comte. Un nouveau projet se révèle toutefois déjà programmé pour l’été 2012, sur Civray.

Avec 8 magasins, l’immobilisation trésorière due aux stocks prend de l’ampleur. Un mal nécessaire pour Thierry Talbot, qui considère que “le métier est d’être distributeur-stockiste. Il nous faut la bonne pièce, le bon prix, livré dans les temps. Certains ont imaginé qu’avec les plates-formes, les distributeurs allaient arrêter de stocker. Bien évidemment, pour les queues de gamme, nous avons besoin d’eux. Mais ce qui a du sens, c’est d’avoir du stock. A 80 %, nous devons pouvoir dire oui”. Ainsi, les sites de Thouars, Niort et Poitiers représentent des plaques pour le groupe, tandis qu’un stock type a été défini pour les magasins périphériques.

Avec cette philosophie, AD Talbot se positionne comme un acteur incontournable de la région, même si la concurrence se montre ardue. Pour Thierry Talbot, le Web est le véritable concurrent. A l’évocation des ventes de pièces en ligne, l’homme d’affaires s’indigne : “Les équipementiers adoptent une attitude ambiguë. Quand je vois que les sites, sans stocker, disposent des mêmes conditions commerciales que moi, stockiste, je suis très remonté. Je qualifie cette concurrence de déloyale et, surtout, cela pollue les relations que nous avons avec nos clients. Je ne suis pas un voleur, mes tarifs se justifient par le service que j’apporte à mes clients. Chaque intervenant doit trouver une place légitime sur le marché, mais les équipementiers doivent respecter le rôle des distributeurs, qui centralisent 95 % des ventes aux professionnels. Nous avons également la capacité de réaliser un sourcing hors de France, dans des pays où les pièces sont moins chères. Avec la puissance d’une centrale, nous pouvons le faire. Attention donc au retour de boomerang.”

Synergies et services

Pour gérer l’ensemble de ces sites, l’informatique prend une place importante. Ce fut d’ailleurs l’un des chantiers auxquels l’entrepreneur s’est attelé en intégrant la société familiale. Parti d’une feuille blanche, Thierry Talbot a mis en réseau chaque magasin, avec un accès à l’ensemble des stocks. Le chef d’entreprise jongle également avec les systèmes informatiques de ses autres activités. Dans son bureau, les écrans se multiplient ! “J’aime faire plein de choses en même temps, mais toujours dans une gestion cadrée”, précise-t-il. Ainsi, à chaque ordinateur correspond une activité, plus une machine qui chapeaute le système. Un ultime écran s’affiche dans la salle de réunion, attenante au bureau du P-dg, qui réalise, via un système de vidéoconférence, les points avec son équipe.

Depuis 2008, le groupe a également mutualisé le SAV des équipements de garage. Le site de Thouars devient le SAMU de tous les outils vendus par le grossiste, par tous les magasins. En effet, pour un garagiste, ne pas pouvoir utiliser son outil de diag représente une véritable urgence ! Ainsi, 4 personnes s’occupent d’intervenir au plus vite, chez le client, ou en ramenant le produit endommagé pour un examen plus complet dans l’atelier d’AD Talbot.

Sur cette même logique de services, TMR, qui réalise un chiffre d’affaires de 3,45 millions d’euros, aide les professionnels sur le Diesel. “Nous travaillons quasiment exclusivement avec les professionnels, et uniquement sur des opérations techniques, précise Thierry Talbot. Nous cherchons également à faire évoluer les garagistes en les poussant à se former. Sinon, leur réflexe consiste à nous amener la voiture à chaque difficulté, alors qu’ils auraient pu réaliser eux-mêmes la prestation.” La formation est un sujet qu’affectionne depuis longtemps le chef d’entreprise. Le groupe possède depuis le 8 avril 2004 son propre centre de formation, Millenium, basé à Parthenay. Ainsi, dans le cadre du changement de législation sur la climatisation et l’usage des fluides frigorigènes, Thierry Talbot a proposé aux professionnels de venir suivre une journée de formation dispensée par le GNFA, afin de passer par la suite le test. Au total, 234 participants ont ainsi décroché leur diplôme. Pour l’entrepreneur, la formation représente l’un des leviers pour fidéliser les garages. Dans la même optique, il joue la carte des réseaux. Il anime ainsi 62 garages AD, 30 Autoprimo, 7 Bosch Car Service, et 30 Automarques, son propre panneau, créé pour répondre à un souci de concurrence entre garages.

Le P-dg avance donc sur tous les fronts. Toutefois, il avoue ne vouloir continuer à développer le groupe que si la troisième génération rejoint l’affaire familiale. A seulement 53 ans, Thierry Talbot pense déjà à sa succession, comptant sur ses deux fils, son neveu et sa nièce : “Je considère devoir transmettre l’entreprise, elle ne m’appartient pas. C’est un grand souhait.”

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