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Convention F.N.AA : le choc des contraires

Publié le 26 juin 2014
Par Hervé Daigueperce
6 min de lecture
Convention réussie, tables rondes qualitatives, intervenants motivés et adhérents d’une surprenante diversité, tel était le cocktail de la convention F.N.AA, ces 2 et 3 mai à La Rochelle.
Convention réussie, tables rondes qualitatives, intervenants motivés et adhérents d’une surprenante diversité, tel était le cocktail de la convention F.N.AA, ces 2 et 3 mai à La Rochelle.

Organiser les Rencontres de l’Artisanat Automobile n’est pas chose aisée, notamment sur un mois de mai en dentelles. Ce pari a, cependant, été remporté par la F.N.AA, qui a su rassembler près de 350 professionnels, autour de quatre rendez-vous de travail en amphi, et d’un mini-salon présentant nombre de solutions utiles aux artisans. Malgré le pont du 1er mai et l’attrait de la cité de La Rochelle, les adhérents de la F.N.AA ont répondu présent aux tables rondes, il est vrai ciselées pour eux, par Emmanuel Taillardat, animateur journaliste qu’on ne présente plus, et ont été très actifs auprès des exposants du salon, selon les appréciations de ces derniers.

En revanche, certains commentaires, qui ont fusé en fin de table ronde, révélaient une réelle opposition entre les propositions des intervenants et les adhérents… Quelques-uns d’entre eux, en effet, ont manifesté une véritable hostilité envers tout ce qui était nouveau, différent ou non “communautaire”, alors que d’autres révélaient leurs expériences dans de nombreux domaines, du site Internet, à la diversification, de la prise en mains du secteur électrique à l’utilisation des réseaux, du VO au référencement… Expériences réussies ayant débouché sur du chiffre d’affaires additionnel sérieux. Las, les contradicteurs avaient du répondant péremptoire à défaut d’être étayé. Un grand bravo à l’animateur et aux intervenants qui ont su dépasser leur propre surprise pour offrir des débats de qualité à l’assistance.

Les quatre débats de la F.N.AA

Après l’ouverture du président Gérard Polo qui a rappelé tous les dossiers sur lesquels la fédération avait travaillé en 2013, (carburant, Libre choix, fraudes à la TVA, accès aux infos techniques etc.) et continuait d’œuvrer, la première table ronde traitait de “L’artisan automobile face à son avenir : affirmez votre multi-spécialités”. Un sujet bien posé, en chiffres et tendances, par Odette Dantas, la directrice France du Gipa, et étayé par les invités sur la nécessité du diagnostic (“nécessaire pour toute intervention aujourd’hui”, selon Denis Tellenbach, Hella Gutmann), ou de la hot line (“loin d’être utilisée suffisamment” d’après Samuel Tschannen, Ima Technologies, alors qu’“utilisée en amont, elle permet de crédibiliser l’action du réparateur”, Denis Tellenbach), ou encore des données techniques (“les bulletins techniques et les remontées terrain des constructeurs sont dans les bases de Vivid désormais”, précise Alain Kurtz, Vivid Automotive). Amar Cheballah, agent Ford, et consultant Figiefa, complétera le tableau en affirmant “qu’il fallait 2 ou 3 outils multimarques pour travailler comme il faut”. Enfin, Didier Arnould, directeur du GNFA, a rappelé les enjeux de la formation, souvent bien compris par les professionnels (50 000 pros par an au GNFA ont reçu une formation) mais pas encore totalement intégrés alors que “l’évaluation en ligne est gratuite et permet de déterminer ses propres besoins”.

Moderne, vous avez dit moderne ?

La deuxième table ronde, intitulée “savoir utiliser les outils modernes de commercialisation” est celle qui a le plus suscité de commentaires, façon querelle des anciens et des modernes ! Ouvrant le débat, Farida Milliancourt, artisan auto, a fait part de la croissance de chiffre d’affaires de son garage grâce à l’utilisation d’Internet, “un outil de communication et un bon outil de travail, quand on s’en sert bien” a tout de suite ajouté Bertrand Billaud, Sarl Cathy et centre de contrôle technique Dekra, avant de préconiser le planning en ligne, un outil concret de réservation qui permet à chacun de programmer sa visite de chez lui, quand il le veut. Se considérant comme le “Trip Advisor” du garage, Allo Garage.fr, par la voix de son fondateur, Nicolas Chevallier, a montré combien il était intéressant d’être référencé sur la toile, son site, récent, recevant déjà 400 000 visiteurs par mois. En clair, les visiteurs découvrent les avis laissés par les utilisateurs du garage cité. Une notation complète doit voir le jour prochainement, aiguisant l’intérêt des visiteurs, ainsi qu’un badge genre “guide du routard”, qui apparaîtra sur les façades, “recommandé Allo Garage 2012”, par exemple. Une approche que ne renie pas Benoît Marchal, fondateur d’ID Garage, lequel ajoute préférer les avis signés et identifiés des internautes pour plus d’intégrité. La démarche d’ID Garage étant d’aller chercher les avis, “les consommateurs mécontents n’hésitant pas à mettre des avis alors que la majorité, les personnes satisfaites ne le font pas”. Publiant les devis en ligne, ID Garage se veut plutôt le “booking.com” du garage et établit les devis en fonction des tarifs que lui a donnés le garagiste. En “bons” français, quelques artisans de la salle ont rejeté toute idée de référencement, de notation par “des gens qui n’y connaissent rien”. C’est pourtant ce que nous faisons tous pour les voyages, les compagnies aériennes, les hôtels ou les restaurants… Alain Falck directeur de Fiducial Informatique, s’attachera, lui, à souligner combien il peut être intéressant d’utiliser de manière prédictive son fichier clients via Internet : “Sur un portefeuille clients actifs, seuls 10 % sont exploités, alors qu’il n’est pas difficile d’appeler son client en lui recommandant de passer au garage, car son véhicule présente une courroie à changer prochainement, etc.” L’offre personnalisée rassure, fidélise et permet de faire des ventes additionnelles. En annonçant qu’Autovista, la société de cotation des VO récoltait 860 000 annonces VO la nuit, les triait et les classait par ordre de prix, Dominique Allain, son directeur général a marqué des points : “nous donnons les indicateurs du marché les plus précis possibles”. Une aubaine pour les agents qui regrettent que les distributeurs les oublient quelque peu, alors que “les pros ne font que 32 % du marché”.

Je t’appelle, tu m’appelles

“Nouvelles technologies et leur maintenance, opportunités ou risques face à vos clients”, la troisième table ronde a rencontré un succès certain, notamment grâce au discours libertaire et enlevé de Brigitte Castell de l’AESRA, dénonçant les fourberies des constructeurs via “e-call”, “break down call”, etc. En clair, l’appel d’urgence qui sert à contacter les services de secours peut-il être détourné à des fins commerciales, en captant les véhicules vers les ateliers de la marque ou d’un réseau ayant payé une plate-forme de dispatching – où il a été surtout question de la protection des artisans via ce manque à gagner possible. Amar Cheballah évoquera le pass-thru, qui permet de transmettre les données de la voiture via un boîtier branché sur la prise OBD du véhicule et un “smart phone” à un opérateur comme Bosch, qui redirige vers un réparateur référencé. Régis Bodin de Daf conseil vantera les mérites de son boîtier “drive cool”, quand Thomas Ehlinger, fondateur de Mycar-Innovations.com évoquera la plate-forme de données connectées au véhicule (avec ou sans boîtier) au service des gestionnaires de flottes, par exemple, comme des opérateurs réparateurs (pannes furtives). En fait, toute une pléiade de solutions pour décrypter les besoins du véhicule, en se connectant à lui, et fournir les solutions adéquates. Globalement, c’est surtout un sentiment de protectionnisme que l’on retiendra comme fédérateur dans l’assemblée… Michel Vilatte clôturera en demandant “à qui appartient la voiture” ? Puis en s’emparant du sujet de l’éco-entretien avec l’aide de David Deregnaucourt, directeur de Spheretech, afin de proposer de gagner du chiffre d’affaires en analysant les gaz des véhicules et en préconisant de manière précise et lisible par le client, les solutions de remplacement ou d’intervention. Le fait que Norauto ait lancé le processus étant un gage de profitabilité – même si le combat entre centres-autos et MRA en a profité pour ressortir ! Et il fut question aussi de la formation pour opérer sur véhicules hybrides, une formalité au regard du chiffre potentiel à récupérer.

Un peu, mais pas trop…

Autre sujet de taille “Réseaux apporteurs d’affaires : un contrat gagnant-gagnant” a suscité tellement de remous qu’il a tout de même fallu mettre fin au débat, preuve, s’il en était besoin que la réponse est loin de faire l’unanimité… Malgré une introduction très claire de Patrick March, consultant, et fondateur de la Socca : “Entrer dans un réseau, c’est choisir d’entrer dans une dynamique entrepreneuriale, c’est obtenir des informations, c’est aussi bénéficier de toute une batterie d’outils, etc. […] L’apporteur d’affaires a, de son côté une démarche économique et financière. Le MRA doit avoir le même type de démarche commerciale”. Ainsi dit, cela paraissait facile, mais, très vite, les objections et réactions se sont fait sentir, malgré le propos de Didier Tessonneau, garagiste (et adhérent Temot) qui a tenu à préciser “il faut être acteur, je n’attends pas tout du réseau”. Jean-Baptiste Albouy, directeur des réseaux garages du groupe Autodistribution a vanté l’offre multispécialiste que son réseau permettait aux réparateurs de délivrer grâce à un panel d’outils, de solutions de sourcing VN/VO, pour atteindre un statut proche de la “concession multimarques”. Alain Bessin, Axalta, a, de son côté, recentré le discours ainsi : “La tête de réseau est là pour synthétiser ce qui se passe dans les pratiques du quotidien de chacun, de trouver les bonnes pratiques, de le mutualiser et de les mettre en valeur. Mais aussi pour récupérer des fichiers afin de faire des études de marché et de donner les outils adéquats”. Dans un même sens de proactivité, Frédéric Deroy, de Top Carrosserie-Groupauto, a conseillé aux adhérents “de se tourner vers les petites flottes car la proximité est aussi importante que les grands accords pour récupérer des clients “flottes””. De son côté, Luc Goillandeau, agent Citroën a reconnu “qu’appartenir à un réseau de marque permettait de bénéficier d’un plan produits porteurs, mais que l’on subissait, malgré tout, la concurrence des concessionnaires”. Et au final, ce qui a prévalu fut, quand même, côté intervenants, la nécessité pour les entrants dans un réseau, d’être locomotive. Côté adhérents, la volonté d’intégrer un réseau pour ne pas dépendre des apporteurs d’affaires, et de bénéficier de meilleures conditions - puisque seuls les réseaux peuvent être assez forts face aux assureurs et autres – furent les attentes exprimées.

Où il fut aussi question de la responsabilité de chacun dans les bonnes pratiques – moment délicat à passer – et des relations avec les experts – autre moment fort au cours duquel l’argument consistant à dire que les experts doivent recevoir l’appui des réparateurs et des carrossiers pour mieux tenir tête aux apporteurs d’affaires n’a pas reçu de franche approbation. “Il faut que le professionnel fasse son chiffrage avant la visite de l’expert”, par exemple n’ayant pas totalement séduit l’assistance. Le sujet étant sensible, la discussion a dû être interrompue, le timing ayant, par trop, été bousculé. En conclusion, d’autres conventions F.N.AA doivent d’ores et déjà être programmées…
 

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