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“L’enjeu majeur reste toujours d’avoir la bonne pièce au bon moment, et au bon prix”

Publié le 23 novembre 2011
Par Clotilde Chenevoy
7 min de lecture
Jean-François Bernard, directeur commercial PL, Groupauto - Le PL fait face aux mêmes contraintes que le VL. Le nombre de références explose, les immobilisations de trésorerie se révèlent importantes, et la gestion des stocks, notamment en termes de place, devient de plus en plus ardue. Dans ce contexte, l’apport d’un réseau multimarques séduit de plus en plus les professionnels.
Jean-François Bernard, directeur commercial PL, Groupauto.

Comment se comporte actuellement le marché du poids lourd ?
Sur 2010 et 2011, le marché retrouve des couleurs, comparé à 2008 et 2009. Le début d’année se montre positif, même si on enregistre aujourd’hui un léger tassement de l’activité, notamment dans le négoce. Les ateliers continuent en revanche de tourner, car le parc n’a pas été renouvelé, et il a donc logiquement vieilli. Chez les transporteurs, l’activité se tend. Ils sont impactés par le coût du gazole, qui pénalise leurs trésoreries. Les distributeurs doivent rester vigilants face à de possibles défaillances. Sur ce point, la LME a été positive puisqu’elle a permis de limiter les encours clients. Du côté du VUL, la crise n’a pas eu d’impact. Le secteur enregistre même une forte croissance. Cela s’explique par un marché réparti sur une multitude d’artisans, évitant ainsi un effondrement brutal.

Et comment s’en sortent vos réseaux ?
Le réseau G-Truck se maintient, notamment grâce au fait qu’il soit obligatoire de disposer d’un atelier pour faire partie de l’enseigne. A fin septembre, le chiffre d’affaires du réseau se situait autour de 7 %. Nous comptons 113 sites G-Truck et 65 Top Truck. Ce dernier panneau s’adresse notamment aux agents de marque qui souhaitent diversifier leurs activités, et ne possèdent que des ateliers. Nous célébrons d’ailleurs cette année les 10 ans du réseau. Lancer ce concept il y a dix ans était un pari osé. Culturellement, il reste toujours difficile de parler de fédération, d’esprit de famille, à des garages indépendants. Toutefois, la principale raison de leur entrée dans le réseau repose sur leur souhait de ne pas rester seuls, et de bénéficier de l’appui d’un réseau, notamment dans le cas d’une succession. Cela rassure également les clients transporteurs. On sent d’ailleurs une accélération des demandes, peut-être suite à la perte du panneau d’une marque. Le problème ne vient pas du savoir-faire, mais de la volonté ou de la capacité d’investissement.

Et pour le VUL ?
USC a été lancé il y a deux ans, avec pour objectif de capter les 5 millions de véhicules utilitaires pour des entretiens et réparations. Le concept Utilitaire Service Centre (USC) plaît, et nous gagnons des parts de marché. Nos outils pour aider dans l’identification de la pièce sont plébiscités, et nous constatons que les équipementiers qui travaillent avec nous sur cette famille prennent goût à traiter ce marché. Nous fédérons aujourd’hui 62 USC, avec une volonté d’atteindre les 150 centres d’ici 2012. Il s’agit d’une taille critique nécessaire pour adopter une communication nationale. Le concept reste toujours nouveau sur le marché traditionnel. Le VUL représente un outil de travail, au même titre qu’un camion, et demande donc la même réactivité. Mais en même temps, il faut aussi adopter un comportement de centre auto, en procédant à une analyse complète du véhicule, une fois que celui-ci est immobilisé. L’idée ne consiste pas à escroquer le client, mais bien à lui proposer des préconisations intelligentes pour immobiliser le moins possible son VU.

Vous exposez à Solutrans, quelles sont vos attentes par rapport à ce salon ?
Je suis un fervent défenseur de Solutrans. La profession du PL doit avoir son salon. L’événement a même la possibilité de monter en puissance au niveau de l’Europe, et ainsi de faire concurrence au salon IAA de Hanovre. Il rassemble toute la profession du transport, du constructeur au réparateur, et reste toujours très axé commerce. Sur le salon, nous comptons présenter l’ensemble de nos services PL et VUL. Nous en profiterons également pour célébrer avec le réseau les 10 ans de l’enseigne Top Truck. Nous décernerons également les Truck d’Or. Toutefois, cette année, la donne change, puisque nous allons labéliser l’ensemble du réseau. En effet, tous les centres sont audités, et à partir de ce document, nous classerons les ateliers en trois catégories : Truck d’Or, Truck d’Argent et Truck de Bronze, à l’instar des étoiles pour l’hôtellerie. L’objectif final consiste à ce qu’ils évoluent vers la catégorie supérieure ou progressent sur les 6 critères qui comptent. Cette labellisation permet de poser une trame et de les aider à se structurer. Par ailleurs, cela sera l’occasion pour l’adhérent de faire un point avec le distributeur, tous les ans, et de réfléchir à plus long terme sur le développement de sa société.

Vous comptez aussi renouveler votre communication…
A l’occasion de Solutrans, nous déploierons notre nouvelle communication nationale. Nous conservons l’association du camion et le thème du bien-être. La dernière fois, nous avions retenu deux mains qui massaient une remorque avec, comme idée phare, qu’après l’utilisation du véhicule, on s’occupe de le remettre en état. Pour la nouvelle campagne, nous allons jouer sur la notion de capital santé, en évoquant le capital Truck. Le premier visuel présente un coach qui fait faire de la gymnastique à des cabines de camion pour garder la forme. Le deuxième visuel est plus décalé, avec un camion qui se regarde dans une glace avec, en crème anti-âge, un pot G-Truck.

Quelles sont les problématiques auxquelles font face les professionnels du PL ?
Elles sont multiples. Suivre l’évolution des gammes se révèle de plus en plus compliqué, car les références explosent. Parallèlement, le prix des pièces augmente, on parle désormais de boîtiers électroniques qui ont une valeur unitaire importante. Par conséquent, la valeur globale des stocks demande une trésorerie solide. Accolé à cette problématique, l’enjeu majeur reste toujours d’avoir la bonne pièce au bon moment, et au bon prix. Cette phrase semble évidente, mais dans les faits, elle se révèle de plus en plus complexe à mettre en place. La simple connaissance du parc roulant ne suffit plus, car le nombre de pièces augmente sans cesse. La plate-forme nationale rentre alors en jeu pour aider les distributeurs, particulièrement pour les pièces à faible rotation. Je crois d’ailleurs au développement d’une structure nationale forte. D’autant qu’il faut compter environ douze heures pour démonter une pièce, et le professionnel a donc le temps de commander le produit défectueux. Chez Groupauto, nous nous appuyons sur la plate-forme du Rheu, spécialisée PL, l’ensemble des pièces VL et VUL ayant basculé vers Blois. Enfin, sur certaines familles de produits, comme les pièces moteur ou les pièces de train roulant, où les références sont vraiment trop nombreuses, nous travaillons en direct avec les marques qui possèdent une offre complète et gèrent directement la logistique.

Les professionnels sont-ils encore attachés aux marques ?
Elles restent encore très importantes dans le monde du poids lourd. Toutefois, on note l’arrivée, sur le marché, de marques peu ou pas connues en France, qui proposent de beaux produits, et qui sont en train de s’imposer sur le secteur. En VL, ils ont résisté à cette montée de marques alternatives grâce aux MDD qui venaient proposer du prix, et ont ainsi bloqué le développement des premiers prix. En PL, compte tenu des volumes faibles, on n’a pas la volumétrie de faire une MDD. On y réfléchit quand même, notamment avec une gamme courte sur le freinage ou les coussins de suspension, par exemple, pour répondre à la demande de prix sur le marché. Mais comme certaines marques arrivent déjà avec des produits alternatifs aux marques Premium, avec un prix dépositionné, peut-être faut-il directement s’appuyer sur ces sociétés ? En tout cas, il est vrai que nous avons de plus en plus de mal à défendre les marques, même si elles sont d’origine.

Etes-vous impactés par le développement des ventes en ligne ?
Internet n’a pas d’impact sur notre activité. Toutefois, il influe sur le prix, car les clients regardent en ligne le tarif des pièces de fournisseurs anglais ou américains. Ces acteurs perturbent le marché, avec des produits qui ne sont pas OE, mais qui cherchent à être identifiés comme tels, à des tarifs de 20 à 30 % moins élevés. Et les clients transporteurs peuvent alors se méprendre, et ne pas comprendre le différentiel de prix. Par ailleurs, à la suite de la crise, on assiste à une vraie bagarre sur les prix, avec les constructeurs qui cherchent à s’immiscer davantage dans l’après-vente, faute d’immatriculer de nouveaux véhicules, et qui veulent notamment conserver dans leurs réseaux les véhicules qui sortent de garantie. Cette concurrence a donc entraîné une baisse des tarifs. On assiste aussi à une dérégulation du marché, avec des pièces qui viennent de Belgique ou de Hollande, avec des distributeurs qui viennent s’implanter en France pour distribuer leurs pièces.

Comment vous adaptez-vous à cette concurrence ?
Face à ce phénomène, nous revoyons régulièrement nos politiques d’achat. Avant, nous négocions avec les équipementiers en France. Maintenant, nous nous ouvrons clairement sur des achats européens, en saisissant des opportunités. G-Truck est présent dans 12 pays et Groupauto International dans 30. Cette internationalisation nous permet donc d’échanger entre pays. D’ailleurs, à l’occasion d’Equip Auto, tous les responsables G-Truck des différents pays sont venus sur Paris pour étudier comment nous pourrions davantage échanger et apporter aux uns et aux autres des solutions à certains problèmes. Nous entrons dans une nouvelle phase du groupement, où nous faisons jouer les synergies entre les pays.

Le réseau est-il prêt au contrôle des étylotests ?
Le Cofrac se montrera très rigoureux pour donner les délégations ministérielles. Toutefois, le marché du camion est normé depuis longtemps, notamment avec le chronotachygraphe. La législation et les contraintes sont très fortes. Mais, aujourd’hui, 70 % du réseau propose cette prestation. Les adhérents auront des investissements à faire pour obtenir l’agrément et suivre les formations. Le discounter PL, qui casse les prix, aura de plus en plus de mal à vivre. C’est aussi cela qui protège la profession, il est de plus en plus dur de s’installer pour monter un atelier PL. Cela demande un investissement très élevé et aussi un certain savoir-faire. D’ailleurs, le monde du PL souffre d’un manque de candidatures, pour les mécaniciens comme les magasiniers. Ce métier étant associé à des pièces lourdes, à des dépannages à toute heure sur les routes, etc. Les bonnes formations existent, mais le véritable savoir-faire se fera au fil des années.

La G-School s’adresse-t-elle aussi aux adhérents PL ?
Il existe des modules PL à destination des distributeurs et des réparateurs, qui portent sur le commerce ou encore la connaissance du produit, et incluent aussi les formations des équipementiers. Les adhérents ont l’obligation de se former, car les systèmes se complexifient et demandent des compétences particulières, même sur une opération simple comme le freinage. De plus, la création de G-School leur apporte du confort, car nous centralisons toutes les offres de formation possibles, et nous leur faisons parvenir, tous les trimestres, les dates et modules disponibles. Ils peuvent ainsi définir à l’avance leurs plans de formation en fonction des sujets et des dates. Les adhérents savent qu’ils doivent former plusieurs personnes dans leur atelier pour éviter de dépendre d’un seul individu pour telle ou telle opération.

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BIO EXPRESS

53 ans
Formation technique et commerciale (Iscam)
Jean-François Bernard a commencé sa carrière chez un distributeur de pièces automobiles avant de rejoindre un constructeur de véhicules industriels chez qui il a exercé différentes fonctions commerciales et marketing, puis celle de directeur de la communication. Il intègre ensuite un équipementier, où il est nommé directeur marketing et où il participe à l’entité poids lourds, au sein de la division Aftermarket.
En 2007, il rentre chez Groupauto comme directeur commercial des réseaux poids lourds G-Truck et Top Truck.
 

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