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“Les réseaux nous permettent de fidéliser les garages et d’établir un véritable partenariat”

Publié le 20 juin 2013
Par Clotilde Chenevoy
8 min de lecture
Pierre Fichou, président, AD Fichou - Elevé dans le monde de la pièce, Pierre Fichou a repris l’entreprise familiale en lui donnant, depuis peu, un nouvel élan avec la reprise d’une filiale AD. Réseaux, services et diversité de l’activité représentent les piliers de son développement.
Pierre Fichou, président, AD Fichou - Elevé dans le monde de la pièce, Pierre Fichou a repris l’entreprise familiale en lui donnant, depuis peu, un nouvel élan avec la reprise d’une filiale AD. Réseaux, services et diversité de l’activité représentent les piliers de son développement.

AD Fichou a évolué, dernièrement. Pouvez-vous présenter votre société ?
Depuis le 1er avril, l’entreprise compte quatre sites : historiquement, Brest et Morlaix, et depuis leur rachat à l’Autodistribution, Carhaix et Quimper. Notre chiffre d’affaires atteignait 18 millions d’euros HT, dont la majeure partie provenait de l’activité automobile (60 %), pour 15 % de PL, 15 % d’industrie et le reste en équipement de garage et outillage. Avec les deux nouveaux sites, le CA se monte à 21 millions d’euros HT avec la reprise, et notre effectif s’élève à 115 employés. Notre objectif consiste à nous positionner comme un acteur incontournable pour nos clients. Nous leur apportons de l’aide et un appui, notamment dans le domaine du Diesel ou de l’électricité. Nous représentons une hotline pour eux. Je reste très attaché à la diversification de notre activité, valorisant la technique et le service aux clients.

Ce projet de reprise a-t-il été prévu depuis longtemps et l’intégration d’une filiale a-t-elle été aisée ?
En 2004, un confrère, les établissements Comoda, a cédé son entreprise, avec les deux sites de Carhaix et Quimper, à l’Autodistribution. Je n’étais pas prêt, à l’époque, pour les reprendre. En 2012, le groupement a accepté de nous céder cette filiale. Un accord a été trouvé en décembre, pour une cession au 1er avril 2013. L’organisation d’une filiale est différente de celle des indépendants. Ces structures disposent d’une bonne performance dans la gestion des express ou encore en informatique, par exemple. En revanche, les relations avec les équipes sont plus distantes. Nous avons désormais établi davantage de proximité, et je discute avec elles tous les jours, soit par téléphone, soit en face à face. L’Autodistribution cherche sans doute à préserver un certain équilibre entre les filiales et les indépendants, avec un ratio de l’ordre de 60/40. Ainsi, avec la reprise des établissements de Jacques Gobillot par l’AD, le groupement était d’accord, dans certains cas, pour céder certaines structures. L’objectif final consistant à renforcer la position de l’AD sur un territoire. Dans le cas d’AD Fichou, on reste sur un seul département, avec une population de 900 000 habitants. Nous avions donc beaucoup de synergies à mettre en place du fait de la proximité géographique. Brest reste la zone phare, avec 160 000 habitants, voire 350 000 pour l’agglomération brestoise. Avec quatre sites, nous couvrons désormais bien le Finistère.

Quand vous dites clients, il s’agit de professionnels ou de particuliers ?
Nous travaillons peu le particulier. Nos ateliers restent, par exemple, en priorité, au service des professionnels. Nous possédions auparavant deux centres-autos Maxauto (35 collaborateurs), revendus en 2009. Traiter le grand public et les professionnels se révèle difficile à mener de front. Nous avons préféré nous recentrer sur la clientèle professionnelle, d’autant que les centres-autos représentaient une activité secondaire, mais chronophage.

Cette philosophie explique le nombre important de réparateurs que vous avez sous enseigne…
Nous disposons d’un réseau de 70 garages et carrosseries sous les différentes enseignes de l’Autodistribution, sachant que la reprise de la filiale nous en a apporté une vingtaine de plus. Les réseaux se révèlent extrêmement importants car il s’agit d’une clientèle que l’on fidélise, et avec laquelle nous créons un véritable partenariat. Nous leur apportons au quotidien des solutions pour travailler dans les meilleures conditions. Dès le lancement des réseaux au sein de l’Autodistribution, nous avons tout de suite déployé ces concepts. Pour un MRA, c’est rassurant d’arborer un panneau et, surtout, cela lui apporte des solutions pour améliorer son chiffre d’affaires, comme de la communication. Dans le cas de la carrosserie, il ouvre la porte à des accords grands comptes. Et pour nous, il s’agit aussi d’un bon moyen d’occuper le terrain et de consolider nos ventes.

Certains distributeurs évoquent un côté mercenaire qui se développe chez les garagistes. Le constatez-vous ?
Les jeunes générations ont une certaine fidélité, mais qui a des limites. On le constate notamment avec la peinture, où les achats se dispersent. Nous arrivons cependant à les fidéliser, particulièrement avec les services et la technique. Il est vrai que le temps où un garage disposait d’un seul compte client chez un seul fournisseur est bel et bien révolu. Mon père me disait qu’il pouvait confier les clés de la boutique à certains de ses clients en toute confiance. Désormais, les jeunes comparent et s’informent. Nous nous appuyons également sur leurs remontées terrain pour nous ajuster, mais bien évidemment, nous ne pouvons pas empêcher une bataille avec la concurrence. Sur Quimper, cinq distributeurs indépendants sont implantés, et quatre sur Brest. Il y avait encore plus d’acteurs dans les années 1970. Les petits grossistes ont, soit disparu, soit été rachetés. Et, bien sûr, se rajoute au tableau la concurrence des constructeurs.

Face à cette concurrence, que pensez-vous du plan de communication de l’AD et de la nouvelle image de la marque ?
Les garagistes apprécient la communication nationale, mais nous menons aussi beaucoup d’actions en local, dont les impacts sont immédiats sur notre activité. Sur notre secteur, le nom de la Maison Fichou se trouve aussi connu que celui de l’Autodistribution. Concernant la nouvelle signalétique, c’est la TLPE qui est à l’origine de ces changements. Il fallait rationaliser les enseignes, et certains distributeurs souhaitaient également moderniser la charte graphique. L’objectif consistait donc à diminuer le logo, tout en gardant l’impact de la marque. Sur Quimper, nous avons mis une enseigne provisoire, et nous ciblons d’ici deux ans de passer aux nouvelles couleurs les quatre sites.

Les réseaux AD disposent également d’un site Web dédié. Est-ce indispensable pour vous ?
La présence sur la Toile est importante. Le Web remplace les annuaires et les catalogues. Toutefois, nous n’avons pas la volonté d’attaquer les particuliers. Donc, pour nous, le site joue un rôle institutionnel, tandis que pour nos clients, il s’agit de présenter leurs services et leurs entreprises.

Estimez-vous avoir été impactés par la concurrence du e-commerce ?
Les ventes de pièces en ligne impactent forcément nos ventes, même si ces sites ciblent surtout la clientèle des particuliers, que nous travaillons directement peu. Mais, surtout, cela modifie le référentiel prix. Pourtant, leur politique tarifaire ne leur permet pas d’être viables dans le temps. Des discussions sur ce sujet à la Feda ont d’ailleurs mis en évidence des comptes défaillants, soulevant une polémique autour du CIR et des délais de règlements fournisseurs à rallonge. Face aux garagistes qui nous mettent en concurrence avec les prix du Web, nous travaillons au cas par cas. Nous regardons notamment si l’opération reste rentable, pour eux comme pour nous. Les sites Internet représentent une concurrence déloyale. Ils n’ont pas les même frais que nous, qui apportons de l’assistance technique, du conseil et autres services. Si nous supprimons tous ces services, nous pouvons également afficher des tarifs 10 à 15 % moins chers. Quand nous en débattons avec les garagistes, ils le conçoivent bien, mais ils restent pour autant à la recherche des meilleures opportunités. Nous tentons d’amorcer une discussion autour de la mise en stock, afin d’améliorer leurs conditions avec des volumes. Mais il est vrai que la multiplication des références n’aide pas à stocker. Nous réalisons 10 tournées de livraisons par jour, avec une livraison de 2 à 4 fois par jour.

Quelle est votre vision du métier du distributeur dans cinq ans ?
En 1988, quand je suis arrivé dans l’entreprise, “on” m’avait alors indiqué qu’il n’y aurait plus de garages dans dix ans… Nous avons, depuis, beaucoup développé nos services. Cela justifie notre rôle économique de proximité. Face au Web, nous n’existerions d’ailleurs plus sans ces services. En PL et dans l’industrie, le secteur souffre davantage et je suis plus prudent quant à des développements futurs.

L’activité PL reste-t-elle en difficulté ?
Les transporteurs souffrent, avec des normes de plus en plus exigeantes. Et pour les opérations chronotachygraphes, les règles deviennent aussi draconiennes, avec une demande constante de formations et d’audits. Cet investissement, important, devient, d’ailleurs, difficile à répercuter sur la facture des clients, déjà pris à la gorge.

Que pensez-vous du rachat de Précisium par Alliance ?
Brest, avec la reprise en 1989 de notre confrère Pilayrou par Alliance Industrie, représente le berceau du groupe Alliance. Pour nous, cela ne changera donc pas grand-chose : nous commençons à les connaître… Et le rapprochement Groupauto et Précisium ne m’inquiète pas outre mesure. Autodistribution dispose d’une stratégie cohérente, et une harmonie s’est installée entre le siège, les filiales et les distributeurs indépendants, grâce notamment aux échanges constructifs avec Olivier Roux et Stéphane Antiglio. La fidélité à la centrale se révèle d’ailleurs très forte. Sur le terrain, la concurrence sur les prix restera similaire. Il convient avant tout d’être dynamique et proactif vis-à-vis des clients. Après, pour les distributeurs Groupauto et Précisium, il se révélera sans doute difficile, dans certains cas, d’être à la fois “cousins” et concurrents. J’imagine que des filiales Alliance se retrouveront en concurrence directe avec des adhérents indépendants Précisium. Nous avons connu cette situation avec Norauto, lorsque nous avions les Maxauto de Brest. La concurrence se fait à fleuret moucheté. Ce n’est pas très sain comme situation. Néanmoins, pour les distributeurs, il est toujours possible de rejoindre un autre réseau. Dans tous les cas, un grossiste doit rester affilié à un groupement, notamment pour bénéficier des conditions commerciales, des services, des réseaux de garages ou encore de la communication.

Les équipementiers apportent également des solutions pour animer les ventes. Etes-vous satisfait de leur soutien ?
Nous attachons beaucoup d’importance à la fidélité des relations que nous entretenons avec les équipementiers. Certains sont fournisseurs de l’entreprise depuis 1926. Nous utilisons bien entendu les animations qu’ils mettent en place : nous les adaptons parfois à notre clientèle. Après, il est vrai que la plupart de notre communication provient en grande majorité de l’Autodistribution, qui l’a sans doute élaborée avec les équipementiers. Les actions et promotions nous permettent d’accorder de meilleures conditions à nos clients : ainsi, ils peuvent se positionner sur le marché avec des offres attractives. A notre niveau, nous profitons également de ces opérations pour augmenter nos commandes. Il est vrai qu’avec la crise, nous avons augmenté nos volumes de commandes, afin de bénéficier de meilleures conditions d’achat. La concurrence d’Internet a excité tout le monde sur les prix pratiqués, avec une érosion des marges. Nous devons donc optimiser nos achats pour mieux nous positionner sur le marché.

Vous avez pris la présidence de la Feda Bretagne-Pays de la Loire. Dans votre périmètre, estimez-vous que les distributeurs connaissent le rôle de leur syndicat ?
Dans les années 1980, il y avait une méconnaissance du rôle de la Feda, qui semblait représenter alors une confrérie à laquelle on adhérait par sympathie. Désormais, les distributeurs connaissent bien mieux le rôle et les actions du syndicat. Ils le soutiennent en majorité, et ont compris son importance pour la défense de notre profession dans son ensemble (fournisseurs, distributeurs, réparateurs) face aux très puissants lobbys des constructeurs. Dans les années 1990, j’avais déjà exercé un mandat de président au sein du Sydefa Bretagne et Pays de la Loire, et j’ai accepté de reprendre à nouveau le flambeau. Il reste encore dans la région des distributeurs qui n’adhèrent pas à la Feda. On tente de les sensibiliser au rôle de notre syndicat, en valorisant notamment les actions qui ont été menées, particulièrement celles qui les concernent directement. C’est un long travail de fond. De plus, sur la zone Bretagne et Pays de la Loire, il y a peu de purs indépendants. Au final, nous organisons une réunion annuelle pour dresser un bilan des actions de la Feda et des différentes problématiques locales. Mais le travail le plus important s’opère au niveau national, et auprès de Bruxelles.

Irez-vous sur Equip Auto ?
Notre positionnement géographique excentré rend difficiles et onéreux les déplacements à Paris. Même pour les réunions nationales AD, il est difficile de mobiliser les “troupes”. Et en règle générale, nous nous déplaçons peu sur les salons. Nous irons sur Equip Auto, mais avec un groupe restreint, frais de déplacement obligent. Nous emmènerons principalement les réparateurs intéressés, et ayant un projet d’achat d’outillage et d’équipements de garage. Nous organisons également nous-mêmes des événements sur notre secteur. Nous attendons que les travaux du siège de Brest soient terminés pour relancer nos journées techniques.

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BIO EXPRESS

46 ans, marié, 3 enfants.
Titulaire d’un bac C, suivi d’un IUT Gestion.
En 1987, à 20 ans, il effectue un parcours initiatique en passant quelques mois dans deux entreprise, d’abord à Dreux Accessoires, puis chez AD Carmoine, suivis de deux expériences en garage et atelier sur Brest.
Le 2 mai 1988, à 21 ans, il entre dans l’entreprise familiale. Il commence comme magasinier vendeur, puis tourne ensuite dans les différents services.
En 1993, il prend la tête de l’entreprise, suite au départ à la retraite de son père.

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