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E-commerce

La Bonne Epave, peut-être pas la bonne affaire ?

Publié le 26 janvier 2017
Par Romain Baly
2 min de lecture
Calquée sur un modèle bien connu, la plateforme créée par Jérôme Marcon entend devenir la référence des petites annonces de pièces détachées d'occasion. Mais l'initiative repose sur des fondements discutables.
Calquée sur un modèle bien connu, la plateforme créée par Jérôme Marcon entend devenir la référence des petites annonces de pièces détachées d'occasion. Mais l'initiative repose sur des fondements discutables.

Depuis le 1er janvier dernier, le décret relatif à la loi de transition énergétique impose aux professionnels du secteur automobile de proposer l'alternative des pièces de réemploi à leurs clients. A ce titre, de nombreuses initiatives en lien avec ce sujet voient le jour, plus ou moins discutables au plan réglementaire.

La dernière en date est à mettre au crédit de Jérôme Marcon, ancien mécanicien devenu entrepreneur, qui vient de lancer le site internet "La Bonne Epave".
Au menu, créer rien moins que "Le Bon Coin de l'Automobile", à savoir une plateforme Internet de mise en relation entre acheteurs et vendeurs de pièces détachées d'occasion. Auto, moto, PL, bus, engins de chantier, agricole ou nautique, "la bonne épave" centralise des petites annonces (111 actuellement) pour tous types de véhicules, en garantissant une livraison sous 48 heures, partout en France. Voilà pour le concept.

Mais ce qui est plus nouveau, c'est que le site agrège des offres émanant de particuliers, ou bien même de réparateurs, bref, n'importe quel internaute qui disposerait de pièces à vendre. C'est là que plusieurs problèmes se posent.

Le premier, simple, c'est tout simplement qu'il est absolument interdit à tout un chacun de vendre des pièces détachées automobiles d'occasion. Ce commerce étant réservé aux seuls professionnels habilités à leur démontage dans les règles de l'art, les centres VHU agréés. Un particulier n'est autorisé à démonter des pièces que dans le cadre de son usage personnel, comme l'a déjà rappelé la DGCCRF, à la demande du CNPA, qui a de nouveau dilligenté l'organisme pour enquêter sur ce site. 

Par ailleurs, il faut également pointer le problème de la traçabilité des pièces. Puisque même si le site impose au vendeur d'indiquer le numéro de série de la pièce, il fait fi des obligations légales imposées aux centres VHU agrées, distributeurs de pièces de réemploi. Eux doivent répondre à des critères très stricts de qualité de pièces, de démontage, de stockage, de référencement, qui constituent le socle d'une pièce d'occasion de qualité.

Sur le site "la bonne épave", on trouve aujourd'hui peu d'annonces, principalement déposées par le fondateur lui-même. Normal quant à la jeunesse de l'initiative. Mais quand on voit combien l'identification de la bonne référence est complexe, malgré les nombreux outils mis à disposition des professionnels, on est en droit de se demander comment fera un particulier pour offrir un niveau de prestation comparable. Ne parlons pas non plus de garantie, un engagement légal chez les professionnels, qui, bien sûr, ne trouvera pas écho sur les ventes de "la bonne épave". Pour terminer, le site choisit de s'engager sur une livraison en 48 heures partout en France. Un peu cavalier, quand on ne maitrise pas les expéditeurs...

Enfin, le site affiche des véhicules entiers à la vente, pour lesquels il faut, là encore, rappeler le cadre réglementaire. Tout d'abord, seul un centre VHU agréé a le droit de vendre des VEI (véhicules économiquement irréparables). De même, la vente ne peut se faire qu'auprès d'un professionnel de l'automobile. Et en aucun cas, un particulier n'est habilité à vendre un véhicule entier non roulant. Un véhicule désigné "roulant pour pièce" est toutefois autorisé à la vente, mais dans son intégralité.

On rappelle que chaque année, en France, plus de 1,5 million de véhicules sont déclarés hors d'usage, le marché de la pièce de réemploi offre donc un potentiel de croissance colossale et serait, d'ores et déjà, estimé à quelques 300 millions d'euros selon le Ministère de l'Environnement, de l'Energie et de la Mer. Pas étonnant que beaucoup cherchent à surfer sur la vague…

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