La "coopétition" au cœur de l’après-vente de demain
Le 12 mai 2020, ICDP présentait les résultats de son dernier rapport d’études sur le monde de l’après-vente automobile d’ici à 2030 lors d’un webinar, animé par Steve Young, directeur général d’ICDP, Andrew Tongue, directeur de la recherche et Thomas Chieux, directeur associé France du cabinet.
Baisse de 30 % du marché de la réparation-collision
En préambule, Steve Young a rappelé que la période 2020-2030 serait une période de transition pour l’aftermarket et que de nombreuses incertitudes, notamment liées à la récente épidémie de Covid-19, persistent. "Ce marché concerne 300 millions de véhicules légers en Europe pour un chiffre d’affaires de 195 milliards d’euros, dont la réparation et l’entretien représentent 175 milliards d’euros et le do it 20 milliards. Mais d’ici 2030, celui-ci va connaître une baisse, principalement sur le marché de la réparation-collision. Pour la France, elle sera de l’ordre de 30 % et de l’ordre de 3 % pour l’entretien et la maintenance", a-t-il indiqué.
Parmi les principaux enseignements de l’enquête, on apprend que le client aftermarket de demain sera de plus en plus souvent un acheteur professionnel, et non plus le conducteur du véhicule. C’est une des conséquences de la multiplication des formules de location au détriment de l’achat en pleine propriété. On remarque également que la technologie va prendre une place prépondérante, dans tous les aspects de l’aftermarket, qu’il s’agisse des moteurs, de la carrosserie et structure du véhicule, de l’électronique et de la connectivité ou encore des Adas. Enfin, la réglementation, notamment en ce qui concerne les émissions polluantes et la protection des données personnelles, devrait peser de manière plus importante.
Intégrer le digital pour la distribution indépendante
Face à ces constats, quelles conséquences pour la distribution de pièces qui fait déjà l’objet d’un mouvement de concentration ? Avec l’évolution de la technologie embarquée au sein des véhicules, la rechange constructeur occupera sans doute un rôle plus important qu’aujourd’hui dans cette activité, en gardant captives de nombreuses pièces. De plus, l’évolution du digital pourrait pousser les constructeurs à aller toucher directement le client final via des plateformes online. Autre tendance mise en exergue par l’étude, l’essor attendu de la filière recyclage. Si le taux de pénétration de la pièce de réemploi dans la distribution reste modeste, ICDP prévoit un développement de cette activité dans les prochaines années. Enfin, du côté de la rechange indépendante, les acteurs sont appelés à poursuivre la distribution des pièces d’origine et issues de l’économie circulaire. Selon ICDP, les distributeurs indépendants ne devront pas manquer d’intégrer le digital à leur développement commercial sans perdre leur efficacité logistique, tout en adressant le segment du do it.
"La distribution des pièces détachées deviendra plus rationnelle à mesure que les comportements d'achat deviendront plus digitaux, et que la connectivité permettra également une plus grande optimisation logistique", a notamment précisé Steve Young. Les frontières, déjà de moins en moins étanches entre les rechanges indépendante et constructeur, continueront de s’effacer. "Pour le futur, le business as usual n’est plus pérenne, les acteurs de l’aftermarket devront jouer la "coopétition". Cela va par exemple se traduire par du partage de données, de techniciens, ou encore d’équipements entre les différents acteurs. L’idée est qu’un petit nombre de réparateurs, de distributeurs et de prestataires de services seront à la fois en concurrence et coopéreront afin de répondre aux besoins de leurs clients", renchérit Andrew Tongue.
La nécessité d’une spécialisation pour les réparateurs indépendants
Dans la filière aval du secteur, les concessionnaires et agents de marque resteront le canal privilégié de distribution pour les véhicules les plus récents mais devront adapter leurs stratégies, en augmentant leur pénétration au niveau local, en se positionnant auprès des gestionnaires de flottes, mais aussi en développant des liens avec les réparateurs indépendants, et en améliorant leurs compétences techniques.
Du côté de la rechange indépendante, ICDP estime que les réparateurs multimarques auront de plus en plus de difficultés à répondre aux besoins d’un parc multimarque aux technologies exigeantes. Le cabinet estime donc que ces derniers ont tout intérêt à focaliser leur expertise métier. Quant aux ateliers souhaitant conserver leur couverture multimarque, le soutien d’un réseau ou d’une enseigne semble indispensable pour leur permettre d’accéder à des services qui seraient sinon hors de leur portée.
"Les acteurs devront se spécialiser en choisissant un type de réparations ou certaines marques de véhicules, trouver le concept de garage approprié, utiliser à bon escient les plateformes en ligne, développer leurs propres business de gestion de flottes, construire des relations avec des concessionnaires locaux, et enfin développer des politiques de RH compétitives afin de conserver leurs effectifs", a indiqué Thomas Chieux.
En conclusion, l'expérience client pour les automobilistes devrait être plus positive malgré une chaîne après-vente de plus en plus complexe.