Recyvalor continue sa chasse aux pneus… et aux escrocs
En 2008, l'association Recyvalor a été créée pour prendre en charge les stocks historiques de pneus usagés, pour certains, constitués depuis de longue date. Ces décharges sauvages représentent un risque sanitaire et environnemental, et les associations, comme Robin des Bois, ont alarmé les autorités des dangers potentiels. Ce message a été entendu par le gouvernement et les différents acteurs de la filière, donnant naissance à Recyvalor. "Une expérience unique, précise Bénédicte Barbry, présidente de l'association, puisque cela ne relève pas du domaine de la responsabilité des acteurs, mais de la volonté d'agir face à des stocks orphelins. Au total, 28 membres participent à cette association, et aucune défection n'a été enregistrée malgré la crise."
Sur la France, 55 sites, pour un volume estimé de 62 tonnes de pneus usagés, rentrent dans le cadre des attributions de Recyvalor, qui s'est donné 8 ans pour éliminer ces stocks et un budget de 7 millions d'euros.
Aujourd'hui à mi-parcours, l'association a évacué 43 sites, soit 31070 tonnes de pneus usagés, pour un montant de 4,7 millions d'euros. Le financement provenant à 67% de Recyvalor, 30% de l'Etat, et seulement 3% des collectivités. C'est d'ailleurs l'un des points noirs au tableau.
La direction de Recyvalor regrette globalement le manque d'engagement des collectivités. "Il y a quelques exceptions notables, notamment dans le sud de la France, mais globalement les collectivités voient en Recyvalor une poche avec de l'argent à prendre", s'insurge Jacky Bonnemains, porte-parole de l'association écologiste Robins des Bois.
En effet, sans parler de participation financière, certaines villes ont accusé Recyvalor d'avoir détruit la chaussée avec les camions qui venaient nettoyer les sites, gratuitement faut-il le rappeler, et ont demandé réparation. D'autres voulaient facturer l'usage de feux tricolores pour gérer le plan de circulation…
"Il faut faire preuve de pédagogie auprès des collectivités, tempère Baptiste Legay, représentant du Ministère de l'Ecologie. Les collectivités territoriales sont souvent des petites communes. Mais il est important qu'elles soient mobilisées et participent à une partie de la solution, et qu'elles ne considèrent pas que ces stocks disparaissent comme par magie."
Un travail d'extraction complexe
En effet, recycler ces stocks historiques se révèle complexe, car ils sont souvent situés dans des zones difficiles d'accès, parfois marécageuses, avec de la végétation abondante. Il faut ensuite trier ces vieilles matières pour tenter de valoriser au maximum les enveloppes reçues.
A cela, se rajoute l'aspect administratif. En effet, si les stocks sont orphelins, (autrement dit, on ne peut légalement prouver qui est propriétaire du déchet), ils sont situés sur des terrains privés.
Eric Fabiew, vice-président de Recyvalor, se rappelle d'ailleurs que sur l'un des premiers chantiers, un propriétaire de champ, envahi par les pneus usagés, voulait que Recyvalor le paie pour récupérer les enveloppes. Ou encore, sur le site de Pouillac (en photo), la plus grosse décharge de pneus avec 20 000 tonnes abandonnées, le propriétaire était prêt à louer à un prix raisonnable son local pour stocker le matériel nécessaire au nettoiement du terrain.
Autre témoignage, une personne, certainement responsable pour l'un des stocks, a proposé les services de sa nouvelle entreprise pour l'enlever... Bien évidemment, l'association dispose des ressources nécessaires pour résoudre ces difficultés, mais cela entraîne des retards dans les chantiers.
Et après 2016?
Pour les 4 années à venir, Recyvalor espère bien arriver à bout de sa mission. En effet, les 15 sites restants sont les dossiers les plus complexes. Par exemple, pour le site de Souillac, des procédures sont en cours pour tenter d'identifier des responsables à sanctionner. Le stock a été estimé à 20 000 tonnes de pneus usagés, mais Recyvalor vient de découvrir qu'il s'agit d'une ancienne carrière. Le volume à traiter serait donc sous-estimé… Et la direction ouvre donc déjà le débat pour savoir ce que deviendra l'association après 2016.