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Distribution

Sébastien Le Rendu (Faral Automotive) : "La conversion des diesels au bioGNV est une piste importante pour pérenniser notre activité"

Publié le 7 juin 2023
Par Nicolas Girault
5 min de lecture
Après un parcours atypique, Sébastien Le Rendu est arrivé à la codirection de Faral Automotive avec Hubert Pothier. À 55 ans, il poursuit le redressement de l'entreprise de rénovation de moteurs. Parallèlement, il l'a engagée dans un projet de conversion d'utilitaires diesel au bioGNV.
Sébastien Le Rendu Faral
Sébastien Le Rendu, co-dirigeant de Faral. ©Faral

Vous avez repris Faral en 2020, alors qu'initialement, vous n'étiez pas issu du monde de l'après-vente automobile. Comment avez-vous sauté le pas ?

Sébastien Le Rendu : D'abord, j'étais tenté par le monde de l'entrepreneuriat. Je connaissais Hubert Pothier qui était salarié de Faral. Quand l'entreprise a déposé le bilan, il avait des idées de développement et répétait qu'on ne pouvait pas abandonner ce savoir-faire. Et comme il est plus rassurant de se lancer à deux, nous l'avons rachetée à la barre du tribunal. Nous en avons eu les clés le vendredi 13 mars 2020, trois jours avant le discours du président Macron annonçant le premier confinement. On a fait mieux comme démarrage !

 

Après ces débuts mouvementés, comment se porte Faral Automotive aujourd'hui ?

2020 a été une année chaotique pour nous, alors que l'activité de nos clients explosait. Nous avons dû patiemment retisser les relations avec eux et avec nos fournisseurs, grâce à nos commerciaux présents sur le terrain. Par exemple, certains partenaires ne savaient pas qu'on avait repris. Le travail a atteint un niveau correct à partir de septembre. L'année suivante, nous avons réalisé de très bons résultats avec plus de 7 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Mais l'année 2022 a été plus compliquée. Nous avons vu une baisse de volumes liée à l'inflation et au moteur d'occasion qui a pris des parts de marché. Nous pensons que 2023 sera positive. Raisonnablement, notre objectif est de retrouver le chiffre d'affaires 2021, et nous avons commencé à élargir notre catalogue. Pour l'instant, nous sommes sur des bases correctes.

Nous visons la conversion au bioGNV de 2 % de 1,2 million de véhicules potentiels

Pourriez-vous récapituler l'ensemble de vos activités ?

Faral rénove principalement les moteurs diesel français pour l'échange standard, exclusivement commercialisé via des distributeurs. Nous avons 130 références au catalogue. Nous remanufacturons des boîtes de vitesses, des culasses ainsi que des réservoirs d'AdBlue. Cette dernière production a été lancée en fin d'année dernière, à la demande de certains clients. Nous sommes surpris et très contents du démarrage de sa commercialisation. Par ailleurs, notre projet de développement comprend l'extension de notre gamme de moteurs – allemands, notamment. Nous remanufacturons déjà des modèles Ford, Fiat et bientôt un premier moteur Mercedes. La majorité de notre production est destinée à la France, même si nous conservons une petite activité à l'export, vers l'Italie, l'Espagne et le Portugal. Par ailleurs, dans le cadre de « l'Atelier Faral », nous effectuons de la réfection unitaire de moteur, notamment dans le domaine du véhicule de collection, agricole et de BTP. Il s'agit d'une activité prometteuse.

 

Après avoir investi dans votre appareil de production et dans vos équipes, quel est votre plan de développement ?

Faral emploie une cinquantaine de salariés, et nous avons investi en 2021 dans une équipe de 10 commerciaux qui sillonnent la France, pour assurer une forte présence sur le terrain. Nous avons profité du plan d'investissement de l'ancienne direction, qui avait installé des cabines de peinture, tunnel de lavage, etc. Par ailleurs, nous avons investi dans du matériel : une machine neuve pour refaire des blocs, une grenailleuse, un robot de dépose de joint sur la culasse, et du matériel de gestion.

Cela nous permet d'améliorer la qualité de notre production. Car pour affronter certains concurrents étrangers chez lesquels le coût de la main-d'œuvre est moins élevé, nous devons être meilleurs, avec du stock pour livrer le plus vite possible. Nous misons donc sur les trois pivots de la qualité, du prix et de la disponibilité. Reste la problématique de trouver de la vieille matière dans les centres VHU, avec parfois des délais de plus de 40 jours pour se réapprovisionner. Dans le cadre de France Auto Reman, nous rappelons aux spécialistes de l'occasion que leurs moteurs valent de l'or et que nous pouvons les valoriser.

 

Pouvez-vous expliquer pourquoi vous préparez la conversion de moteurs diesel au GNV ?

Lors du rachat de l'entreprise, nous avons hérité de ce projet de transformation de moteurs thermiques diesel au bioGNV, initié en 2017 avec la start-up toulousaine Lyptech. C'est une piste importante si nous voulons que Faral continue à exister demain, malgré la transition énergétique… Même si nous opérerons encore longtemps sur des moteurs thermiques, au-delà de 2030-2045 – puisque nous intervenons sur des véhicules qui ont entre 7 et 15 ans. L'idée, c'est de convertir les moteurs de VUL diesel au bioGNV.

Cela permettra notamment aux professionnels et collectivités locales de continuer à entrer dans les ZFE, avec des véhicules Crit'Air 1 pour un coût réduit d'environ 15 000 euros. Ils pourront ainsi répondre aux appels d'offres qui exigent dès aujourd'hui des prestataires avec des véhicules propres. Cette solution réduit de 90 % les émissions de particules fines, de 60 % celles de NOx, de 80 % celles de CO du puits à la roue, 2 de 50 % le bruit, tout en conservant la puissance du véhicule avec 440 kilomètres d'autonomie… Elle répond aux besoins de beaucoup de professionnels privés et publics, à la différence des véhicules électriques actuels qui ne les séduisent pas à cause du prix, du poids des batteries, de l'autonomie et du temps de recharge… Nous recyclons 80 % des pièces d'un moteur et ne créons pas de déchets supplémentaires, contrairement au rétrofit de véhicules thermiques en électriques.

Nous pourrions commercialiser trois moteurs bioGNV et ceux des cars fin 2024

Concrètement, où en êtes-vous sur ce projet ?

Nous avons un prototype qui roule déjà : un Citroën Jumper converti au biogaz. Mais, pour l'instant, au vu du règlement européen R115 qui ne prévoit pas ce type de transformation, nous ne pouvons pas lancer la production en série. Par ailleurs, il nous faut l'autorisation du constructeur… C'est là qu'intervient le groupe métier « Diesel et nouvelles technologies » de la Feda, dont Lyptech est membre. La Fédération est très active auprès des instances politiques pour faire évoluer la loi, comme cela a été fait par décret pour le rétrofit électrique.

Nous préparons aussi la conversion de moteurs Renault et Iveco-Fiat. Dans la région Pays de la Loire, on nous a demandé de convertir des cars scolaires au bioGNV. Car pour la même somme que l'achat d'un véhicule neuf propre, il est peut-être possible d'en rétrofiter une dizaine. L'argent économisé pour verdir ce parc pourra être réinvesti ailleurs par les collectivités. Nous économiserions ainsi la fabrication de véhicules neufs, très énergivores.

 

Quelles sont les perspectives de ce marché ?

Pour l'instant, nous sommes peu nombreux à travailler sur le rétrofit bioGNV. Mais si la loi passe, cela va susciter des vocations. Nous visons 2 % d'un marché potentiel de 1,2 million de véhicules, soit 24 000 véhicules. Cela représente notamment beaucoup d'emplois, directs et indirects, ainsi que de l'activité pour les filières de la distribution et de la méthanisation. Raison pour laquelle la Feda s'intéresse au projet.

Son action nous a permis de gagner beaucoup de temps pour rencontrer les pouvoirs publics. Si par exemple, l'autorisation était prise au deuxième semestre 2023, nous pourrions commencer à commercialiser nos kits début 2024. Nous pourrions atteindre une pleine commercialisation des trois moteurs et des cars en 2024.

 

Bio express

Après des études de transport international et de douanes, Sébastien Le Rendu débute chez le transporteur TSE (devenu Stef). Puis il entre au service de l'un de ses clients de l'agroalimentaire, dans sa Normandie natale. Il y prendra en charge la partie expédition-transport avant d'en arriver à la direction d'usine. Il dirigera ensuite les plateformes logistiques et usines d'un autre groupe du même secteur, avant de revenir dans le transport, chez STG & Nagel. Son parcours le ramène ensuite dans l'agroalimentaire, à la tête de trois sites de la chocolaterie Monbana, puis dans l'industrie à la direction des opérations de Celloplast (articles de jardin Nortene) … avant de se porter coacquéreur de Faral.

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