Antonin Peinture, premier distributeur robotisé

C’est une première en France et vraisemblablement aussi en Europe : Antonin Peinture a robotisé son entrepôt. Le distributeur de Cugnaux (31) n’a pas hésité à investir dans une technologie jusqu’alors réservée aux géants de la logistique. En effet, ce partenaire privilégié de la marque de peinture Axalta compte 27 salariés, générant un chiffre d'affaires 2024 de dix millions d'euros. Soit, une taille bien moins importante que les exploitants habituels d'entrepôts automatisés. Le sien est entré en service en février 2025, avant d'être officiellement inauguré le 26 juin dernier.
Pour l’occasion, l’adhérent Precisium Color (AAG), lauréat des Grands Prix de la Rechange 2023, a vu les choses en grand. Clients carrossiers, équipementiers, fabricants de peinture, assureurs, représentants du groupement et de la Feda — où l’entreprise est particulièrement engagée — ainsi que de nombreux partenaires ont répondu présents. Tous sont repartis impressionnés par les capacités de cette nouvelle plateforme automatisée.
Contre la pénurie, pour le bien-être
Les invités ont pu assister en direct à la démonstration. Trois robots élévateurs circulent sans relâche entre les 17 niveaux de racks pour déposer les bacs contenant les produits commandés sur un tapis roulant. Chaque référence est scannée, numérisée et intégrée dans un système de gestion automatisé. Seuls quelques consommables restent traités manuellement.
Les robots traitent ainsi jusqu'à neuf commandes en même temps, là où un préparateur est incapable d'en gérer plus d'une à la fois. Par ailleurs, ces automates ne se trompent quasiment jamais. Mais attention, ces systèmes n'ont pas été installés pour remplacer des salariés ! La motivation première des dirigeants était de résoudre deux problématiques : la pénurie de main-d'œuvre et le bien-être au travail.
"Nous avions des collaborateurs qui partaient en retraite, certains magasiniers prenaient leur place sur la route, avec des difficultés pour en recruter de nouveaux, comme dans tous les métiers, explique Nicolas Demoulin, dirigeant d'Antonin Peinture. Nous devions penser autrement et penser autrement, c'est adopter la robotisation".
Par ailleurs, ce distributeur très sensible aux thématiques de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) cherche aussi constamment à améliorer les conditions de travail de ses salariés. "Auparavant les préparateurs faisaient entre 10 et 14 km par jour. Aujourd'hui, ils se fatiguent beaucoup moins. L'automatisation leur permet d'aller plus vite et de se consacrer entièrement à la gestion de stocks en magasin".
Le service avant tout
Le métier a lui aussi évolué. "Ce ne sont plus de «simples magasiniers». Maintenant, ils gèrent les robots, les capteurs du système, en plus des stocks. Leur métier est plus intéressant et plus il l'est, plus il sera facile d'embaucher des gens." Cerise sur le gâteau : la formation requise est infiniment plus rapide. En effet, alors que de longs mois sont nécessaires pour former un bon magasinier, deux heures suffisent pour apprendre à travailler avec les robots.
Objectif : réduire les risques d'un turn-over "déjà inexistant" dans l'entreprise. Les salariés peuvent ainsi se concentrer exclusivement sur les services vers les clients. Tandis que la manutention est presque entièrement confiée aux machines. "Car, notre intérêt est de faire passer le service à nos clients avant tout. Car, comme je le dis toujours, les fabricants de peinture n'ont pas besoin de nous si nous sommes incapables de proposer des services."
C'est une visite de la plateforme First d'AAG qui a poussé les deux dirigeants – Nicolas Demoulin et Nicolas Franchet – à sauter le pas. Mais il leur a fallu trouver le bon partenaire pour concrétiser leur vision. Le premier spécialiste contacté, habitué aux très grands sites, a décliné la demande : il n’avait jamais travaillé avec de petites structures. C’est finalement le groupe Schäfer qui a accepté de relever le défi. Ensemble, ils ont ouvert un nouveau segment de marché : l’automatisation à la taille d'une PME.
Un investissement assumé
Le chantier aura duré douze mois, sur un site en activité permanente. Tandis que la climatisation et l’alimentation électrique étaient modernisées, Schäfer concevait et installait le système robotisé. Il a également fallu interfacer l’ensemble avec l’ERP de l’entreprise. Le chantier aurait été beaucoup plus rapide à mener sur un bâtiment neuf. Mais finalement, la bascule entre organisation logistique traditionnelle et automatisée a été aussi prompte que prévu.
L’investissement est conséquent : environ 3 000 euros par mois, soit 36 000 euros par an. Mais, "si une société comme la nôtre est incapable d'investir 36 000 euros à l'année, il faut penser autrement, estime Nicolas Demoulin. D'autant plus que cet équipement peut nous permettre de doubler le chiffre d'affaires de notre magasin".
Antonin se donne ainsi les moyens de sa croissance. "Chez Antonin, les erreurs étaient déjà très rares avant, mais là on se rapproche vraiment de la perfection", commente un invité… Et ce n’est peut-être qu’un début. Lors de la soirée, un autre automate — le robot de peinture Paint Go — a également été présenté. Comme chez les carrossiers qui s’équipent de bras automatisés, reste à voir combien de distributeurs de peinture — et au-delà, de pièces de rechange — franchiront le pas dans les années à venir.