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Carrosserie

Réparer durablement : le pari gagnant du Garage Morhet

Publié le 26 juin 2025
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Par Nicolas Girault
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5 min de lecture
Les réparateurs automobiles s’investissent de plus en plus pour réduire leur impact environnemental. Certains vont plus loin que d’autres, notamment parmi les carrossiers. Le Garage Morhet est de ceux-là, et il fixe la barre particulièrement haut.
Carrosserie Morhet
La famille Morhet n'était pas obligée d'investir dans ce nouveau site pour réduire son impact environnemental. Elle l'a fait pour s'adapter aux futures évolutions de la réparation. ©Carrosserie Morhet

C’est entre prés, bois et zones pavillonnaires qu’est implanté ce site de réparation automobile devenu un modèle du genre. À Saint-Michel-sur-Orge (91), le Garage Morhet se réinvente sous le signe de l’écoresponsabilité. En janvier 2024, son équipe a emménagé dans une carrosserie flambant neuve, conçue selon les principes les plus rigoureux de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

Ses dirigeants, Antoine Morhet, son Ă©pouse Catherine et son frère Olivier, s’étaient engagĂ©s dans cette voie avant mĂªme de s’approprier ces nouveaux murs. AdhĂ©rent du rĂ©seau Acoat Selected, le garage s’est portĂ© volontaire pour Ăªtre l’une des trois premières carrosseries françaises Ă  expĂ©rimenter le programme "Sustainable Repair Network" (RĂ©seau de rĂ©paration durable) d’AkzoNobel.

Le fabricant de peinture néerlandais a déployé cette initiative pour réduire les émissions de CO₂ liées à l’emploi de ses produits. Ce programme repose sur son outil digital CO₂ eRepairCalculator, qui collecte les émissions de gaz à effet de serre (CO₂, méthane, protoxyde d’azote) et de composés organiques volatils (COV), puis les restitue sous forme de tableaux de bord. Objectif : aider les ateliers à évaluer et à optimiser leurs performances environnementales.

Préparer l’avenir de la réparation-collision

"Le déclic environnemental est venu sur le tard chez moi. Je n’ai pas été élevé dans cette culture", confie Antoine Morhet. Sensibilisé par ses enfants, le dirigeant s’est d’abord penché sur le sujet avec la gestion des déchets. Par la suite, le carrossier a été marqué par le documentaire d’Al Gore en 2006 (Une vérité qui dérange), et s’est intéressé aux travaux de l’expert du changement climatique Jean-Marc Jancovici, le très médiatique créateur du bilan carbone pour l’Ademe.

Toutefois, le carrossier refuse tout dogmatisme écologique, essayant "de faire la part des choses" et restant éloigné des polémiques. Le réparateur se dit d’ailleurs parfaitement conscient que son activité repose sur l’usage de produits pétroliers et sur une consommation énergétique significative. "Je me suis donc dit que je devais également prendre ma part d’effort."

Carrosserie Morhet atelier

Dans l'atelier, l'espace permet de fluidifier le parcours des véhicules et de sécuriser le travail des employés. ©Carrosserie Morhet

Au-delà de ses convictions, l’analyse des évolutions du marché l’a conduit à s’engager dans cette voie. D’une part, la réglementation européenne CSRD contraint assureurs et fabricants de peinture à influer sur leurs partenaires (notamment carrossiers) pour généraliser les pratiques RSE. Une tendance qui risque de toucher plus directement les réparateurs à un moment ou à un autre…

En outre, la jeune génération, plus soucieuse d’environnement, infléchit déjà les attentes des clients de demain. "La génération de mes enfants sera plus sensible aux problématiques environnementales. Il faut s’y préparer", ajoute-t-il.

Autre motivation : assurer l’avenir de l’entreprise. Antoine Morhet pense que l’avenir de la carrosserie passe par des structures rationalisĂ©es, capables d’absorber de plus gros volumes. "L’une de mes motivations Ă©tait aussi de prĂ©parer ma sortie. Quand ce moment viendra, je transmettrai une entreprise viable et obtiendrai donc aussi un retour sur investissement grĂ¢ce Ă  ces efforts", complète le dirigeant. Autant de points qui ont poussĂ© l’équipe Ă  mĂ»rir ce projet pendant cinq ans.

Une carrosserie agrandie et pensée pour durer

L’entreprise est ainsi passĂ©e d’un bĂ¢timent de 400 m² avec 800 m² de foncier Ă  un site de 1 000 m² construit sur un terrain de 4 000 m². Cette nouvelle carrosserie a Ă©tĂ© dimensionnĂ©e pour accueillir Ă  terme des panneaux photovoltaĂ¯ques – ce qui a impliquĂ© un surcoĂ»t au moment de son financement. "Nous ne les avons pas encore installĂ©s car ils sont trop chers. Nous voulions d’abord rentabiliser la cabine de peinture, sans nous lancer dans plusieurs chantiers en mĂªme temps", prĂ©cise Antoine Morhet. L’investissement global, de l’achat du foncier Ă  l’équipement complet, se situe entre deux et trois millions d’euros.

Le site a permis de presque doubler les effectifs (de 8 Ă  14 salariĂ©s) et d’augmenter l’activitĂ©, passant de 800 Ă  environ 1 300 vĂ©hicules rĂ©parĂ©s par an. Le chiffre d’affaires, qui s’élevait Ă  plus de 1,8 million d’euros en 2023, a progressĂ© d’environ 55 %. La nouvelle carrosserie est installĂ©e sur une parcelle jouxtant l’ancien atelier. Ă€ l’extĂ©rieur, le visiteur se gare d’abord sur un parking au revĂªtement gazonnĂ©, qui laisse les eaux pluviales s’infiltrer dans le sol. Puis, en entrant Ă  l’accueil, il constate que l’entreprise obĂ©it aux critères les plus rĂ©cents de la rĂ©paration automobile.

Équipements de peinture RSE

Depuis l’élégant comptoir blanc et noir, les clients sont accueillis dans un espace moderne et vitré, offrant une vue sur l’atelier. Ce dernier est vaste, laissant de l’espace aux réparateurs pour opérer confortablement sur les véhicules. Les postes de travail sont dotés de tables élévatrices assurant ergonomie et sécurité pour les techniciens.

Carrosserie Morhet cabine de peinture

La cabine de peinture connectée Weinmann Technologies permet de surveiller et d'optimiser sa consommation énergétique. ©Carrosserie Morhet

La plus importante contribution à la protection de l’environnement dans l’atelier réside dans les installations conçues par Weinmann Technologies. Le spécialiste a installé des aires de pulvérisation, un laboratoire et une cabine de peinture économes en énergie et sûrs. Son puissant système d’aspiration centrale réduit les émissions de COV et protège la santé des salariés.

Surtout, la cabine est intelligente. Connectée, elle calcule sa consommation énergétique par cycle et s’éteint automatiquement lorsqu’elle n’est pas utilisée. Ses données permettent donc à son exploitant d’ajuster et de maîtriser ses coûts de fonctionnement.

Des gestes simples, un impact concret

Mieux, cet équipement permet d’affiner l’étude des consommations énergétiques et des émissions de CO₂ nécessaires pour réparer un sinistre en carrosserie. "Weinmann Technologies est le premier fabricant de cabines à proposer un automate donnant une empreinte carbone mensuelle. Ces données sont essentielles pour notre reporting", souligne Antoine Morhet. À terme, il espère pouvoir comparer ses performances à celles d’ateliers voisins, pour challenger ses équipes et poursuivre l’amélioration continue. "Je trouve que c’est une dynamique intéressante."

Carrosserie Morhet aire de pulvérisation

MĂªme l'aire de pulvĂ©risation, Ă©galement conçue par Weinmann Technologies, est dotĂ©e d'Ă©quipements de levage et d'un système d'aspiration optimisĂ© pour rĂ©duire la pĂ©nibilitĂ© des travaux. ©Carrosserie Morhet

Outre le dĂ©ploiement de moyens importants, l’entreprise applique des mesures simples mais efficaces. Par exemple, l’atelier emploie de prĂ©fĂ©rence des produits et consommables Ă©coconçus. De plus, les salariĂ©s sont sensibilisĂ©s Ă  la lutte contre le gaspillage. Tandis que les dirigeants suivent avec prĂ©cision l’utilisation des consommables. Un bon sens qui rapproche le garage francilien de l’époque oĂ¹ les carrossiers Ă©vitaient de gaspiller leurs ressources. Par exemple, lorsqu'ils rĂ©cupĂ©raient des journaux pour masquer les vĂ©hicules.

GrĂ¢ce Ă  ce modèle vertueux, Antoine Morhet est convaincu que la carrosserie familiale prend de la valeur. Les efforts de l’entreprise ont d’ailleurs Ă©tĂ© distinguĂ©s par plusieurs rĂ©compenses. Mais surtout, les apporteurs d’affaires n’ont pas discutĂ© ses demandes de revalorisation de taux horaire. Un signe que l’image de durabilitĂ© et de professionnalisme vĂ©hiculĂ©e par l’atelier s’inscrit parfaitement dans l’air du temps, tout en rĂ©pondant aux exigences de ses partenaires.

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