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Diagnostic des poids lourds, un marché porteur

Publié le 16 avril 2014
Par Jean-Marc Felten
5 min de lecture
Alors que le marché du diagnostic électronique des véhicules légers est dispersé entre de nombreux fabricants, avec une orientation marquée vers une baisse des prix, le marché poids lourds reste dominé par le service et moins de 10 fournisseurs.
La couverture de parc exigée par l’activité poids lourds va de l’utilitaire léger aux cars et bus, soit plus de 6 millions de véhicules.

Le fonctionnement de l’après-vente des utilitaires n’obéit pas aux mêmes règles que le VL. Les utilisateurs de poids lourds chiffrent toutes les phases d’arrêt des véhicules, surtout si l’immobilisation est due à un besoin d’entretien. Les acteurs de la réparation sont donc soumis à des besoins de rapidité et de prédiction des interventions. Avec la présence croissante de l’électronique, le diagnostic a pris dans l’entretien une place importante. Les fabricants d’appareils qui ont investi ce marché sont donc des spécialistes capables de proposer des bases de données assurant une parfaite couverture, un service de maintenance et des formations.

Spécificités du diagnostic PL

Si le nombre de marques de poids lourds est bien inférieur à celle dans l’automobile, la diversité du parc et les particularités liées aux équipements rendent le diagnostic plus complexe que pour le VL. “Nous ne disposons pas d’une méthode de diagnostic différente du VL pour le poids lourd, explique Francis Pègues, directeur de la filiale française de Texa. L’interface est même utilisable dans tous les secteurs d’activité, VL, moto, machines agricoles et PL. Ce sont les bases de données qui diffèrent, et le poids lourd requiert une valise de câbles beaucoup plus complète.” La prise OBD à 16 broches n’a été rendue obligatoire qu’à partir de 2006, avec l’entrée en vigueur de la norme Euro 4. Le parc non équipé de cet accessoire est donc encore majeur, avec un âge moyen des poids lourds supérieur à 6 ans (82 % des utilitaires ont plus de 6 ans). L’équipement d’un camion est toujours un peu spécifique. C’est un assemblage de modules qui viennent de chez les équipementiers : les essieux, le freinage, l’alimentation en air comprimé, les équipements de remorque, les transmissions, etc. Chaque fabricant va proposer son électronique et le constructeur en faire l’assemblage, souvent adapté aux besoins du client. Chaque partie dispose donc d’une gestion électronique spécifique.

L’évolution de l’équipement…

Les normes de dépollution, les assistances à la conduite et les équipements de sécurité ont entraîné un accroissement important du contenu technique des poids lourds. “C’est la grande diversité des équipements présents sur les véhicules qui pousse les réseaux des constructeurs à adopter un appareil multimarque (et multi-équipementiers), souligne Richard Vandomme, directeur marketing d’Actia Muller. De ce fait, les réseaux du véhicule industriel sont beaucoup plus perméables à l’adoption de nos équipements comparés au VL.” Le besoin en matériel rapide et convivial est très important. “L’équipement en système de diagnostic est en partie sur du renouvellement, poursuit Richard Vandomme. Les nombreux équipements pilotés des VU et Pl sont très exigeants en performances matérielles, pour répondre suffisamment rapidement.” Il n’est plus possible de laisser tourner l’appareil de diagnostic pendant plusieurs heures afin qu’il aille explorer tous les calculateurs. Les interventions en atelier sont chronométrées pour remettre le véhicule sur la route au plus vite.

… facteur de développement

Le marché s’est segmenté dans la réparation comme dans les compétences. D’un côté, les ateliers des réseaux constructeurs qui reçoivent les véhicules en garantie et pendant la durée des contrats d’entretien signés lors de l’acquisition, et les ateliers d’indépendants et des grossistes spécialisés. Ces professionnels ont de très larges compétences qui leur permettent de dépasser rapidement les informations données par l’appareil de diagnostic, en utilisant un multimètre ou l’oscilloscope. De l’autre côté, les ateliers d’entretien des flottes (transporteurs, location), des administrations et des services publics. “L’usage des appareils s’adresse à deux types de techniciens, note Richard Vandomme. Les spécialistes ont un niveau de connaissances beaucoup plus élevé que dans l’automobile. Dans les réseaux d’entretien de flottes, les réparateurs sont plus utilisateurs de l’appareil de diagnostic. Ils ont besoin d’être guidés pas à pas dans leurs recherches. C’est le diagnostic “expert”. La volonté d’Actia est d’être présent sur tous ces marchés.” Pour cela, les fabricants d’appareils agissent comme intégrateurs de données. Il faut fournir les schémas électriques et les données de contrôle de chaque composant pour les plus calés, et des méthodes pas à pas pour ceux qui font occasionnellement du diagnostic.

Le marché est porteur

La capacité à entrer dans tous les systèmes, la simplicité d’utilisation et la maintenance sont des impératifs pour les fabricants. En poids lourds, il n’y a pas de place pour les appareils “légers” et l’expérience en diagnostic est essentielle. Plus coûteux (environ 10 % de plus qu’un système automobile), l’équipement est associé à de la formation et à des plates-formes d’assistance. Les fournisseurs présents sont peu nombreux et figurent parmi les leaders du secteur. “Texa est pionnier dans le diagnostic du véhicule utilitaire, souligne Francis Pègues (Texa). Nous suivons très précisément les besoins en formation des réparateurs. Ainsi, pour l’arrivée de l’Euro 6, nouvelle norme de dépollution, et le freinage des remorques, nous venons de mettre en place deux nouveaux modules de formation.” Quant à Actia, le développement de sa solution poids lourds est passé par une collaboration avec un spécialiste espagnol, Jaltest, qui possède un savoir-faire et des bases de données sur certains éléments spécifiques du VI.

Chaque fabricant sa force

La largeur de couverture des appareils multimarques, surtout pour ce qui concerne les remorques, équipements de freinage ou aménagements spéciaux des bus et cars, leur permet une présence chez les constructeurs plus importante que dans le VL. “Actia est référencé chez plusieurs constructeurs, Renault Trucks, Scania entre autres, ce qui permet d’ouvrir les ateliers au multimarquisme, et de proposer un service complet à des flottes, indique Richard Vandomme. Avoir également dans nos gammes d’équipements les bancs de freinage, les ponts élévateurs est un atout commercial. Le garage n’a plus qu’un seul interlocuteur pour son matériel, les négociations et l’entretien.” Il faut aussi disposer d’arguments techniques et convaincre le technicien. Actia s’affranchit de la valise de câbles en intégrant à son logiciel de diagnostic une connexion par “pique fils”, où chaque véhicule et chaque équipement fait l’objet d’une explication très précise.

Texa s’est déjà projeté dans l’avenir. Non disponible en France pour le moment, une solution de diagnostic embarqué et accessible à distance depuis un centre de gestion existe en Italie. Positionné par GPS et communiquant par GPRS (puce téléphone), il permet à un responsable de flotte de gérer l’entretien de ses véhicules et peut même servir de système antivol avec une traçabilité du véhicule. L’entretien rejoint la gestion globale de la flotte. Actia, de son côté, associe à son système de diagnostic un archivage systématique des travaux réalisés. “Nous avons intégré une fonction de gestion de parc, pour améliorer le travail du gestionnaire de parc, note Richard Vandomme. Chaque véhicule est matérialisé par une fiche, qui est mise à jour à chaque intervention. Il est ainsi possible de connaître le passé du véhicule et les besoins en entretien.”

Troisième interlocuteur du domaine du poids lourd, Bosch avance un équipement diversifié sur une base commune. Le PC d’atelier DCU 130 utilise la solution de diagnostic KTS 800, mais le technicien fera les recherches ultimes avec la mesure physique du FSA 500. Les bases de données ESI Tronic sont conçues de manière similaire à celle du VL.

Comme tous les ateliers, les spécialistes du poids lourd cherchent à développer leur activité, sur un marché du poids lourd peu actif. Les utilitaires légers (5 millions de véhicules roulants en France) sont très courtisés par l’ensemble des réseaux et sont présents dans tous les systèmes de diagnostic. Les nouveautés permanentes conduisent à un besoin en équipement toujours plus important. “Le marché est porteur, défend Francis Pègues. Il y a encore des ateliers à équiper, et un renouvellement des premiers appareils qui arrive.” Les appareils récents sont beaucoup plus puissants et, bien que les ateliers privilégient l’installation du logiciel sur un PC déjà présent dans l’atelier, les fabricants préfèrent, eux, l’utilisation de leurs propres tablettes, parfaitement adaptées et toutes conçues pour affronter les conditions exigeantes de l’atelier. D’autant qu’un problème matériel se profile avec l’arrêt de la maintenance des systèmes d’exploitation XP, encore très présents dans les ateliers.
 

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FOCUS - Les chiffres du marché

Les fabricants dénombrent environ 3 000 ateliers utilisateurs de systèmes de diagnostic poids lourds. Les ventes d’appareils sont de 400 à 500 pièces annuellement, soit 10 % des ventes totales d’appareils de diagnostic.

Sur les 1 900 ateliers spécialisés dans le PL, les ateliers constructeurs sont 37 %, les indépendants 11 % et les ateliers intégrés 52 % (parcs flottes et loueurs).
Le parc de poids lourds français s’établissait en 2013 à 550 000 véhicules de plus de 5 tonnes, pour 5,8 millions de VUL ; 63 % des véhicules sont des porteurs, 37 % des tracteurs. De ce fait, on compte 400 000 remorques et semi-remorques.

Le kilométrage annuel moyen des poids lourds français est de 80 000 km, et les espacements d’entretien sont de 41 000 km. En 2006, le kilométrage était supérieur à 90 000 km avec un intervalle moyen d’entretien de 30 000 km.
(sources équipementiers, Gipa, CNPA, FFC)

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