“Les équipements asiatiques sont de moins en moins compétitifs”
Pouvez-vous nous décrire brièvement l’activité de Werther au plan global ?
Nous réalisons un chiffre d’affaires annuel de 110 millions d’euros, dont 98 % à l’export. Nous sommes spécialisés dans l’élévation ou la station de clim notamment, mais nous proposons une gamme plus étendue d’équipements de garage avec du négoce d’appareils complémentaires à nos lignes fabriquées. La fabrication maison représente toutefois 80 % de notre chiffre d’affaires. Nous réalisons, par exemple, en interne nos ponts élévateurs et 100 % de nos stations de recharge de climatisation, que notre bureau de R&D conçoit lui-même.
Werther est une marque reconnue partout dans le monde. Comment se répartissent vos ventes ?
Jusqu’à la fin des années 90, notre export s’orientait plutôt vers le “Hors Europe”, et on remarque que désormais, c’est bien sur le Vieux Continent que l’on envoie le plus de matériel. Cela pour deux raisons. D’abord, le cours de l’euro, qui se montre fort par rapport au dollar et pénalise l’achat de nos gammes au-delà des mers. La seconde raison, c’est l’arrivée de la Chine sur nos marchés. Cette concurrence a clairement segmenté le marché en deux parties distinctes, le professionnel et l’économique. Depuis dix ans, on ressent que “l’économique” prend de l’ampleur, et il nous est devenu complexe de rester compétitifs sur l’Amérique du Sud et le Sud-Est asiatique, où les clients recherchent du prix. Ce n’est pas notre politique. Nous préférons nous positionner sur la qualité, et apporter plus de services, des prestations complémentaires… C’est un moyen de nous renforcer et de nous différencier, dans un contexte économique difficile.
Comment récupérer ce marché “outre-mer”, que les Asiatiques sont parvenus à truster ?
C’est un axe stratégique pour nous. Tout d’abord, nous avons développé des gammes plus en adéquation avec les demandes de ces marchés. Et cela semble plutôt bien fonctionner. Par ailleurs, nous avons une belle carte à jouer car les fabricants chinois, s’ils restent compétitifs, le sont de moins en moins, surtout sur certaines catégories de produits, comme les ponts à ciseaux par exemple. Bref, tout ce qui est un peu plus technique. Et ce constat va s’étendre aux deux colonnes, car le prix de main-d’œuvre augmente de 20 % chaque année en Chine.
Quelle est la situation en France ?
La France est un des trois marchés les plus importants pour nous en Europe. Nous avons un peu changé notre façon de positionner EGI, notre filiale locale. Dans le passé, EGI s’est énormément développée grâce à la largeur de son offre, une offre pas forcément issue de Werther d’ailleurs… C’était une bonne stratégie pour grandir. Maintenant, compte tenu de la tournure que prend le marché, vers la professionnalisation, la qualité…, nous avons décidé de nous concentrer sur les produits Werther fabriqués maison. Le catalogue s’est ainsi beaucoup réduit, nous avons retiré les produits “bas de gamme”. L’image d’EGI était trop généraliste, il faut lui redonner une aura plus industrielle.
Grâce à cette politique, vous espérez convaincre de nouvelles cibles, les constructeurs par exemple ?
A ce jour, les matériels Werther ne sont pas homologués chez les constructeurs. Je parle ici des constructeurs allemands, qui sont les seuls à demander ce type de sésame. Mais le paradoxe, c’est que nos matériels, que nous avons parfois fournis sous d’autres marques, sont homologués ! Donc, nous aimerions que Werther soit aussi reconnu. Toutefois, ce chantier n’est pas prioritaire.
Notre urgence, en France, c’est plutôt d’étendre notre réseau de distribution. Nous sommes déjà présents dans les groupements, mais nous recherchons aussi les centres-autos, les chaînes de fast-fitters…
En termes de services, sur quoi basez-vous votre différence ?
Nous avons la chance de disposer d’un gros stock en France, qui nous permet d’être réactifs sur les commandes. Et c’est déjà un gros avantage par rapport à nos concurrents principaux. Puis nous avons une structure commerciale importante sur place avec une dizaine de commerciaux qui sillonnent le territoire. Ce ne sont pas des agents, mais de véritables employés de la société.
Quelle est votre opinion sur les multiples salons dans le monde ?
Certains sont fondamentaux pour nous. En ce qui concerne l’équipement de garage, les plus importants salons sont Automechanika à Francfort et Autopromotec à Bologne. Ils drainent une clientèle internationale et nous permettent d’accueillir nos clients dans un cadre moins formel. Nous serons également présents sur le salon Equip Auto au mois d’octobre, car c’est un événement porteur, notamment pour les pays d’Afrique du Nord.
Que vous inspire la restructuration de votre concurrent Fog Automotive en France ?
Je trouve dommage qu’une société avec un tel historique et un tel nom se retrouve aujourd’hui en délicatesse. D’autant plus que les produits et leur qualité ne sont pas en cause. Fog Automotive a toujours été pour nous un concurrent respectable, sur lequel nous nous sommes basés pour travailler sur le marché français.
A-t-il été question, pour Werther, d’investir dans Fog ?
Disons que cela aurait pu être intéressant de disposer d’une marque comme Fog pour se développer encore plus en France. Mais, pour l’heure, nous sommes concentrés sur d’autres priorités, d’autres pays, où nous rencontrons plus de difficultés qu’en France. Il nous paraît aujourd’hui plus stratégique de déployer notre énergie en Espagne, par exemple. Mais aussi en Russie, un marché en pleine expansion, ou encore au Brésil.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Il est encore difficile de savoir si ce que l’on appelle “crise” n’est pas finalement un nouvel ordre économique mondial, avec lequel il va falloir composer dans les années à venir. Il y aura donc fatalement une sélection, une concentration des offres sur les marchés. Certaines structures ont déjà disparu, et cela devrait continuer si la conjoncture ne s’améliore pas.