S'abonner
Distribution

Evelyne Barberot (GPA) : travail, famille, pièces d'occasion !

Publié le 22 février 2022
Par Romain Baly
4 min de lecture
Sans chercher la lumière, Evelyne Barberot a pourtant été de toutes les batailles depuis 35 ans pour valoriser le métier de recycleur. Chez GPA, D2Alliance ou TF, avec sa famille comme avec ses confrères, la dirigeante est toujours restée fidèle à ses principes.
Au milieu des années 80, si tôt ses études terminées, Evelyne Barberot a rejoint GPA, entreprise familiale fondée par ses parents en 1962.
Au milieu des années 80, si tôt ses études terminées, Evelyne Barberot a rejoint GPA, entreprise familiale fondée par ses parents en 1962.

Pas la peine d'essayer de la retrouver dans les magazines spécialisés, ni même de la chercher au premier rang des rassemblements du monde de la rechange. Evelyne Barberot s'est toujours tenue loin de la lumière. Sa parole est rare. Quand elle consent à parler, c'est avant tout pour défendre les siens et porter un message collectif. Alors imaginez lui proposer de converser pendant une heure sur sa propre histoire… Ce portrait, elle s'y est ainsi d'abord refusé poliment et il a fallu un certain nombre de relances pour la convaincre.

"Je suis une femme discrète. Ce n'est pas évident de parler de moi", confirme-t-elle. Le challenge était difficile mais il méritait d'être relevé tant la codirigeante de GPA, l'un des plus illustres recycleurs de l'Hexagone, a de choses à raconter. Elle qui représentante un métier passé en quelques années de "crasseux tendance magouilleur" à "bons pros dans l’ère du temps".

Et son témoignage est d’autant plus intéressant qu'elle n’est pas restée simple spectatrice de cette mutation, elle y a largement contribué en défendant sa corporation et tous ses membres. L'histoire d'Evelyne Barberot tient d'abord dans un duo indissociable : famille et passion. La récupération est une très vieille spécialité chez les Renaud.

Récupérer, une tradition familiale

Au milieu du XXe siècle, à une époque où rien ne se jetait, les grands-parents d'Evelyne Barberot, déjà, en avaient fait une spécialité. S'inscrivant dans cette lignée, ses parents, Leone et Edward, fondent en 1962 à Livron-sur-Drôme (26) les Etablissements Renaud dont l'activité principale consiste à récupérer les déchets d’atelier (huiles, pneus, chambres à air, etc.).

Une dizaine d'années plus tard, nouveau développement, avec l'entrée chez GPA du premier véhicule accidenté dont les propriétaires souhaitaient récupérer les pièces. Rapidement, l'activité se professionnalise et le récupérateur devient également recycleur. C'est dans cet environnement que grandie la jeune drômoise. Sans en prendre ombrage, bien au contraire.

L'entreprise familiale n'a jamais été un poids pour moi. J'ai compris très tôt que c'était une vraie passion pour mes parents. Avec ce métier, ils nous ont transmis des valeurs fondamentales comme le travail, la famille, l'importance des autres aussi car le recycleur a un rôle social très important en permettant à des gens de rouler à petit prix.

A l'heure de prendre son envol, elle opte pour des études de commerce et obtient en 1984 un BTS d’action commerciale. Dans la foulée, elle intègre GPA comme une évidence. "Mes parents m'attendaient à la sortie de l'école…", image-t-elle joliment. Elle rejoint ainsi ses deux frères ainés et débute son aventure au comptoir.

Fédérer pour exister

Un poste "à la dur" où il faut faire face au regard, parfois défiant, que posent quelques hommes sur une femme chargée de les servir et de les conseiller. "Il a fallu gagner en légitimité et en crédibilité", se souvient-elle sans amertume. Dans ce cheminement, elle peut compter sur un précieux atout transmis, dit-elle, par son paternel. La fibre du commerce semble en effet figurer dans l'ADN familiale. Vendre au comptoir, c'est bien, mais aller démarcher tous les professionnels du coin, c'est mieux.

Et puis, comme de la pièce d'occasion à la pièce neuve, il n'y a qu'un pas, la voilà qui s'y engouffre, tentant de diversifier le portefeuille de GPA. Tandis que son mari a rejoint entretemps l'entreprise, le couple bataille pour lutter contre l'image de "casseur" et les préjugés qu'on colle alors à leur métier. Il en va de leur crédibilité mais aussi de leur pérennité, des fabricants de pièces neuves allant même jusqu'à refuser de travailler avec eux !

En réponse, la dirigeante s'engage alors dans un autre défi. Avec ses confrères René Sellier (SEVP Auto) et Didier Richaud (Pièces Auto Coram), elle fonde Alliance Auto puis, avec le soutien de Thierry Bouvier, créée D2Alliance. Grâce à leur centrale de référencement, en pesant davantage, en fédérant large, ces chefs d'entreprise accèdent enfin à la pièce neuve. Pari gagné. En 2003, D2Alliance devient même la centrale de Caréco, groupement de démolisseurs qui vient alors de voir le jour.

Le tournant des années 2010

Sûres de leurs forces, Evelyne Barberot et sa famille continuent de développer GPA. Informatisation de l'activité, sécurisation des approvisionnements, signature de conventions avec les principales compagnies d'assurance, obtention du label Qualicert… rien n'est laissé au hasard.

Toute la famille a toujours été unanime pour réinvestir, pour aller de l'avant, pour permettre à GPA de se professionnaliser et de prendre une longueur d'avancedétaille-t-elle.

Prendre de l'avance et être prêt le jour où… où la pièce d'occasion prendra réellement son envol. Il faudra attendre les années 2010 pour que celle-ci change réellement de paradigme. A cette époque, D2Alliance entre comme actionnaire chez Temot France adhérent d’Autolia, signe que le monde le rechange s'ouvre à ces nouveaux acteurs. Et alors qu'Evelyne Barberot prend la présidence de TF, c'est au tour de la société de prendre conscience des enjeux de développement durable. Récupération, recyclage, tous ces mots prennent un autre sens.

En 2017, c'est au tour de l'arsenal législatif d'entériner cette mutation avec la loi sur la pièce de réemploi ou pièce issue de l’économie circulaire (Piec). Dans le même temps, les casses automobiles deviennent peu à peu des centres VHU (pour véhicules hors d'usage). "L'histoire est finalement assez curieuse. Nous sommes passés d'une image totalement dégradée dans les années 60 à une autre très respectée aujourd'hui… En dix ans, notre métier a été propulsé dans une nouvelle ère, la pièce fait désormais parti-prenante de notre économie", résume la dirigeante.

La troisième génération est en place

Tout ceci n'aurait sans doute jamais été possible sans l'engagement d'Evelyne Barberot et de quelques autres quand bien même refuse-t-elle les lauriers. "J'ai beaucoup œuvré pour valoriser ce métier, pour qu'on soit reconnu, mais c'était une évidence pour moi." Que ce soit avec GPA, D2Alliance ou TF, elle a toujours su prendre les rênes, presque malgré elle, forte de ses convictions et prête à emmener tout le monde avec elle. "Ce que j'aime, c'est fédérer. C'est pour cela que je me retrouve souvent aux avant-postes", exprime-t-elle, en venant presque à s'excuser.

Au-delà de la discrétion, on ressent tout de même aujourd'hui la satisfaction du devoir accompli. Son entreprise a su traverser les époques et demeurer un leader en puissance. En une trentaine d'années, GPA est passé de 30 à 200 salariés, collecte et dépollue annuellement plus de 20 000 véhicules, et s'appuie depuis 2019 sur une usine de 17 000 m² de surfaces dédiée au démontage, au stockage et à l'expédition des pièces d’occasion. La deuxième génération est désormais épaulée par deux membres de la troisième qui assurent ainsi à toute la famille la pérennité de cette œuvre collective.

"C'était une étape fondamentale pour notre avenir de les intégrer, souligne Evelyne Barberot. GPA a encore beaucoup de challenges à relever mais l'entreprise est prête, la relève est assurée et nous pouvons nous appuyer sur des équipes de grande qualité". A croire qu'à presque 60 ans, GPA a encore tout à construire sur un marché somme toute naissant. De quoi ravir cette battante.

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

cross-circle