EXCLU // Pourquoi le groupe Laurent a vendu Exadis ?
A l'occasion de la visite de la plateforme parisienne du réseau, repensée et modernisée en début d'année, le directeur général d'Exadis, Jean-Pierre Bellec, a accepté de répondre à quelques questions relatives à la vente de la société. Une opération officialisée par communiqué de presse le 17 septembre dernier et encore soumise à l'approbation de l'autorité de la concurrence. Si cette annonce a fait l'effet d'une bombe dans la profession, eu égard surtout à son étonnant duo de repreneurs, la situation du groupe Laurent était connue de tous depuis maintenant de longs mois.
Le placement en redressement judiciaire début octobre de Laurent Père et Fils est venu confirmer la longue descente aux enfers d'un des très grands noms de la distribution tricolore. Pour le dirigeant, l'épilogue de cette histoire semblait acté depuis au moins six mois : "Dès le début du printemps, le groupe avait compris qu'il n'y arriverait pas". Et ce dernier d'étayer les causes de cet échec. "Pour continuer à exister, le groupe Laurent se devait d'investir. Or, ses partenaires bancaires historiques n'ont pas accepté de l'accompagner dans sa croissance, ce qui l'a contraint à financer tous les projets sur ses fonds propres."
Retrouver la confiance des fournisseurs
Une stratégie courageuse mais risquée et qui s'est finalement avérée vaine. "Le positionnement stratégique de Laurent Automobiles a été complètement revu et, en parallèle, le renforcement d'Exadis s'est poursuivi avec l'ouverture d'une plateforme supplémentaire à Bordeaux et la modernisation des deux principaux entrepôts. Le problème est que cette stratégie n'a pas porté ses fruits assez rapidement…", ajoute Jean-Pierre Bellec. Cet échec est d'autant plus dommageable que le groupe Laurent n'était pas endetté. Nul doute que s'il l'avait été, les banques auraient probablement accepté de l'accompagner, ayant un intérêt direct à le faire.
Aujourd'hui, la reprise d'Exadis par Renault et Mobivia provoque chez ce dernier un sentiment ambivalent. "D'un côté, il y a de la tristesse car Laurent est un groupe familial. Benjamin et Vincent connaissent tous les salariés. Et puis, chez Exadis, beaucoup sont des ex-Laurent. Pour eux voir des anciens collègues dans la tourmente est difficile à vivre. Dans le même temps, nous sommes soulagés par cette reprise. Nous allons pouvoir reprendre notre marche en avant en rentrant du stock, en retrouvant la confiance de nos fournisseurs et en attaquant la dernière phase de notre développement".
"Le projet de Renault et Mobivia n'est pas de s'acheter des plateformes exclusives !"
Face aux interrogations suscitées par l'attelage Renault-Mobivia (détenteur à parts égales de 44,25 % chacun d'Exadis, les 11,5 % restants demeurant entre les mains de Ciscar), le directeur général rappelle que la marque au losange accompagne Exadis depuis fin 2016 alors que le groupe nordiste est l'un des premiers clients du réseau avec ses enseignes Midas et Norauto. Quant à l'objectif de ses nouveaux propriétaires, Jean-Pierre Bellec l'affirme : "Le projet de Renault et Mobivia n'est pas de s'acheter des plateformes exclusives pour leur réseau ! Le projet est davantage de donner à Exadis les moyens de ses ambitions tout en servant leurs intérêts".
A court terme, le premier objectif de Jean-Pierre Bellec sera de compenser la perte des clients Laurent Automobiles (premier client jusqu'à fin 2017 avec 22 % de son CA et aujourd'hui encore dans le top 3) tout en préservant un maximum les flux avec ses repreneurs. A moyen terme, l'ambition sera d'investir dans un nouveau système informatique, plus perfectionné et commun à tout le réseau. Un sujet qui n'a rien d'anodin et qui devrait animer au moins les deux prochains exercices. "Tout est réuni pour qu'on reprenne notre marche en avant", conclut le dirigeant.