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Distribution

Lizarte : voyage au cœur de la matière

Publié le 22 octobre 2015
Par Hervé Daigueperce
4 min de lecture
Spécialiste de la pièce de rechange refabriquée, le groupe espagnol Lizarte ne compte pas moins de six familles de produits et 40 ans d’âge. Visite.
Spécialiste de la pièce de rechange refabriquée, le groupe espagnol Lizarte ne compte pas moins de six familles de produits et 40 ans d’âge. Visite.

Lizarte est bien connu en France, un territoire d’exception pour la marque, qui a toujours entretenu de solides relations avec la distribution indépendante. Son récent référencement chez Agra, Autolia et bien sûr Temot International en est la plus récente illustration. Avec 4 500 références, le groupe apporte ainsi bien plus qu’une réponse aux besoins des automobilistes en mal de réparation ou de remplacements d’organes souvent chers à l’état neuf, un état que ne requiert pas forcément un véhicule déjà hors garantie. L’organisation industrielle mise en place et certifiée ISO TS (norme définissant les exigences de système de qualité pour la conception et la production des produits du secteur automobile) confère à l’ensemble de la production un gage de qualité, renforcé par une garantie deux ans délivrée pour toutes les pièces. On notera d’ailleurs que les clients participent à tous les échelons de la filière automobile, en commençant par les grossistes en pièces détachées jusqu’aux équipementiers et aux constructeurs. De quoi fermer le bec à ceux que la refabrication gêne aux entournures, surtout lorsqu’il s’agit d’organes Diesel, très concurrencés en France.

De la valeur de la vieille matière

Dans le temps, un temps qui n’était pas si loin, beaucoup de refabricants achetaient de la vieille matière au kilo, triaient et perdaient beaucoup de temps et d’énergie à séparer le bon grain de l’ivraie. Chez Lizarte qui a abandonné, cette fois depuis longtemps, l’achat au poids, l’approvisionnement constitue l’une des parts prépondérante de l’activité. Les vieilles matières proviennent des garages et des démolisseurs en lots de qualité, plus chers, certes, mais plus propices à une production industrielle focalisée sur la notion de déchets (1). Lorsque, pour une crémaillère de direction, l’opérateur doit en prendre 25 pour en sortir 20 en bout de chaîne, après ce type de sélection, inutile de dire combien il en aurait fallu sans processus d’achat régulé et géré en amont par Lizarte. Par ailleurs, il va sans dire que, même ainsi, de la perte survient après démontage et après nettoyage, tandis que le sort réserve aussi quelques surprises, les pièces présentant un pourcentage totalement variable d’éléments à changer ou à réparer. Ce qui ne manquera pas d’étonner aussi, c’est la faculté des professionnels de l’entreprise d’identifier immédiatement la référence de crémaillère ou de colonne de direction qu’ils reçoivent, ou de pompe de direction électrique. Pourtant, parmi les 75 salariés, on compte beaucoup de jeunes. Mais le turn-over est quasiment nul, tant on fait attention à maintenir les savoir-faire dans la maison. Car si les machines jouent un rôle important (notamment dans le Diesel, secteur pour lequel 7 bancs ont été acquis en quelques années) (2), le travail manuel s’avère prépondérant et nécessite de solides compétences, transmises entre les opérateurs ou acquises sur formation pour les nouvelles technologies. Cela amène à un autre commentaire. Compte tenu des charges sociales et des coûts de production, pour certaines pièces mécaniques, il peut paraître intéressant pour quelques professionnels de préférer les pièces neuves venant de Chine, plutôt que les pièces réparées ou refabriquées. Une vision qui achoppe au premier problème laissant l’automobiliste au bord de la route ou… dans le fossé. Lizarte a choisi de poursuivre la reconstruction de pièces mécaniques comme les crémaillères mécaniques (et assistées) tout en développant ses prestations sur l’électrique et l’électronique en crémaillère, colonne de direction, pompes (3) sans compter l’activité Diesel ou les calculateurs moteur.

Un process très surveillé

Venus principalement de France, d’Allemagne et de Grande-Bretagne, les organes à refabriquer sont triés par marque de voiture par les techniciens dans le dépôt de réception des fournisseurs et des clients (le premier ou deuxième en Europe actuellement). Précisons un élément important, beaucoup de pièces arrivent pour être réparées et renvoyées le jour même au client, ceci explique les deux liens de production, l’une en série (10, 20, 30 pièces), l’autre à l’unité.

Si 1 500 crémaillères sont traitées par mois, la maison reçoit, dans l’année, une dizaine de crémaillères de Ferrari et de Lamborghini, par exemple, qui se travaillent à l’unité ! Lorsque les pièces sont identifiées et triées, - quelques-unes résistent tout de même à l’identification, ce qui crée un challenge permanent car Lizarte crée une référence par jour – la plupart d’entre elles partent au démontage (4) puis au nettoyage (5) quand d’autres sont éjectées de la chaîne parce que non conformes (elles sont, alors, remises aux recycleurs d’acier, etc.). Tous les éléments sont stockés par catégorie. Quels que soient les organes, toutes les pièces d’usure sont systématiquement remplacées par des neuves, même si elles sont encore valables. Garantie oblige. Lorsque les crémaillères nettoyées sont prêtes, elles sont rectifiées (6) puis contrôlées et vient le moment du remontage. Le procédé demeure le même pour tous les produits, pompes hydrauliques, électriques, électroniques, crémaillères hydrauliques jusqu’à électroniques, ou pour les autres familles, les compresseurs de climatisation et autres pièces Diesel. Pour revenir sur les crémaillères, Thomas Llorca, responsable commercial pour la France, précise un point important : “Nos techniciens préfèrent toujours réutiliser les éléments d’origine “revus et corrigés”” lors du remontage de crémaillères, plutôt que d’ajouter des pièces neuves qui pourraient ne pas être totalement raccord. Cela demande plus de temps, mais procure à l’ensemble plus de sécurité. “Ceci ne vaut pas pour les pièces d’usure, toujours neuves”. Une batterie de tests prolonge chaque étape, mesurant qui le débit, qui le bruit, qui les fuites, jusqu’au contrôle final, (9), etc. Pour cela, Lizarte a fait faire ses machines afin d’upgrader la nature des tests. Pour les pompes de direction, les opérateurs trompent la pièce en lui faisant croire qu’elle dans la voiture, afin d’apporter la réponse étudiée. Quant aux calculateurs, aux moteurs aux composants électroniques, ils sont restaurés, réparés ou changés dans des locaux spécifiques qui ne cessent de s’agrandir, puisque l’électronique gagne tous les véhicules. Et pour parler marché, chez Lizarte, l’électronique et les compresseurs de climatisation ont le vent en poupe (+50 % pour ces derniers) et le Diesel aussi… en France.

Pleins feux sur le Diesel

Injecteur Common rail, injecteur pompe Bosch, pompe Common rail ou pompe injection Bosch VO, autant de produits qui ont nécessité de forts investissements au groupe mais qui sont particulièrement porteurs aujourd’hui. Lizarte intervient sur les common rail Bosch, Siemens ou Delphi de dernière génération, ce qui exige également du stock et de l’approvisionnement matière important. Famille de produits particulièrement technologiques, le Diesel semble faire pendant aux sphères que fabrique Lizarte, des sphères neuves bien sûr (10) puisqu’on ne peut pas les ouvrir sans les endommager. Une production simple mais l’entreprise espagnole est la dernière (avec un autre acteur) à en fabriquer en Europe, ce qui revient quasiment à une activité de service, mais donne un éclairage particulier sur cette entreprise familiale qui poursuit d’un côté un choix du fondateur, tout en investissant dans les plus récentes interventions. Un esprit qui ressort des échanges avec les opérateurs, fiers de leur travail, et plutôt contents de participer à une démarche environnementale en plus d’être économique. A voir sur Equip Auto. (11)

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