Ludivine Gloria, une carrière construite brique après brique
Avouons-le tout de go, cet article ne sera pas assez long pour évoquer toute la carrière de Ludivine Gloria ! C'est que la jeune quadragénaire a vécu bien des expériences depuis ses débuts professionnels, toutes reliées par ce fil invisible dénommé "passion". Car s'il y a bien un trait de caractère qui émerge de son parcours tout autant que de son propos, c'est bien celui-là.
Pendant son enfance, la jeune Nordiste se rêvait réalisatrice, avec l'idée d'imaginer, créer et raconter des histoires. Bac en poche, passion n'étant pas forcément vocation, elle se tourne alors vers la voie du commerce. Fan de la série Buffy contre les vampires qu'elle dévore en version originale, elle développe très tôt des facilités pour l'anglais et ambitionne donc de faire une carrière à l'international. En troisième année d'école de commerce, elle doit faire un stage d'une année à l'étranger.
Les États-Unis la tentent bien mais, après avoir côtoyé de près le mauvais côté de la culture de l'oncle Sam, elle opte pour l'Allemagne, pays qui l'attire et dont elle maîtrise aussi la langue. Ironie de l'histoire, la tricolore passe le Rhin pour évoluer chez… Michelin ! L'aventure Bibendum ne durera que quelques mois, mais marquera longtemps la jeune femme. "J'ai été véritablement « picousée » par Michelin, confirme-t-elle. C'était ma première expérience professionnelle et je n'en garde que de bons souvenirs. C'est aussi grâce à elle que j'ai appris à aimer l'univers technique."
La suite s'écrira chez Metabo, le spécialiste de l'outillage électroportatif, en tant que chargée de communication puis cheffe de produits. L'expérience est enrichissante, mais Ludivine Gloria entend renouer avec l'automobile. En 2008, elle intègre les équipes de Midas. Cheffe de marché freinage/batterie puis category manager, elle découvre une autre facette de son métier. "Quand vous êtes dans un réseau de franchisés, vous ne pouvez rien imposer. Il faut être pertinent dans l'argumentaire pour convaincre les adhérents du bien-fondé de telle ou telle initiative."
Trois ans plus tard, après avoir refusé un premier appel du pied, elle rejoint Oscaro. Nous sommes alors en 2011 et la plateforme jouit encore d'une réputation de poil à gratter. Avec son approche disruptive de la rechange, Oscaro fait grincer des dents une concurrence qui l'accuse de déréguler le marché en cassant les prix. Ludivine Gloria y voit quant à elle l'opportunité de nourrir une appétence pour le business digital et de construire un vrai projet. Sa mission est ainsi de structurer le marketing.
C'était hyper captivant. Tout était à mettre en place. Oscaro était encore une petite société. J'ai aussi beaucoup adoré son esprit entrepreneurial. Pierre-Noël Luiggi [fondateur d'Oscaro, nldr] nous laissait tester beaucoup de chosesse souvient-elle.
La vie n'est pas toujours un long fleuve tranquille
Pendant sept ans et demi, elle vit de l'intérieur l'émergence du pionnier de la pièce détachée sur le web. Alors que la société se développe, que son image se polisse et que sa place se confirme, Ludivine Gloria prend du galon. Elle finira ainsi par gérer l'ensemble du marketing d'Oscaro, avec sept chefs de marché sous sa responsabilité et un champ de compétences couvrant à la fois la France, la Belgique et l'Espagne.
L'histoire avec Oscaro se terminera finalement en eau de boudin. Très attachée à son président et à son bras droit (et épouse), Véronique Campbell, elle ne trouve plus son équilibre une fois cette dernière partie. La "mort dans l'âme", elle quitte son poste à l'été 2018. "C'était difficile, mais ça répondait à un besoin", dit-elle.
Honnête, elle consent également avoir sans doute manqué de lucidité et de recul dans sa prise de décision. "L'après" s'avère ainsi compliqué. Entre un projet dans une entreprise mal ou trop vendue stoppé au bout de trois semaines (Vulco), une expérience de quatre mois dans la filiale tricolore d'une start-up anglaise (Carwow) avant que celle-ci ne ferme ses portes, et une autre d'un peu moins d'un an dans un univers du recrutement qui ne lui correspondait pas (FMG), Ludivine Gloria admet que sa carrière "n'a pas toujours été un long fleuve tranquille".
Le coup de fil d'une vieille connaissance
Fin 2018, elle intègre la jeune pousse Nestor (groupe Elior), spécialisée dans le milieu culinaire, une autre passion. La société fait de la croissance mais peu de marges, d'où une situation pas tout à fait saine, mais la dynamique "marketeuse" y croit. Elle contribue grandement à une refonte complète de la marque et de sa stratégie, réalisant beaucoup de choses avec peu de moyens. Une mission "très intéressante, très intense, mais aussi très prenante. J'y passais tous mes week-ends et mes vacances, alors que ce n'était même pas ma boîte…"
C'est dans cet état d'esprit qu'à l'été 2021, elle reçoit un coup de téléphone d'une ancienne connaissance. Le charismatique Roland Mensa, directeur européen du marketing de ZF Group, connu du temps d'Oscaro, la contacte. La proposition est alléchante, d'autant que Ludivine Gloria, si elle n'en faisait pas une obsession, est attirée par un retour dans un monde de l'automobile où elle s'est toujours épanouie.
Le bagage du passé et des choix erronés lui font dire qu'elle "est prête". "Je savais que j'avais plus de maturité et plus de patience pour prendre ce nouveau virage", ajoute-t-elle. En août 2021, la voilà nommée à la tête du marketing aftermarket France et Benelux à destination des distributeurs de pièces VL, PL, bus et cars et des réseaux Service Partners VL et PL, pour les marques Lemförder, Sachs et TRW. Un champ d'action complété par un volet digital qu'elle maîtrise. Dès son premier rendez-vous avec un fournisseur, la magie opère.
J'ai compris dès ce moment que j'avais fait le bon choix. Tout de suite, je me suis sentie à ma place, les échanges étaient fluides, on se comprenait facilement avec mon interlocuteur…
Un accomplissement personnel
Avec ZF, Ludivine Gloria renoue aussi avec cette dimension internationale qui lui était si chère plus jeune. Elle partage ainsi son enthousiasme à dialoguer avec ses collègues de telle ou telle nationalité, jonglant avec plaisir entre plusieurs langues. Sans doute trouve-t-elle aussi une certaine satisfaction à pouvoir revendiquer, à tout juste 40 ans, un bagage aussi complet – manufacturier, réseau de distribution, spécialiste digital, équipementier "traditionnel".
Ludivine Gloria a déjà réalisé un long chemin, mais elle sait aussi que la suite est encore longue et sera riche en nouvelles missions. En attendant, elle a aussi trouvé une autre forme d'accomplissement en montant sa propre société. Dans la pièce détachée, toujours, mais loin de l'automobile. Passionnée de Lego, elle a créé avec son mari Julien un site internet qui commercialise des packs permettant de reproduire une photo en tableau mosaïque créé à partir de petites briques.
Une "bouffée d'air entrepreneuriale", comme elle le résume. Passionnée et passionnante, Ludivine Gloria voudrait à l'avenir partager son savoir-faire en donnant des cours dans une école de commerce. "C'est toujours mieux d'aimer ce qu'on fait, et moi j'ai aimé tous mes jobs", conclut-elle.