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De la prime à la conversion à la déprime des centres VHU

Publié le 18 janvier 2019
Par Mohamed Aredjal
2 min de lecture
Les démolisseurs, victimes du succès de la prime à la conversion ? Alors que les VHU s’entassent dans les centres, ceux-ci peinent à rentabiliser leurs investissements et à trouver des débouchés commerciaux à leur production.
La prime à la conversion crée un dangereux déséquilibre de l’activité dans la filière VHU.

 

Le coup est dur pour les centres de recyclage automobile. Alors que la prime à la conversion a provoqué un afflux massif de véhicules dans leurs sites, ces derniers sont confrontés à une baisse sensible du prix des pièces de réemploi. La trop grande quantité de pièces récupérées sur les voitures mises au rebut a pour effet de faire baisser mécaniquement les prix, selon la loi de l’offre et de la demande.

Exemple : le prix d’un capot de Peugeot 206, fixé habituellement autour des 100 euros, a été divisé par deux. Idem avec l’un des best-sellers des centres de démolition, l’optique de phare de la Clio, qui vaut désormais 30 à 40 euros en moyenne contre le double il y a encore quelques mois.

Difficile dans ces conditions d’espérer un retour sur investissement pour des professionnels qui ont pourtant dû consentir à des investissements pour absorber la vague de véhicules générée par la prime à la conversion. Pour le CNPA, nombreux sont ceux qui n’ont d’ailleurs pas eu la possibilité de se structurer pour faire face à cet afflux, notamment faute de trésorerie. "On nous dit au départ que la prime ne durera que quelques mois, puis on apprend au JT qu’elle sera finalement prolongée, puis même étendue dans son application. Dans ces conditions, comment avoir assez de visibilité pour investir sur la durée ?", s’interroge un professionnel dont le volume de VHU est passé de 150 à 400 unités par mois depuis février 2018.

Un taux de réutilisation et de valorisation des VHU à la baisse

Dans ce contexte, une grande partie des pièces qui, en temps normal auraient dû être récupérées, prennent ainsi la direction du broyage faute de demandes suffisantes. Puisque l’autre conséquence logique est bien la raréfaction des clients pour ces pièces de réemploi puisque ce sont, très souvent, les mêmes automobilistes propriétaires des véhicules mis au rebut… En outre, la qualité des pièces récupérées sur ces VHU n’est pas toujours à la hauteur des exigences du marché.

"La problématique tient plus de la qualité que de la quantité. Une prime à la conversion, c’est une voiture qui génère peu de pièces détachées car trop ancienne", confirme Luc Fournier, directeur de Préférence Recyclage (Alliance Automotive). Pour preuve : en un an, l’âge des VHU a vieilli en moyenne d’une année supplémentaire pour atteindre 19 ans. Une évolution significative au regard de la très courte période observée, sachant que, selon Loïc Bey‑Rozet du réseau Indra, les PRE sont souvent issues de voitures fournies par les assureurs et âgées d’environ 10 ans. Sur ces véhicules, 17 pièces sont récupérées en moyenne contre 7 sur un VHU issu de la prime à la conversion.

Enfin, dernière difficulté, un prix à la tonne de la ferraille fluctuant. À l’époque de la prime à la conversion mise en place sous Nicolas Sarkozy, ce dernier approchait les 250 euros. Aujourd’hui, alors que la Chine s’est décidée à exporter de l’acier et dans un contexte politique agité, il est tombé à 100-140 euros selon les jours. Insuffisant, selon les professionnels, pour amortir à la fois le prix de rachat du VHU, son transport et son coût de dépollution, soit environ 250 euros…

Alice Thuot

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