Accès aux données techniques : la justice allemande sanctionne BMW
Le 27 juin dernier, le tribunal régional de Munich a rendu un jugement très attendu dans le différend opposant BMW à l’ADPA (Association européenne des éditeurs de données techniques) et la GVA (Fédération allemande des distributeurs de pièces). Au cœur de l’affaire : la politique du constructeur visant à encadrer strictement l’accès et l’usage de l’information technique nécessaire à l’entretien et à la réparation de ses véhicules.
Les deux associations reprochaient notamment à BMW une forte augmentation des coûts d'accès à ces données et des limitations sur les informations liées au numéro de série (VIN). Elles pointaient aussi du doigt les restrictions sur l'utilisation que les éditeurs peuvent faire de leurs propres produits. Pour l’ADPA et la GVA, de telles pratiques nuisent à la libre concurrence et entravent le travail des professionnels indépendants.
Le tribunal de Munich valide trois plaintes sur quatre
La décision du tribunal est sans équivoque sur plusieurs points essentiels. D’une part, BMW n’est plus autorisé à facturer l’accès aux informations liées au VIN sur la base de requêtes unitaires. D’autre part, la marque ne peut revendiquer de manière uniforme des droits sur les produits développés par les éditeurs.
Enfin, le juge a estimé que la tarification appliquée par le groupe automobile pour l’accès aux données techniques est contraire au droit européen de l’homologation.
Cette victoire juridique ouvre notamment la possibilité, pour les membres d’ADPA, de réclamer le remboursement des frais versés indûment. Elle constitue également un précédent fort en matière de régulation des relations entre constructeurs et acteurs indépendants de l’après-vente.
Un signal fort pour la filière indépendante
"Une fois encore, nous avons dû saisir la justice pour faire reconnaître notre droit d’accès équitable à l’information technique. Le tribunal a rappelé que les constructeurs ne peuvent entraver le travail du marché indépendant", a commenté Pierre Thibaudat, directeur général d’ADPA. Ce dernier appelle désormais à "construire ensemble des relations commerciales durables et équilibrées".
Du côté de la GVA, Thomas Vollmar salue une décision qui dépasse les intérêts des seuls requérants : "Cette victoire claire est bénéfique pour tout le marché indépendant, mais aussi pour les consommateurs, qui pourront continuer à choisir des solutions innovantes et abordables pour l’entretien de leur véhicule".
Pour Marcus Sacré, avocat au cabinet Osborne Clarke qui représentait les deux organisations professionnelles, ce jugement constitue une confirmation bienvenue de l’esprit du droit européen. "La législation, comme l’intention des législateurs européens, a toujours été claire : les constructeurs ne peuvent pas restreindre unilatéralement la concurrence."
Si BMW dispose encore d’un droit d’appel, cette décision constitue un tournant dans les rapports entre constructeurs et acteurs indépendants de l’après-vente. Elle pourrait inciter d’autres opérateurs à revoir leurs pratiques contractuelles, dans un contexte où l’accès aux données techniques devient un enjeu stratégique majeur pour la filière des services à l’automobile.