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Distribution

Asiatiques, objets de tous les fantasmes

Publié le 18 octobre 2012
Par Frédéric Richard
6 min de lecture
En raison de la progression du parc de véhicules asiatiques en circulation, le marché de la pièce détachée spécifique voit aujourd’hui ses acteurs se multiplier, et venir chasser sur les terres des réseaux constructeurs et du leader indépendant, Nippon Pièces Services (NPS).
Blue Print offre au marché de la rechange une gamme complète de freinage pour les véhicules européens et asiatiques.
Blue Print offre au marché de la rechange une gamme complète de freinage pour les véhicules européens et asiatiques.

Peu de données existent concernant le marché spécifique de l’après-vente pour les véhicules asiatiques. On sait que le parc de japonaises et coréennes, en France, représente aujourd’hui environ 12 à 13 % du parc global. On estime le marché global de la pièce détachée pour voitures asiatiques à environ 50 millions d’euros en France. Un secteur particulièrement complexe à gérer pour la distribution, puisqu’il faut, à peu de chose près, le même nombre de références pour couvrir ce secteur qu’il n’en faut pour l’ensemble du parc européen ! Un constat qui tend à justifier le besoin de spécialisation pour répondre convenablement aux attentes des clients.

En France, historiquement, ce marché spécifique était traité par les réseaux constructeurs et par quelques acteurs spécialisés en rechange indépendante, principalement Nipparts et Nippon Pièces Services (NPS), proposant une gamme large et profonde. Les grands équipementiers, disposaient, pour leur part, d’une offre dans leur cœur de métier, sans réellement travailler cette famille de façon spécifique.

Mais, aujourd’hui, le contexte économique et la croissance du parc asiatique excitent les convoitises de nouveaux entrants. Qu’il s’agisse d’une réelle offre structurée ou d’une simple manipulation marketing pour mettre en avant une gamme spécifique, tous ont leur approche pour grignoter des parts sur le leader, NPS.

Contexte économique délicat et spécifique

De plus en plus de modèles, de plus en plus complexes à identifier, aussi bien chez le distributeur que chez le réparateur, telle est la réalité du marché. Par ailleurs, avec la crise, les distributeurs ont baissé leurs stocks pour réduire l’immobilisation financière. Du coup, la clé pour réussir sur ces marchés se trouve dans la disponibilité, la capacité de réaction face aux demandes, bref, l’adaptabilité. On peut faire confiance aux trois nouveaux arrivants sur le secteur, Blue Print (bilstein group), Jakoparts (Herth+Buss) et Meyle Asia Line (Wulf Gaertner Autoparts) pour apporter des réponses et se livrer, entre eux et sur le marché, une bataille acharnée sur fond d’identification, d’expertise et services associés. Un autre poids lourd européen, l’Italien JapanParts, peu présent en France, pourrait bien s’inviter dans les négociations à la faveur d’une récente co-entreprise initiée avec un fabricant de radiateurs dans l’Hexagone. Affaire à suivre.

Savoir recommander un stock

Pour pénétrer sur ce marché, Blue Print (marque émanation de Mazda Motors UK, rachetée par bilstein group, N.D.L.R.) assure avoir écouté le marché : “Nous avons eu une approche très précise, questionnant les réparateurs et les distributeurs, afin d’identifier leurs problématiques quotidiennes sur ce marché spécifique”, explique Gildas du Cleuziou, directeur général de bilstein group France. “Puis nous avons construit nos préconisations de stocks à partir des données du parc véhicules local, que l’on croise avec nos ventes actuelles. Ce qui donne une approche pertinente”, conclut-il.

Bien sûr, Blue Print a bénéficié d’un avantage certain dans son implantation grâce au cousin febi, déjà présent chez les groupements en France. Il était donc aisé de proposer un package d’offres dans le système febi, incluant febi, bilstein et maintenant Blue Print. En plus, la puissance de bilstein group permet de proposer des “offres d’essai” à des conditions imbattables.

Jakoparts (Herth+Buss) utilise également des données de géomarketing pour effectuer ses préconisations de stocks. Gage de sécurité, “l’équipe commerciale fait le point en fin d’année avec le distributeur et reprend les stocks invendus, pour réajuster leur pertinence. Et Herth+Buss utilise le modèle SAP pour la gestion des marchandises et des stocks”, rappelle Pascal Paquet, directeur commercial de Herth+Buss.

Modèles Logistiques

Le leader, NPS, est bien entendu structuré au plan national et s’organise de la même façon sur 7 à 8 grandes zones en France, où de grands dépôts alimentent directement les clients des départements environnants. “Mais nous sommes aussi capables, à partir de notre stock central de Lesquin (59), de livrer un jeu de plaquettes, une palette ou un container !” souligne Jean-François Desmet, directeur général de Nippon Pièces Services.

Chez Meyle, la structure française fonctionne à partir d’un stock central à Hambourg, en Allemagne, qui alimente la France via 5 sites, répartis en France. “Pour livrer deux fois par jour n’importe qui en France, il nous faudrait plutôt 8 sites de distribution”, note Franz Quandt, directeur général.

Pour Blue Print, la solution choisie est basée sur un stock central en Allemagne, relayé en France par un centre logistique partagé avec febi, en région parisienne, et qui livre clients français et centrales de groupements. Et de bonnes pistes sont en cours de finalisation pour assurer un H+4 en Blue Print.

La nécessaire qualité de l’identification

Le paramètre fondamental sur ce marché reste lié à la recherche de la bonne pièce, au plus vite, pour le client. C’est l’un des sujets qui feront la différence, à n’en pas douter. Parmi les belligérants, NPS bénéficie d’une expérience qui lui a permis de créer son propre outil, sa propre base de données, adaptés au marché. “Notre premier catalogue électronique date de 1997, une innovation à l’époque. Et l’année suivante, nous parvenions à identifier les pièces au moyen des VIN sur la carte grise, de la même façon qu’un concessionnaire”, rappelle Jean-François Desmet.

Blue Print met également en avant l’expertise historique de sa structure au Royaume-Uni, avec une spécificité attractive pour les clients : “Nous disposons d’un outil spécifique lié à la pièce pour véhicules japonais coréens et américains, Blue Print Live, qui permet la recherche d’un composant par numéro d’immatriculation et VIN, ce qui simplifie la démarche”, analyse Gildas du Cleuziou. Utilisé par de nombreux sites Internet, ce modèle semble représenter l’avenir de l’identification. Néanmoins, il ne saurait se passer de l’expertise de professionnels du secteur, notamment pour les véhicules datant de l’ancien SIV, sur lesquels la recherche par immatriculation se révèle moins précise.

Chez Herth+Buss, “pour pérenniser notre BDD Jakoparts, nos équipes s’appuient sur les mises à jour mensuelles du Kraftfahrt-Bundesamt (l’Office fédéral allemand pour la circulation des véhicules à moteur), croisées avec leurs propres recherches”, explique Pascal Paquet.

Concurrence

Depuis deux ans, tout s’accélère. Le rachat de Blue Print, spécialiste de la pièce pour véhicules asiatiques, par l’Allemand Bilstein group, semble avoir mis le feu aux poudres.
Cette acquisition, immédiatement relayée dans l’Hexagone par les équipes de febi France à grands renforts de communication et de marketing, a commencé à faire douter toute une profession sur la suprématie de NPS. Mécaniquement, Nippon Pièces Services perd donc du terrain, puisqu’il n’est plus seul sur son marché. Mais Jean François Desmet, philosophe, rappelle qu’il a déjà vécu pareille situation lorsque Nipparts (à l’époque distribuée par Herth+Buss) disposait d’une présence forte…
“Ce sont souvent de si grosses structures qu’elles n’ont pas la faculté d’adaptation et la proximité nécessaires au traitement correct de ce marché”, estime-t-il.

Les uns et les autres

Pour se différencier, Meyle compte sur son concept HD. Une ligne de pièces dont la qualité surpasse celle des pièces d’origine. En fait, les équipes d’ingénieurs identifient les faiblesses d’un composant au moyen des rappels observés chez les constructeurs, et ajustent son design, sa géométrie ou les matériaux, pour le rendre plus robuste. Ce programme couvre les PSD, les pièces de caoutchouc métal et quelques pompes à eau. “Pour nous, il s’agit de créer le réflexe chez le distributeur. L’ambition est de devenir un fournisseur alternatif, dans un premier temps. Le vrai défi, c’est de faire essayer notre offre. Ensuite, notre meilleure publicité, c’est la qualité de nos produits”, annonce Franz Quandt.

Bien entendu, Blue Print bénéficie, pour sa part, d’un indéniable effet groupe. En marge de l’offre produit, la marque propose ses services aux réparateurs, sur la base du programme déployé pour febi en France depuis des années. Sans oublier les solutions d’outillage spécifique, ainsi que la présence sur le terrain pour accompagner les distributeurs. “Quatre animateurs sillonnent aujourd’hui la France pour accompagner nos clients distributeurs et promouvoir la pièce asiatique auprès des réparateurs, rappelle Gildas du Cleuziou. Notre solution inclut une offre cohérente, un stock, un service dépannage opérationnel et une animation terrain permettant la formation des magasiniers, ATC et des réparateurs.”

Conclusion

Dans trois ans, Blue Print espère enregistrer un CA de 8 millions d’euros en France, sachant que, selon nos sources, NPS se positionne aujourd’hui à environ 20 millions sur le territoire. De son côté, Herth+Buss, qui fait moins d’un million d’euros en France avec Jakoparts, a déménagé pour agrandir son stockage et accélérera dès 2013, soutenu par son actionnaire allemand. L’équipementier déploiera, en outre, le programme WAD, des camionnettes-ateliers qui sillonneront les routes pour rencontrer les réparateurs, accompagnés des distributeurs. Il s’agit principalement d’éduquer et de faire de la formation. Meyle va tenter de développer sa visibilité, mais souffre d’une offre moins large que ses concurrents. Tout dépendra de la capacité de la structure à démontrer sa pertinence sur ses propres gammes, dont il présente l’avantage d’être fabricant. Quant à la stratégie de NPS, elle consiste à poursuivre sur ses fondamentaux, à savoir sourcing de qualité et pertinence de l’offre. “La spécialisation reste la clé de la réussite.

Aujourd’hui, NPS crée environ 200 nouvelles références mensuelles, afin de préserver ses compétences et son exhaustivité. Et les tout petits volumes n’intéressent pas les acteurs globaux. Nous faisons notre force de notre profondeur de gamme”, affirme Jean-François Desmet. D’autre part, la société nordiste, qui basait ses tarifs sur ceux des réseaux constructeurs, a dû revoir son offre pour la repositionner en prenant en compte l’arrivée de ces concurrents parfois très agressifs. NPS va également poursuivre sa politique d’expansion européenne, et aller chercher des parts à l’étranger, sur les marchés de ses concurrents, en UK, Allemagne… Une accélération à l’international qui démontre que les frères Desmet comptent bien en découdre avec les poids lourds de l’équipement auto, venus contester leur leadership en France.

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