Crise du caoutchouc : le SNCP tire la sonnette d’alarme
"Pas de rebond des immatriculations, pas de rebond de la production industrielle." C’est par ce constat sur le secteur automobile que le Syndicat national du caoutchouc et des polymères (SNCP) commence son bilan d’activité de l'exercice 2021. Une inquiétude non dissimulée au terme d'une année durant laquelle les coûts de production des dérivés du caoutchouc ont explosé, quand le nombre de commandes a, lui, chuté. Bilan : 80 % des fournisseurs de pièces de caoutchouc pour l’automobile n’ont pas retrouvé leur chiffre d’affaires de 2019.
Les raisons d’une situation tendue
Les coûts ont augmenté pour plusieurs raisons. D’abord, le prix du gaz, essentiel à la fabrication des caoutchouc synthétiques, a été multiplié par six entre 2019 et la fin 2021. Le prix des matières premières a également explosé, alors qu’elles comptent pour 30 à 50 % du coût de revient d’une pièce automobile en caoutchouc.
Ensuite, la pandémie a provoqué un goulet d’étranglement industriel : après une production arrêtée en 2020, le redémarrage a été techniquement complexe et empiré par les absences de personnels en raison du Covid. On y ajoutera la désorganisation logistique maritime et terrestre, ainsi que les événements climatiques (inondation dans le Nord européen, tempêtes aux USA qui ont affecté les infrastructures pétrochimiques…).
Et, surtout, le secteur automobile n’a pas connu de reprise soutenue. La pénurie de composants a entraîné une chute de 40 % de la fabrication de véhicules en France et de 35 % en Allemagne. A l’échelle mondiale, la production a été amputée de 10 millions de véhicules en 2021, poussant les constructeurs à bouleverser leurs commandes de pièces. De quoi affaiblir l’activité des transformateurs de caoutchouc.
Vers des défaillances en cascade ?
D’autant que, selon le SNCP, il est difficile de répercuter l’explosion des coûts sur les constructeurs, au détriment des marges de ces entreprises. De fait, seuls 40 % des fournisseurs ont répercuté moins d’un dixième de leurs surcoûts, l’an dernier. "De nombreux chefs d’entreprise reconnaissent qu’ils ne pourront tenir plus longtemps dans un contexte de travail à perte, observe le syndicat. Les risques de défaillances de livraisons, voire de défaillances d’entreprises sont bien réelles après deux années très difficiles. Si un tel scénario devait se confirmer, le gâchis serait énorme après le soutien franc et massif apporté par les pouvoirs publics aux acteurs de la filière automobile aux cours de ces deux dernières années."
Le SNCP ajoute que la menace pèse aussi sur les producteurs de pièces techniques en caoutchouc participant à la transition vers le véhicule électrique : les moyens financiers et humains nécessaires à la transformation du secteur seraient désormais difficiles à mobiliser.
Une réaction urgente
Face à cette crise, le syndicat réclame un accord rapide avec les constructeurs automobiles pour sauvegarder l’industrie de la transformation de caoutchouc. Les discussions entre Stellantis, Renault et les différentes fédérations professionnelles se poursuivent, mais les négociations pour mettre en place des accords cadre d’indexation des prix de vente des pièces sur les évolutions du prix des matières premières et de l’énergie sont jugées trop longues. Elles courent depuis juin 2021.
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En raison de toutes ces difficultés, le SNCP réclame un accord rapide, dans l’esprit du Code de performance et de bonnes pratiques pour les entreprises (CPBP), signé en 2020 sous l’égide de la PFA. Le contexte de la guerre en Ukraine, qui aggrave la situation des transformateurs de caoutchouc, rend la situation d’autant plus urgente.