Dans quels cas faut-il calibrer les capteurs Adas ?

Apparemment, tous les acteurs de l’entretien-réparation automobile ne mesurent pas encore l'importance du calibrage des Adas (systèmes d'aides à la conduite) dans les règles de l'art, à la suite de certaines opérations. Formateurs, prestataires spécialisés et experts automobiles sont intarissables sur les lacunes inquiétantes qu'ils observent sur le terrain – jusque dans certains ateliers indépendants et de constructeurs. Des erreurs qui pourraient éventuellement être à l'origine des freinages intempestifs ou "fantômes".

Par exemple, l'un d'eux rapporte avoir entendu un carrossier lui déclarer : "Je n'ai pas besoin de calibrer les Adas, puisque je ne remplace pas de pare-brise". Grave erreur ! Ce réparateur – vraisemblablement minoritaire au regard des informations diffusées sur le sujet – n'avait pas appréhendé leur présence sur certaines des pièces qu'il démonte régulièrement. Pire : en cas d'accident, il pourrait être reconnu responsable si la justice prouve qu'il a mal (ou pas) calibré un capteur à l'origine dudit sinistre.

Démontages de pare-brise, parechocs et traverses concernés

Cette méconnaissance ne concerne pas que les ateliers. Les témoignages accablent encore d'autres professions. Certains experts automobiles et assureurs le sous-estimeraient aussi. Pourtant, ils doivent veiller à ce qu’après une réparation-collision un véhicule soit remis à la route dans son état initial. Par ailleurs, les carrosseries sont autant concernées par les Adas que les spécialistes du vitrage, les mécaniciens, les pneumaticiens et les centres autos.

Pourquoi ? Parce qu'"après toute opération de géométrie ou de dépose d’un élément comprenant un capteur Adas, un recalibrage est nécessaire", rappelle inlassablement Éric Blaizeau, référent technique mobilité du Cesvi. Le technocentre (adossé à Covéa) demeure une référence en la matière. Ses techniciens experts étudient l'ensemble des différents systèmes Adas multimarques existants. Ils observent notamment les capteurs (radars ou lidars) sur les parechocs ou traverses des véhicules récents et haut de gamme plus anciens. Sans oublier les pare-brise qui accueillent une caméra. Tous commandent différentes fonctions d'aides à la conduite.

Raison pour laquelle, sur ces modèles équipés, un démontage de parechoc avant, de traverse ou un remplacement de pare-brise doivent obligatoirement être suivis d'un calibrage des Adas. Par ailleurs, leur maintenance impose aussi une géométrie suivie d'un nouvel étalonnage de leurs capteurs. Citons notamment les interventions sur le train roulant… Dans ces exemples aussi, une impasse sur le calibrage peut menacer la sécurité des usagers de la route.

Risques d'erreur pour l'électronique de bord

Dans tous ces cas de maintenance, l'orientation des capteurs (radars, caméras et lidars) est susceptible d'être modifiée de quelques millimètres. Ces écarts – même légers – peuvent induire en erreur les Adas du véhicule. Une voiture arrivant de face dans sa voie ou un obstacle en bord de route peuvent être identifiés à tort comme des dangers. L'ordinateur embarqué peut ordonner des manœuvres inappropriées, voire dangereuses.

Celles-ci peuvent venir des systèmes de maintien dans la voie, de régulation de vitesse adaptative, de freinage d’urgence automatique (AEB, Automatic Emergency Brake) ou encore éventuellement des phares matriciels… Ils peuvent ainsi déclencher un coup de frein intempestif, un écart de trajectoire hors route ou l'éblouissement d'un véhicule arrivant de face.

Alors pour éviter ces graves défauts, quelles sont les règles de l'art du calibrage ? Pour répondre à cette question, les spécialistes du Cesvi analysent les différents systèmes Adas multimarques existants. Leurs études incluent ceux fabriqués par Bosch, Continental, Valeo et d’autres. Ils identifient ainsi des méthodes de réparation. Ces recherches les poussent à insister sur l’importance d'étalonner les Adas à partir de l’angle de poussée réel du véhicule.

Le réparateur ne doit pas se fier uniquement à l’axe de symétrie de la carrosserie. En effet, celui-ci peut dévier dans les cas où l'arrière du véhicule est décalé par rapport à l'avant. Celui-ci avance alors "en crabe" et ses Adas doivent obligatoirement prendre cet axe en compte. Autrement, ils ne perçoivent pas la direction réelle du véhicule.

De plus en plus de véhicules concernés

Et pas question d'effectuer les calibrages autrement qu'avec des outils dédiés. Ceux-ci sont conçus par des spécialistes comme Autel, Bosch, Delphi, Hella Gutmann, Mahle, Texa, etc. Certains de leurs systèmes éditent un certificat de calibrage après chaque prestation – preuve que l'opération a été réalisée. Parallèlement, des centres de formation (parmi lesquels le Cesvi), souvent avec l'appui des distributeurs, forment les réparateurs à l'emploi de ces outils. Ils leur apprennent à réaliser ces opérations d'autant plus complexes qu'elles diffèrent selon les marques et modèles automobiles – en mode statique ou dynamique, etc.

Reste que ces outils et formations restent coûteux. Difficile de trouver un système couvrant la majorité du parc roulant à moins de 9 000 euros. Sans compter le prix de la formation de ses utilisateurs. Alors évidemment, ces coûts freinent l'équipement des ateliers. Mais ils n'excusent pas l'impasse sur une opération de sécurité. Cela d'autant plus que des prestataires proposent de les effectuer dans les ateliers. Maintenant, l’ensemble des techniciens formés au calibrage opèrent sur un nombre croissant de véhicules.

En effet, le premier système AEB a été installé sur une Volvo XC60 en 2008. Aujourd'hui, la réglementation européenne GSR2 impose certains Adas depuis 2022. Parmi eux, figurent l'aide au maintien dans la voie, l'alerte de survitesse (avec lecture des panneaux de signalisation) et l'AEB. Ce dernier devra intégrer la détection de piétons, deux-roues et d'obstacles à partir de juillet 2026, sur les nouveaux modèles…

Globalement, d'ici à 2030, un véhicule sur deux du parc roulant devrait être équipé d'Adas de plus en plus perfectionnés d'après la Fédération des industries des équipements pour véhicules (Fiev). Chaque atelier doit donc être capable d'assurer leur maintenance (en interne ou en externe) dès aujourd'hui.