S'abonner
Distribution

La chute d’Eagle Spare Parts

Publié le 5 avril 2022
Par Mohamed Aredjal
3 min de lecture
C’est une mauvaise nouvelle qui a ébranlé le réseau Van Heck Interpièces France. En mars 2022, Eagle Spare Parts a officialisé l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Une annonce surprenante puisque le distributeur drômois connaissait jusqu’ici une trajectoire exemplaire.
C’est dans un courrier envoyé à ses clients et partenaires qu’Eagle Spare Parts a annoncé mi-mars sa cessation d’activité. ©Mecalux
C’est dans un courrier envoyé à ses clients et partenaires qu’Eagle Spare Parts a annoncé mi-mars sa cessation d’activité. ©Mecalux

L’annonce a fait l’effet d’une petite bombe dans le réseau Van Heck Interpièces France. Fin mars, Eagle Spare Parts, l’un des plus importants BPN (business partner network) de l’enseigne du groupe LKQ, a officialisé auprès de ses clients et fournisseurs sa demande d’ouverture de procédure de liquidation judiciaire. La crise du Covid-19 et plusieurs projets très ambitieux ont fragilisé la trésorerie de la société créée en 2018 par Francis Bacconnier, qui a préféré jeter l’éponge après plusieurs tentatives pour redresser la barre. Une véritable surprise tant l’entreprise basée à Mours-Saint-Eusèbe (26) semblait connaître jusqu’ici une ascension spectaculaire.

Une progression fulgurante

Dans le réseau Van Heck Interpièces France, Eagle Spare Parts faisait en effet office d’élève modèle. "Nous nous sommes déployés très rapidement, en passant de 1,2 à 16,3 millions d’euros de 2018 à 2021", rappelle le dirigeant. Cette progression, le grossiste la doit à une stratégie de développement commerciale ambitieuse (logistique intégrée, service technique, largeur de gammes, etc.) mais aussi au soutien de Van Heck Interpièces France. Le groupement batave avait, en effet, fait d’Eagle Spare Parts l’un de ses principaux relais en local pour accélérer l’extension de son maillage.

"Nous avons ouvert 13 adhérents Autofirst la première année, et nous avons développé rapidement le chiffre d’affaires et donc les achats chez VH. […] Nous avons ouvert avec ce soutien fournisseur deux sites en plus du siège en 2018 : Chanas et Andrézieux. Toujours dans la même dynamique, nous avons ouvert deux nouveaux sites en 2019 : Genas en juin et Étoile-sur-Rhône en octobre", confirme Francis Bacconnier.

En 2021, le dirigeant était à la tête d’un véritable groupe régional rassemblant deux plateformes et quatre dépôts. Dans nos colonnes, il confiait même ses nouveaux projets de développement… C'est alors que les ennuis ont commencé pour le distributeur drômois.

Un ERP défaillant

L’activité d’Eagle Spare Parts a d’abord été perturbée par son ERP. Contraint de remplacer son ancienne solution informatique, le grossiste s’est engagé en 2021 dans le déploiement d’un nouvel outil lors dans son dernier magasin ouvert à Orange puis à Pau. Mais la mise en œuvre de l’ERP provoque de nombreux dysfonctionnements, notamment avec la centrale de Van Heck Interpièces France selon Francis Bacconnier.

Ce dernier dénonce "le manque manifeste de volonté" de son groupement de faciliter ce transfert censé le rendre indépendant. "Ils ont par exemple rattaché le dépôt de Pau à un site en Belgique au lieu de Chassieu", indique-t-il. Résultat : fin 2021, Eagle Spare Parts accumule les pertes de chiffres d’affaires et doit dépanner les clients n’ayant pas reçu leur marchandise. En parallèle, les relations avec son groupement se compliquent.

La mauvaise passe de la société suscite l’inquiétude de la centrale tandis que Francis Bacconnier s’engage à se séparer de son dépôt du Sud-Ouest pour renflouer ses caisses, espérant dans le même temps des avances de RFA. Mais les négociations s’éternisent et, en mars, Van Heck Interpièces France met un terme à ses livraisons. "Nous avons fonctionné pendant deux jours en transformant les commandes passées sur le site du fournisseur LKQ vers d’autres fournisseurs, avec tout ce que cela implique de pénibilité pour le centre d’appel (délais décalés, marques différentes, etc.), en plus d’un impact négatif fort auprès de la clientèle déjà bien éprouvée", confie le dirigeant.

Le chiffre d’affaires du BPN plonge une nouvelle fois, précipitant sa chute. "Notre développement basé principalement sur la mobilisation de créances n’était plus viable dans ce cadre, et les délais dont nous disposions trop courts pour empêcher un tel drame", ajoute Francis Bacconier.

Des erreurs de gestion ?

Aujourd’hui, le fondateur d’Eagle Spare Parts se montre très critique à l’égard de son groupement, lui reprochant son manque de soutien alors qu’il a sensiblement œuvré à son développement dans l’Hexagone.

Interrogé, Van Heck Interpièces France n’a pas souhaité commenter pour le moment cette situation, rappelant que la liquidation de son BPN n’a pas été actée. Plusieurs sources proches du groupement ont toutefois accepté de nous livrer quelques précisions sur ce dossier, pointant notamment du doigt des erreurs de gestion chez Eagle Spare Parts.

"Si Van Heck Interpièces a fermé le robinet, c’est parce que la situation présentait un véritable risque, confie l’une d’entre elles. Eagle Spare Parts s’était engagé dans des projets beaucoup trop dispendieux, avec la refonte de son ERP ou encore la création d’un catalogue électronique. Le groupement ne pouvait plus laisser les vannes ouvertes." Dans les rangs du groupement néerlandais, un témoin, préférant aussi garder l’anonymat, estime qu’Eagle Spare Parts a bénéficié d’un "fort accompagnement financier ces dernières années".

Des affirmations démenties par Francis Bacconnier qui envisage de porter l’affaire devant la justice.

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

cross-circle