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Filière REP : les centres VHU veulent rester "maîtres du jeu"

Publié le 4 avril 2022
Par Mohamed Aredjal
3 min de lecture
Le secteur du recyclage automobile s’oppose au décret d’application de la loi Agec, qui risque de bouleverser l’équilibre économique du marché. La profession appelle à des changements urgents dans un livre blanc publié par Mobilians.
En France, près de 1 700 centres VHU agréés traitent chaque année 1,6 million de véhicules, et produisent entre 8 et 11 millions de pièces de réutilisation.
En France, près de 1 700 centres VHU agréés traitent chaque année 1,6 million de véhicules, et produisent entre 8 et 11 millions de pièces de réutilisation. ©Careco

"Oui à la filière REP mais pas dans ces conditions !" C’est en substance le message adressé par la branche des recycleurs de Mobilians au législateur. Le syndicat veut en effet mettre en évidence les conséquences de l’organisation future de la filière à responsabilité élargie du producteur (REP) relative au traitement des épaves automobiles.

Pour Patrick Poincelet, président de la branche, ce texte présente deux inconvénients majeurs. Primo, il n’apportera aucune garantie sur la suppression des pratiques illégales de traitement des VHU. Secundo, il risque de déstabiliser une profession qui se distinguait jusqu’ici pour sa performance.

Pour mémoire, le texte a été adopté dans le cadre de la loi Antigaspillage et économie circulaire (Agec), visant à lutter contre le gaspillage et l'obsolescence programmée tout en favorisant le réemploi dans de nombreux secteurs d’activité. Dans l’automobile, les obligations des producteurs ont été renforcées et, depuis le 1er janvier 2022, ils doivent s’organiser autour d’éco-organismes ou de systèmes individuels pour assurer la gestion des VHU (collecte et recyclage).

La loi prévoit, en outre, que les 1700 démolisseurs agréés soient contraints, dès le 1er janvier 2024, de nouer un contrat avec un ou plusieurs éco-organisme et/ou système individuel pour continuer leur activité. Un décret d’application, soumis à la consultation du public jusqu’au 8 avril 2022, doit préciser les modalités d’organisation de cette nouvelle filière REP VHU.

Les recycleurs veulent garder leur autonomie

Outre un manque de concertation avec les parties prenantes du secteur, les recycleurs dénoncent plusieurs points de ce projet. A commencer par la contractualisation de la relation entre opérateurs de traitement et éco-organismes / systèmes individuels. Dans la réforme actuelle, ces derniers deviendraient d’incontournables intermédiaires dans la filière. Ils seraient chargés de la destruction administrative des VHU, coupant la relation directe entre les centres et leurs différentes sources d’approvisionnements (particuliers, garages, etc.).

"Des entreprises indépendantes, qui sont déjà soumises à une forte réglementation, devront alors travailler avec des appels d’offres, ce qui va nécessairement conduire à une sélection des acteurs", regrette Patrick Poincelet. Ce dernier estime que les acteurs non retenus devront cesser leur activité et mettre la clé sous la porte.

Une menace pour les centres VHU ?

Autre menace pour les démolisseurs : que les constructeurs – qui semblent privilégier la voie des systèmes individuels au détriment du dispositif, plus collégial, des éco-organismes – imposent leurs règles du jeu. Ils pourraient, par exemple, exiger une prise en charge uniquement de certaines marques ou modèles spécifiques. "Mettre en place un fonctionnement marque par marque ne serait absolument pas gérable pour les centres VHU. Sans tenir compte de l’aberration écologique qu’impliquerait un transport des véhicules vers le bon centre", proteste Patrick Poincelet.

Le président de la branche des recycleurs craint aussi, à terme, une mainmise des constructeurs sur leurs activités à valeur ajoutée. D’autant que ces derniers ne cachent plus leurs velléités de renforcer leurs positions tout au long du deuxième et troisième cycle de vie des véhicules… "Avec l’avènement du véhicule électrique, il y aura un véritable enjeu autour du traitement et du recyclage des batteries. Et c’est une activité que nous voulons conserver."

Au-delà des perturbations que risque de provoquer ce projet de loi, les centres VHU pointent également du doigt son inefficacité sur deux sujets clés : la lutte contre la filière illégale et la valorisation des pièces issues de l’économie circulaire (Piec).

Les préconisations de Mobilians

Favorable à l’esprit de la REP, la profession demande aujourd’hui plusieurs modifications du décret. Elle veut tout d’abord conserver la partie opérationnelle du traitement des VHU, en gardant un lien direct avec ses sources d’approvisionnement. Mobilians préconise la mise en place d’un ou plusieurs éco-organismes avec une vocation essentiellement financière, afin de compenser la filière en cas de déséquilibre économique. Ces instances auraient, en outre, pour mission de mieux lutter contre les pratiques illégales avec la mise en œuvre de campagnes d’information auprès du grand public.

Mobilians VHU

"C’est un système qui s’inspire de la filière électro-ménager et qui a fait ses preuves. […] Grâce à ce dispositif, nous resterions maîtres du jeu", assure Patrick Poincelet.

Mobilians a demandé une sollicitation en urgence des services du ministère de la Transition écologique pour échanger sur le contenu de la future réglementation et transmettre ses propositions. Un livre blanc a déjà été adressé aux pouvoirs publics en ce sens. L’organisation professionnelle espère désormais être entendue et trouver un compromis avec l’ensemble des parties concernées.

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