La carrosserie Treil s'affiche en modèle de durabilité
Elle a conquis les générations depuis 55 ans. La carrosserie Treil, à Pont-Sainte-Maxence (60), accueille parfois grands-parents, parents et enfants. Un esprit familial dont son dirigeant ne veut pas se défaire, la fidélité des clients et le bouche-à-oreille ne faisant qu'accroître sa popularité. "Nous connaissons nos clients, et ils nous connaissent", sourit Bruno Scior. Avec son épouse, ce dernier a repris il y a une quinzaine d'années la carrosserie créée par son beau-père. La reconnaissance acquise au fil des ans permet à son entreprise de tourner à plein régime. "Les agréments dont nous disposons nous permettent d'avoir un bon volume d'affaires, ajoute-t-il. Mais beaucoup de clients viennent indépendamment des assurances." En moyenne, entre 28 et 30 véhicules passent dans l'atelier chaque semaine.
Mais ce n'est pas avec son volume d'affaires que la carrosserie Treil (sous panneau Five Star) et ses dix salariés se distinguent. En reprenant l'entreprise, le dirigeant a rapidement eu la volonté de développer son caractère durable et de créer "quelque chose de différenciant par rapport à ce qu'on peut rencontrer sur le marché". Créer une "carrosserie écoresponsable" a demandé beaucoup de travail, même si Bruno Scior n'a pas encore concrétisé toutes ses idées qui font, selon lui, un garage durable. Le dirigeant s'essaye d'ailleurs à une définition : "Un garage durable a conscience des enjeux écologiques de la réparation automobile, met en place de nouvelles pratiques tout en restant rentable et en proposant des solutions attrayantes à ses clients." Dans les faits, la carrosserie Treil a procédé à plusieurs aménagements pour verdir son activité.
Des investissements et des comportements vertueux
La devanture a été totalement démétallisée, et une façade en bois attire désormais le regard des passants de la rue Pasteur. Dans l'atelier, l'investissement le plus onéreux s'est porté sur les cabines de peinture, dont il faut en plus s'assurer du bon entretien pour limiter leur consommation. Bruno Scior a fait le choix de la marque Weinmann, et s'en explique : "Le processeur diminue la rotation des souffleries et de la ventilation en cabine, et optimise les temps de chauffe et de maintenance en température. Elles consomment le moins d'énergie possible."
Côté équipements, l'atelier est muni de produits de séchage UV, qui permettent de réduire l'utilisation du mode étuvage, très énergivore. Sont aussi utilisés des vernis qui optimisent le séchage à température ambiante. Un produit qui a encore plus d'intérêt en hiver, quand les cabines tournent plus du fait du froid. "Nous travaillons beaucoup avec de la pièce de réemploi et favorisons les circuits courts pour notre approvisionnement", ajoute Bruno Scior.
Depuis la réception, les clients peuvent observer les ateliers, et donc les réparations de leur véhicule, à travers une verrière. Les efforts environnementaux de la carrosserie Treil n'ont pas d'impact sur la facture. "Il suffit d'avoir une bonne maîtrise de ses coûts et de ses charges pour pouvoir proposer des prix attractifs à ses clients. En termes de rapport qualité-prix, nous sommes presque moins chers qu'une carrosserie classique", estime Bruno Scior. Sorti des investissements matériels, le dirigeant le martèle : "Il est possible d'appliquer des méthodes plus basiques et peu coûteuses. Il faut commencer par mettre en œuvre ce que l'on s'impose à la maison."
La carrosserie a en effet fait en sorte de réduire son poste énergie, en optimisant l'éclairage naturel pour utiliser le moins possible la lumière artificielle. La climatisation et le chauffage ont été baissés, la consommation d'eau est maîtrisée et les impressions papier presque inexistantes. La gestion des déchets est également soigneusement respectée. Des valeurs transmises et appréciées des futurs carrossiers. "Tous nos salariés sont arrivés à l'issue de leur formation, précise Bruno Scior. Nous avons deux ou trois apprentis chaque année, et nous essayons de conserver les bons profils. L'environnement de travail et la partie écologique plaisent aux jeunes, ce qui est intéressant dans un métier sous tension. Nous ne subissons pas de démissions."
Plus grand, plus durable
Pour poursuivre son expansion, le réparateur se sent toutefois à l'étroit dans les 850 m² de son atelier (sur un terrain de 2 400 m²). Afin de continuer à grandir, la carrosserie Treil devrait prochainement changer de localisation. Et Bruno Scior a déjà de nombreux projets en tête. D'abord, le toit du futur bâtiment devrait être orné de panneaux photovoltaïques.
Le but est de rendre, a minima, le back-office de la carrosserie autosuffisant en électricité. "Nous aimerions aussi pouvoir créer une zone arborée, une zone de friche pour pouvoir préserver les infiltrations au sol, décrit le dirigeant. Parmi les investissements un peu coûteux, nous pensons aussi à des systèmes de récupération des eaux de pluie, avec des terrassements pour enfouir des cuves." Des idées déjà chiffrées et prêtes à être développées. Tout comme le projet de bornes de recharge, dans les cartons depuis quelque temps mais qui attendra les nouveaux locaux.
Car ce déménagement permettra aussi à la carrosserie de se positionner sur les marchés d'avenir comme l'électrique. L'atelier dispose d'un véhicule "zéro émission" depuis deux ans. La demande sur ce segment est déjà présente autour de Pont-Sainte-Maxence, et Bruno Scior a pu constater que les automobilistes concernés éprouvent des difficultés à faire réparer leur véhicule.
Adapter au plus vite sa carrosserie lui permettra d'avoir, comme toujours, un coup d'avance. "Réparer des VE nécessite beaucoup plus de place dans l'atelier et des infrastructures différentes, rappelle Bruno Scior. Il faudra aussi assurer à nos employés des formations différentes de ce qu'on a pu faire jusqu'à aujourd'hui, même s'ils sont tous agréés. Il faudra des formations plus pointues sur les modes opératoires de ces véhicules et pour des opérations lourdes, comme un changement de structure de bas de caisse."
Des valeurs familiales
Mais de grands changements n'impliquent pas forcément de grands bouleversements : la carrosserie ne s'éloignera pas de sa localisation originelle. L'objectif est de rester accessible pour les clients actuels. "Il ne faut surtout pas les laisser tomber, s'exclame Bruno Scior. La fidélité n'est jamais acquise. Si nous déménageons à 30 kilomètres d'ici, certains ne viendront plus. Je préfère donc parler de déplacement que de déménagement. Nous serons, au maximum, à trois kilomètres d'ici." Le dirigeant espère que la situation se décantera d'ici la fin de l'année, lui qui attend "du concret sur l'octroi des surfaces et la délimitation des parcelles”. Il donne rendez-vous en 2024 pour de plus grandes certitudes sur l'avenir.
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Cet avenir, ici ou à trois kilomètres, pourrait encore se dessiner sur un plan familial. La lignée devrait en effet se poursuivre avec Vincent, le fils, diplômé d'un master 2 en marketing digital. La carrosserie n'était pourtant pas son premier choix, d'autant que ses parents se sont toujours refusés à lui imposer toute pression. "Nous trouvons que l'idée de perpétuer une entreprise familiale est toujours compliquée, confie Bruno Scior. Mais il apparaît que toutes les nouveautés technologiques, de pratiques commerciales ou marketing lui correspondent parfaitement. Vincent s'est donc joint à nous. Dans quelques années, j'imagine qu'il nous succédera en reprenant l'activité." Une famille durable, à l'image de sa carrosserie.