Pièces de carrosserie : une inflation toujours plus forte
Pour l’association SRA (Sécurité et réparation automobiles), le constat est sans appel. Depuis 2017, année de référence choisie par l’organisme, le coût moyen de la réparation a connu une nette progression : +21 %. Une hausse justifiée en particulier par les répercussions de la pandémie de Covid-19, comme le rappelle Rodolphe Pouvreau, directeur de l’association : "Avec les mesures de désinfection, des frais supplémentaires se sont ajoutés à ce coût et les durées d’intervention se sont allongées".
Au-delà des conséquences de la crise sanitaire, cette hausse a essentiellement été portée par le coût des pièces. En effet, sur la même période, leurs tarifs ont progressé de 25 % (+16 % pour la main d’œuvre et +15 % pour les ingrédients peinture). "Ce poste représente plus de la moitié du coût de la réparation désormais", pointe Rodolphe Pouvreau.
La flambée des blocs optiques
Cette inflation est particulièrement visible à travers le baromètre du panier de pièces SRA, qui suit les évolutions tarifaires de pièces issues d’un échantillon représentatif du parc roulant français (246 véhicules en 2021). Or le prix moyen de ce panier de pièces a augmenté de 15 % depuis 2017 tandis que son coût (tenant compte de la pénétration des nouveaux modèles sur le marché ainsi que des variations de prix et du nombre de pièces lors des changements de génération) a, quant à lui, bondi de 25 %.
Exemple le plus significatif de cette inflation : le bloc optique. Ces quatre dernières années, leur coût moyen a bondi de 46 % ! Et la facture risque de s’alourdir encore ces prochaines années avec la généralisation de la technologie Led. "Si elle ne représente que 8 % du parc européen aujourd’hui, elle devrait concerner un véhicule sur deux d’ici à 2030", précise Rodolphe Pouvreau. Or le prix de ces phares reste élevé : jusqu’à 1000 € pour la Renault Megane IV, voire 3000 € pour l’Audi A4 (5e génération) et ses bloc Led Matrix.
Autre facteur observé par l’organisation professionnelle : un recul très net du taux de réparabilité, qui plafonne en 2021 à 30,2 %. Les rapports d’expertises étudiés par SRA révèlent, en outre, une hausse du nombre de pièces employées à chaque réparation. Ce taux moyen est passé de 5,7 pièces en 2017 à 6,3 en 2021. Autrement dit, pour un sinistre, les pièces sont de moins en moins réparées et plus régulièrement remplacées. Deux paramètres peuvent justifier cette évolution selon Rodolphe Pouvreau : la multiplication des pièces d’enjolivement et de dispositifs technologiques (Adas, etc.), difficilement réparables.
Quels leviers pour maîtriser l’inflation ?
Dans ce contexte inflationniste, voire "alarmiste" selon Rodolphe Pouvreau, SRA fait de la pièce de réemploi (PRE) un levier prioritaire pour contenir le coût des réparations. Si leur usage reste minoritaire dans le cadre des rapports d’expertise, il progresse d’année en année. En 2021, ce taux d’utilisation devrait ainsi atteindre 3,6 % (contre 3 % pour 2020). Le taux d’expertises contenant au moins une PRE a, quant à lui, enregistré une nette de hausse de 22 % en 2021.
Un bilan encourageant mais difficile pour l’heure d’envisager un recours majoritaire ou généralisé à ces pièces. Outre des incitations réglementaires peu contraignantes, Patrick Poincelet, président de la branche des recycleurs du CNPA, rappelle qu’il est difficile de faire coïncider offre et demande sur ce marché. "Les véhicules les plus jeunes, sur lesquels nous récupérons le plus de pièces, ne représentent que 14 % de nos approvisionnements. […] Même si nous avons une marge de progression, nous rencontrerons toujours des difficultés à fournir de la pièce de réemploi. La PRE doit rester un produit de complément et en aucun cas de substitution", insiste le dirigeant.
Autre invité au webinaire de SRA, Alexis Merkling, sous-directeur au pôle dommage et responsabilité à la Fédération française de l'assurance (FFA), n’a pas manqué de rappeler que les assureurs appellent de leurs vœux la fin du monopole des constructeurs sur le marché des pièces de carrosserie. Si une ouverture partielle de ce secteur entrera en vigueur dès 2023 sur les nouveaux modèles, la FFA espère désormais une libéralisation pleine et totale qui aura un impact plus effectif sur les contrats d’assurance.