Roulements, limiter les frottements
La bille qui appuie d’un côté sur un support immobile (le stator) et de l’autre sur un arbre tournant (le rotor) permet une mobilité sans glissement, et donc sans perte d’énergie. Mais entre le roulement à billes et le roulement à rouleaux ou à aiguilles, de nombreuses différences caractérisent les solutions qui sont adoptées dans les multiples applications automobiles.
Contraintes et solutions
Si le roulement diminue les frottements, il n’en supprime pas les contraintes mécaniques. Les montages ont à subir des efforts radiaux ou axiaux, voire les deux simultanément. L’intégration dans le véhicule impose également des contraintes d’encombrement, de résistance à la température, basse ou haute, de rigidité, de durée de vie et de coût. Ainsi, un roulement de roue est confronté aux efforts mécaniques dus à la masse du véhicule et aux efforts sur la roue en transversal en courbe et en radial sur les chocs de suspension. Le roulement de butée d’embrayage travaille dans un environnement de très hautes températures et, désormais à appui constant, il est entraîné en permanence par le moteur. Les fabricants développent des milliers de références, mais doivent s’adapter aux besoins particuliers, et fabriquent donc, à la demande, des pièces spécifiques.
Demandes des constructeurs
Les demandes des constructeurs vont vers une amélioration des performances, mais il y a, là, plusieurs paramètres. L’impératif concerne la sécurité des utilisateurs du véhicule. Il faut donc respecter des critères de robustesse, d’intégration dans les systèmes du véhicule, et atteindre des niveaux de frottement qui économisent les dépenses énergétiques. C’est d’autant plus vrai pour les roulements de moyeux. Devant assurer le guidage le plus strict de la roue, le roulement doit être calé latéralement, d’où l’usage de plusieurs rangées de billes ou de rouleaux. Il doit être de petite dimension pour laisser la place aux composants de freinage et aux arbres de transmission, et il intègre désormais le capteur de vitesse qui informe le système de freinage et de stabilisation active (ABS et ESP). Assez simples dans leur application, les roulements d’équipements du moteur tels que la distribution (galets tendeurs, pompe à eau, roulements d’alternateur) ne présentent de particularités que dimensionnelles et de durabilité. Le roulement de butée d’embrayage se multiplie désormais avec les doubles embrayages de boîtes robotisées. Ils sont confinés et souffrent de températures très élevées, alors que les roulements des boîtes de vitesses subissent des efforts mécaniques croissants avec l’augmentation du couple des moteurs, la demande d’un moindre encombrement et une résistance à des lubrifiants opposant une résistance moindre.
Les réponses des fabricants
Les industriels du roulement disposent de solutions pour chaque cas. Le plus complexe des roulements, le roulement de moyeux, présente plusieurs solutions en fonction de son implantation, du niveau de performance souhaité et de l’investissement consenti par le constructeur automobile. Le plus robuste des roulements, le roulement à rouleaux, devrait logiquement trouver sa place dans les moyeux. Il est compact, assure une bonne résistance axiale (aux efforts transversaux) et supporte bien la charge radiale (chocs sur les suspensions et dans les roues). La surface importante du contact des rouleaux (qu’ils soient droits ou coniques) pénalise la réduction des frottements et limite celle de la consommation de carburant. Pour gagner en frottement, le roulement à billes est plus efficace. Il impose néanmoins de plus grandes dimensions diamétrales pour présenter une résistance mécanique équivalente. Pour des applications sur utilitaires, INA et FAG, marques de Schaeffler, ont réalisé un roulement à 4 rangées de billes permettant à la fois le contact radial et oblique de guidage.
Les tendances
Les efforts des fabricants portent principalement sur la réduction des frottements. Pour progresser, si les matériaux évoluent peu, les frottements des joints d’étanchéité et de la graisse sont des voies de progression. Les aciers, traditionnellement du 100C6, sont choisis désormais dans des nuances plus robustes, plus “pures” afin d’apporter une dureté supplémentaire alors que les traitements thermiques sont améliorés sur les billes comme sur les chemins de roulement.
Les capteurs
Les roulements sont de plus en plus utilisés pour capter des informations. Le plus traditionnel est le capteur de vitesse des roues, avec le capteur inductif créé par SNR, qui est aujourd’hui un standard mondial. Le capteur qui, traditionnellement, fournit 48 points de position par tour, dispose d’une marge de progression dans la précision. Les nouveaux capteurs à multiples couronnes peuvent donner plus de 2 000 positions par tour, le sens de rotation et la position angulaire de l’arbre. Ces indications sont exploitées pour les capteurs sur colonne de direction, dans le fonctionnement de l’ESP et des assistances de direction. La précision du capteur de rotation est utilisée pour la gestion des moteurs électriques de commande en “pas à pas”, ainsi que pour les équipements d’alterno-démarreurs des véhicules hybrides. Le moteur peut alors être arrêté dans une position optimale pour favoriser son redémarrage.
Des capteurs d’efforts (jauges de contraintes) sont développés pour mesurer les déformations des ensembles roulement, moyeu et pièces de suspension, mais ils ne sont pas utilisés par les constructeurs automobiles. Ils pourraient entrer dans l’ensemble des capteurs utilisés pour la gestion active des suspensions et la correction active de stabilité (ESP).
Dernier axe de perspective pour les capteurs intégrés aux roulements, le capteur de rupture. Celui-ci permet de faire un entretien prédictif des véhicules réalisant un kilométrage très important et nécessitant un entretien prédictif. Il est préférable de remplacer une pièce avant sa défaillance, pour s’affranchir d’une immobilisation. C’est plutôt un élément destiné aux véhicules industriels qu’aux voitures de tourisme qui ont souvent des équipements étudiés pour la vie du véhicule.
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FOCUS - Les méthodes de montage
Il faut dans la mesure du possible toujours utiliser extracteurs et presse pour monter un roulement, avec des cales et des bagues d’appui de bonnes dimensions. Ce type d’équipement permet d’éviter les chocs sur les pièces et assure l’alignement de l’effort sur des pièces concentriques. Il ne faut jamais appuyer sur une bague pour enfoncer la bague opposée, car ce sont les billes qui reçoivent les efforts et risquent d’endommager les chemins de roulement.
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FOCUS - La solution SKF pour Ferrari
Ferrari souhaitait une rigidité maximale pour le train avant de son coupé-cabriolet California. SKF a répondu en intégrant le roulement de roue à double rangée de billes à contact oblique dans la fonderie du porte-moyeu et du moyeu. Le gain apporté par l’accroissement de rigidité du train permet notamment une meilleure réponse au freinage, avec un jeu diminué dans le disque. Le gain du jeu est estimé à 70 % par le fabricant. La difficulté consiste à maîtriser l’assemblage des bagues de roulement en acier dans le porte-fusée en alliage d’aluminium.
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FOCUS - Les facteurs de destruction
Mauvais montage, choc ou introduction de poussière sont les principales causes de destruction des roulements. Les poussières qui pénètrent sont écrasées entre les billes et les chemins de roulement. Même une poussière molle va causer des dommages. La matière écrasée ne passe pas entre la bille et le chemin de roulement si elle est d’une épaisseur supérieure à quelques microns, jeu qui est généralement présent dans les roulements. Le dommage, qu’il soit une marque sur le métal ou un éclat, va entraîner des à-coups à chaque passage d’une bille et s’amplifier. Le roulement sera rapidement hors d’usage.
Un choc entraînera des éclats ou une destruction des pièces constitutives du roulement (billes, cages ou pistes).
Le montage mal réalisé peut se manifester de plusieurs façons. Le mauvais montage peut conduire à un positionnement défectueux de la bague intérieure par rapport à l’extérieure. La portée étant incorrecte, le roulement s’use rapidement. Une méthode inappropriée ou des outils défectueux peuvent causer des ruptures de pièce, soit les bagues, soit les billes.
Dans tous les cas, la manifestation du défaut est un bruit de rotation qui va en s’amplifiant avec un dégagement de chaleur et qui se termine par un blocage de la rotation.