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Toutes les chaînes à neige ne se valent pas

Publié le 8 janvier 2015
Par Frédéric Richard
5 min de lecture
De prime abord, rien ne distingue une chaîne de qualité d’un produit bas de gamme. Pourtant, c’est dans sa conception et sa fabrication que le fossé se creuse. Certes, le prix s’en ressent, mais le choix d’un équipement de provenance connue évite bien des risques pour le véhicule et la sécurité des passagers. Visite chez Thule/König, spécialiste du secteur depuis près de 50 ans.
Pas moins de 25 références d’acier sont nécessaires dans l’usine, 4 000 tonnes annuelles étant écoulées !

Soyons francs, quand on nous a proposé de visiter l’usine de production européenne des chaînes à neige du groupe Thule, nous sommes restés dubitatifs quant à l’intérêt de la chose. Pourtant, deux jours plus tard, les convictions et l’enthousiasme de Sylvain Lallemant, directeur des opérations de l’activité chaînes à neige de Thule France, se sont révélés contagieux, preuves à l’appui !

La Business Unit de Thule dédiée aux chaînes à neige est issue du rachat du spécialiste italien König, il y a maintenant dix ans. Et c’est désormais l’union sacrée d’un industriel et de la société suédoise qui donne son aura aux produits de la marque. A Molteno, le site de König produit des chaînes à neige sous les deux marques, Thule pour les modèles grand public et König pour les applications professionnelles. Chaque année, plus d’un million de paires de chaînes peuvent sortir du site !

Thule a fait sa renommée sur la qualité de ses produits, qui ont su séduire les constructeurs. En effet, près de 25 marques commercialisent les chaînes à neige du groupe, souvent sous leur propre logo. Un gage de confiance envers Thule, qui se dit en effet capable de chaîner même les véhicules réputés “non chaînables”. Une petite explication s’impose. Aujourd’hui, la réduction des espaces entre la roue et les pare-boue, mais également la proximité directe d’éléments électroniques ou hydrauliques avec le pneu rendent la situation complexe, dès lors que l’automobiliste souhaite monter des chaînes sur son véhicule. A ce titre, les constructeurs déclarent le véhicule non chaînable pour éviter que le client n’achète des produits qu’il n’a pas validés auparavant. Pourtant, Thule dispose de solutions pour ces applications spécifiques. Le secret réside dans la R&D bien entendu, associée à une rigueur de production et un respect quasi militaire des spécifications constructeurs.

La qualité d’une chaîne à neige s’évalue sur sa facilité de montage, puis sur sa qualité de fabrication. Deux paramètres difficiles à contrôler avant l’achat. Mais vous allez voir que, dans le cas de Thule, le prix se justifie par une prestation de haut vol !

Comme dans de nombreuses usines, l’aventure commence à l’arrivée des matières premières et des produits semi-finis qui entrent dans l’assemblage final de la chaîne. Il s’agit par exemple de petits inserts plastiques ou autres crochets et accessoires sans réelle valeur ajoutée, en dehors de leur conception, bien entendu réalisée, elle, en interne.

L’heure de la production

De larges bobines de fil d’acier sont stockées ici, en attente de transformation, pour devenir les maillons des chaînes ! Pas question d’acheter des kilomètres de chaîne déjà réalisée. Chez Thule/König, la maîtrise de l’uniformité de la production et sa qualité constituent des prérequis. Pour produire l’ensemble des références du groupe, pas moins de 25 références d’acier sont nécessaires dans l’usine, 4 000 tonnes annuelles étant écoulées !

Au début du processus de fabrication, les gigantesques bobines sont chargées sur des dérouleuses. Le “fil”, dont le diamètre peut varier de 3 mm à plus d’un cm, est redressé, puis entre dans la première machine de production, qui le coupe en lopins correspondants à la taille des maillons, les façonnant par cintrage à la forme du maillon désiré, afin de constituer la chaîne au kilomètre. A l’issue de cette opération, les maillons sont alors figés par une soudure, réalisée automatiquement sur deux postes, simplement par fusion des deux bords du maillon, sans métal d’apport, selon qu’il s’agisse d’un maillon vertical ou horizontal. Enfin, une ultime machine spécifique vérifie l’uniformité géométrique des maillons et leur résistance, au rythme de 10 kg à l’heure. Chez König, quels que soient les applications et le diamètre du fil, le process reste identique, seule la cadence varie.

Une résistance unique

Il faut ensuite passer les chaînes ainsi fabriquées au traitement thermique. Une opération qui se pratique en les faisant transiter au travers d’un four à 900 °C, qui redescend progressivement jusqu’à environ 800 °C. A cette température, les chaînes subissent alors un choc thermique, en tombant dans une eau à 25 °C. Une maltraitance nécessaire, qui confère une résistance hors norme à la chaîne sur sa surface extérieure (en contact avec le bitume). Le cœur de la matière restant “tendre”, pour tolérer de minimes déformations et éviter la casse. Les chaînes entrent enfin dans un nouveau four, dit “de rétreinte”, à 150 °C, afin de libérer les contraintes mécaniques internes de la matière, apparues lors de la trempe.

Avant de passer à l’assemblage, une ultime étape confère son aspect rutilant à notre chaîne, la galvanisation. Par un procédé d’électrolyse qui dure environ deux heures, la chaîne se déroule dans des bacs successifs pour des opérations de nettoyage et de zincage, et enfin de séchage. Certes, la galvanisation protège de la corrosion, mais elle permet surtout de proposer un produit présentable au client final !

Assemblage, crucial… et manuel

Le bâtiment entier dédié à l’assemblage accueille nos éléments de chaînes, précoupés selon les besoins de chaque référence. La taille des installations nous fait rapidement comprendre pourquoi une chaîne de qualité s’affiche à ces prix, et surtout pourquoi les fabricants exotiques parviennent à exporter des produits si peu chers ! Tout est fait à la main ! Alors que nous avions croisé sur l’ensemble du process précédent pas plus d’une quinzaine de personnes, ici, quarante compagnons, dont beaucoup de femmes, se chargent d’assembler les produits finis en fonction de gabarits définis. Seuls les modèles industriels les plus lourds bénéficient d’une robotisation, mais très récente, qui travaille ainsi quatre fois plus vite que les mains humaines.

Mais, malgré cela, l’équation économique de l’activité chaînes reste complexe à résoudre, puisqu’il faut inciter les distributeurs à stocker en pariant sur un éventuel hiver rigoureux, produire selon les prévisions pour limiter les stocks, puis enfin attendre… Cela faisait un peu trop de paramètres hasardeux pour Sylvain Lallemant et Alberto Guidotti, gérant de la société Thule Sarl, qui nous affirment être aujourd’hui parvenus à faire de l’usine de Molteno un outil suffisamment flexible pour rester a minima rentable les années trop chaudes, et particulièrement profitable dès lors que la neige pointe ses blancs flocons. Vivement le manteau blanc !

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FOCUS - La précision millimétrique, gage de fiabilité et de sécurité

Un détour par le service qualité s’imposait, pour mieux comprendre en quoi les produits de Thule diffèrent de leurs concurrents exotiques, et comment la marque parvient à innover sans cesse dans un domaine a priori peu technique. En tout cas, c’est ce que nous imaginions, avant que l’on nous montre ici un test de résistance de maillon. L’opérateur applique une pression progressive sur ledit maillon placé dans une presse à étirement de 20 tonnes, jusqu’à sa rupture. Le modèle Thule résiste jusqu’à 5,4 tonnes, et l’on souligne que la rupture s’opère bien loin de la soudure, preuve de sa résistance. Chez les opérateurs les moins scrupuleux, la résistance plafonne au minimum de l’homologation, à savoir trois tonnes environ. Si la qualité ne s’en ressent pas au premier regard, en revanche, la durabilité n’est pas du tout la même dans ce cas… La différence de performance s’explique notamment par des choix d’acier de moindre qualité, ainsi que par des traitements thermiques moins longs (donc moins coûteux).

Autre test qui mérite une mise en avant, celui de la mesure des maillons. En effet, sur la boîte, le fabricant peut affirmer commercialiser une chaîne aux maillons de 7 mm, alors que cette mesure ne se vérifiera pas sur l’ensemble des composants de la chaîne. Or, si un constructeur homologue une chaîne de 7 mm, il faut comprendre qu’il s’agit du maximum admissible sans quoi l’équipement risque d’endommager les systèmes à proximité de la roue. Ainsi, on s’aperçoit que, si la largeur du maillon atteint bien 7 mm, une fois la chaîne montée sur la roue, certains crochets ou systèmes de tension peuvent dépasser cette cote. Thule a fait de son attention à ce paramètre sa marque de fabrique. Quand Thule annonce une chaîne de 7 mm ou 9 mm, il s’agit bien de son encombrement hors tout, rien ne dépassant de cette cote.
 

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