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Lubrifiants

Lubrifiants : les MRA au centre du jeu !

Publié le 29 octobre 2024
Par La Rédaction
6 min de lecture
Premier motif d'entrée en atelier, les révisions associées aux vidanges conservent tout leur attrait pour les professionnels de l'entretien automobile. Avec un parc roulant de 38 millions de véhicules thermiques en circulation, la prestation est appelée à perdurer au moins jusqu'en 2050.
Lubrifiants automobiles
Les contraintes de pouvoir d'achat et la baisse des ventes de véhicules neufs favorisent le vieillissement du parc roulant, au profit des réparateurs indépendants. ©Motul

Âprement disputé, le marché des lubrifiants automobiles est resté particulièrement actif sur le premier semestre 2024. Avec 84 650 tonnes, selon le Centre professionnel des lubrifiants (contre 164 842 tonnes sur l'ensemble de l'année 2023), les volumes traduisent la vitalité du segment de l'entretien.

Le secteur demeure robuste, porté par le vieillissement du parc roulant (âge moyen de 11,9 ans, selon Gipa). Après la baisse des années Covid, le kilométrage annuel moyen progresse aussi et retrouve son niveau d'avant-crise. La tendance est également soutenue par la volonté des automobilistes d'entretenir leur véhicule, au regard des valeurs résiduelles observées sur le marché de l'occasion.

Pour autant, le segment des lubrifiants dans la rechange automobile est par définition un marché mature. Il tend à perdre en volume ce qu'il gagne en valeur, formule Mélodie-Anne Camerini, responsable marketing France Indirect de Shell Lubrifiants. La baisse structurelle des volumes s'ajoute à une inflation qui impacte le pouvoir d'achat des automobilistes et à la contraction des ventes de véhicules neufs.

Dans ce contexte, le marché des lubrifiants se montre de plus en plus concurrentiel. Le phénomène apparaît particulièrement marqué en France, note la responsable marketing de Shell. "Les pétroliers sont présents, mais ils voient désormais les industriels du graissage les attaquer sur les homologations"

Autre tendance notable : les marques de distributeurs se taillent la part du lion. Sous la pression commerciale des "private labels", les pétroliers comme les industriels du graissage et les additiveurs (à l'image de Lubrizol) gardent toutefois l'avantage technologique face au downsizing (la réduction de cylindrée des moteurs) et à l'hybridation des motorisations qui s'accompagnent de nouvelles exigences.

Une technicité grandissante

Considérés à l'origine comme des consommables de base, les lubrifiants ont gagné leurs lettres de noblesse ces dernières années. Les formulations sont devenues synthétiques (PAO et GTL) et se complètent d'additifs destinés à lutter contre la corrosion et à protéger les pistons.

La technicité des huiles à la viscosité toujours plus faible vise à répondre à l'évolution des réglementations en matière de réduction des émissions de CO2, et aux gains d'efficacité attendus des moteurs. L'orientation contribue à réduire la pratique du "do-it" au profit du "do-it for me". Cette démarche consiste à acheter en ligne des lubrifiants et à recourir à un professionnel pour effectuer la vidange.

Shell Ecopack

Les MRA disposent désormais de bars à huiles au conditionnement adapté pour gérer la multiplication des viscosités. ©Shell

Car la mutation vers les basses viscosités engagée il y a vingt ans avec la Toyota Prius se généralise. Elle conduit les fournisseurs à adapter leurs gammes. Du côté de Motul, les références dédiées aux modèles hybrides alimentent les linéaires depuis 2016. Concentrés autour de la viscosité 5W30, les volumes glissent vers les 0W20 et 0W30, y compris pour des modèles âgés de 5 ans. Des formulations qui gagnent à présent les préconisations à l'entretien.

"Auparavant, les constructeurs laissaient la possibilité d'utiliser de la 5W lors des vidanges, explique Julien Parodi, responsable de la distribution de Castrol en France. Or, depuis deux ans, ils imposent l'utilisation du grade d'origine pour maintenir le véhicule dans sa conformité initiale."

Conséquence : une multiplication des références de lubrifiants. Exit les 10W40 et les 5W40, une dizaine de viscosités sont désormais nécessaires pour couvrir 80 % du parc. La réalité complique forcément la rationalisation des stocks des réparateurs multimarques. Elle conduit à la mise en place de bars à huiles capables de stocker jusqu'à neuf références de lubrifiants du côté de Castrol.

Les conditionnements des tonnelets et des fûts sont aussi adaptés. "Nous conseillons les MRA en analysant le parc de véhicules suivis pour proposer un stock qui correspond à 80 % de leurs besoins. Ils pourront faire l'appoint auprès de leur distributeur de pièces avec des bidons de 5 litres", détaille Julien Parodi.

Les lubrifiants, une valeur sûre des des réparateurs

Au cœur du marché, les mécaniciens réparateurs automobiles occupent désormais le centre du jeu. "Les vidanges représentent un point de passage incontournable dans la vie d'un véhicule, rappelle Romain Fabre, responsable marketing de Motul. Cette activité récurrente génère des marges au regard de la technicité des fluides." Les lubrifiants représentent ainsi entre 10 et 15 % du chiffre d'affaires d'un atelier. Concomitante au vieillissement du parc, la variété des motorisations suppose d'accompagner les professionnels pour mon-ter en compétences dans l'identification des lubrifiants, des intervalles de vidange et des volumes de carter des moteurs.

Nous mettrons en place un outil de formation en e-learning pour le premier trimestre 2025, de manière à permettre aux réparateurs de se former à ces nouvelles donnes”, annonce le responsable. Pris en tenaille entre les réseaux constructeurs et les centres autos, les MRA ont besoin d'un soutien particulier, estime-t-il.

A lire aussi : Le vieillissement du parc freine le déclin du marché des lubrifiants

Un besoin auquel n'hésitent pas à répondre les pétroliers, qui ont fait de cette cible une priorité. Face à la dégradation des volumes de ventes des lubrifiants au sein des réseaux de concessionnaires, due à l'espacement des intervalles de vidange, à la réduction du volume des carters ou encore à l'essor des modèles électrifiés, les compagnies se tournent en effet vers les professionnels indépendants de l'entretien automobile.

D'autant que l'âge avancé du parc roulant et le taux de rétention qui se dégrade au sortir de la garantie constructeur favorisent les MRA. Des marqueurs appelés à s'accélérer et à s'inscrire dans le temps, anticipe Julien Parodi. Ils s'ajoutent à la volonté des flottes, dont les loueurs, de trouver des alternatives aux réseaux primaires pour l'entretien de leur parc. Ces opérateurs n'hésitent plus à s'orienter notamment vers les centres autos et pneumaticiens. Face à cette tendance, le groupe anglais vante les mérites de son concept Castrol Service.

Ce programme vise à accompagner les ateliers multimarques dans leur activité lubrifiant avec une offre associant une sélection de produits, des supports de communication, une assistance technique, etc. Il bénéficie du partenariat avec le distributeur Certas Energy Lubrifiants (du groupe DCC). Le label regroupe 150 professionnels dans l'Hexagone, et Castrol espère en réunir 200 en fin d'année.

Les pétroliers à l'assaut des MRA

Dans les rangs du groupe Shell, Mélodie-Anne Camerini confirme un "intérêt grandissant pour les MRA", alors que ce marché était jusqu'à présent l'apanage des industriels du graissage. Le pétrolier étudie la manière d'adapter ses gammes pour répondre aux besoins des indépendants. Leurs attentes portent en effet sur des solutions compatibles avec plusieurs spécifications de moteurs, de manière à limiter les contraintes de stockage.

L'accent est aussi mis sur les services, en particulier l'identification des lubrifiants via l'immatriculation et les spécificités des véhicules. Face à ces attentes, la nouvelle application du pétrolier s'ajoute à la mise en place d'un bar à huiles spécifique permettant de visualiser les niveaux restants grâce à un bidon transparent.

À l'avenir, l'ensemble des solutions déployées pourrait être regroupé dans un programme dédié aux garagistes. Les réflexions sont engagées, confie Mélodie-Anne Camerini, du groupe Shell. Selon elle, il est plus que nécessaire d'accompagner les ateliers multimarques dans leur connaissance des huiles, car le marché devient complexe avec toujours plus de spécifications et des évolutions constantes au sein des constructeurs.

Elf BVA

En matière de lubrifiants, de nouveaux besoins émergent autour des vidanges de boîtes de vitesses automatiques. ©Elf

La multiplication des références, des viscosités et des normes génère une vraie complexité, confirme Romain Fabre. Elle suppose de prendre en compte la variété des motorisations essence, diesel, hybride, mais aussi "plug-in", chaque constructeur cherchant à optimiser les performances de ses moteurs. La démarche, très présente en Europe, débouche sur des lubrifiants devenus synthétiques, additivés, et aux spécificités techniques toujours plus avancées, fait savoir Julien Parodi.

De nouveaux relais de croissance

Dans le même temps, à l'heure où l'électrification s'invite de manière progressive dans les ateliers, les fournisseurs s'attèlent à préparer l'avenir. Ils élargissent notamment le champ des huiles moteur aux transmissions. L'évolution répond au glissement du marché des boîtes de vitesses manuelles vers les versions automatiques. Les voitures hybrides ont accéléré ce mouvement. En vieillissant, elles génèrent un besoin de vidange des huiles des transmissions.

"Nous mettons l'accent sur cette prestation, car il y a des règles à suivre", souligne le responsable. À noter que l'opération nécessite une station de vidange. L'équipement, en cours de développement du côté de Castrol, viendra enrichir les gammes d'huiles dédiées. Une solution clé en main qui se retrouve également au sein de TotalEnergies.

A lire aussi : TotalEnergies lance ses premières gammes de lubrifiants avec des huiles de base régénérées

Outre les boîtes de vitesses automatiques, Motul déploie aussi ses solutions adaptées aux liquides de frein et de refroidissement. La stratégie se complète de nouvelles gammes orientées vers l'entretien global des véhicules. Les additifs de dépollution des injecteurs côtoient ainsi les shampoings de lavage. "De vraies opportunités de croissance se dessinent sur ces segments", apprécie Romain Fabre. D'ici à 2030, la diversification devrait représenter 30 % du chiffre d'affaires du groupe.

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