De grandes ambitions chez Alliance Automotive : croissance et écoresponsabilité
Alliance Automotive a organisé sa première convention réunissant l'ensemble de ses réseaux, les 13 et 14 juin dernier. Pouvez-vous revenir sur cet événement inédit pour le groupe ?
Thomas Tabiasco : Jusqu'ici, nous avions pour habitude d'organiser une convention distincte pour chacun de nos réseaux. Cette convention est donc le premier événement regroupant nos cinq groupements. Les adhérents peuvent évidemment être concurrents au niveau local, mais ils sont tous conscients que c'est une force de faire partie des groupements d'Alliance Automotive Group et d'appartenir à GPC, leader mondial de la distribution indépendante de pièces. Nos adhérents et filiales ont ainsi l'opportunité de partager sur les enjeux actuels du secteur et de faire de cette diversité une force. Ce qui ne signifie pas que nous remettrons en cause le multi-enseigne. Au contraire, c'est un atout. Mais nous avons cette possibilité de travailler en commun pour bénéficier de tous les avantages que le groupe nous offre au niveau international.
Pour la première fois, nous avons donc accueilli lors de cette convention nos cinq principaux réseaux VL et PL : Groupauto, Precisium, Pièces Auto, G-Truck et MP Truck. L'événement a réuni 350 personnes dans une très belle ambiance. Le 13 juin, au cours de la matinée, nous avons organisé une plénière générale qui a été suivie, dans l'après-midi, par un salon fournisseurs ainsi que des conventions métiers. Le lendemain, nous avons poursuivi l'événement avec la visite de notre plateforme First à Saint-Fargeau-Ponthierry (77).
Vous avez pris la tête du groupe dans un contexte particulier, marqué par le départ d'une figure historique du groupement. Quelles raisons ont conduit à ce changement de management ?
Laissez-moi au préalable saluer les réalisations et les succès obtenus par Éric Girot. Éric a positionné AAG en leader du marché français en doublant le chiffre d'affaires sur cette période. Je pense aussi aux salons Le Rendez-vous, aux projets structurants de transformation du groupe et au développement de l'offre différenciante de AAG (OE, SAS et Back2car). Il y avait sans doute des divergences stratégiques, en particulier sur la dynamique de transformation. La direction d'Alliance Automotive Group en Europe avait le souhait d'accélérer le déploiement d'initiatives définies au niveau international. Je pense en particulier à Napa et au digital. Le groupe a également la volonté de retrouver une dynamique commerciale plus forte. Et nous avons aujourd'hui tous les atouts à notre disposition pour relancer cette dynamique. En ce sens, la dynamique observée cette année, au-delà de l'inflation, est prometteuse et nous montre que notre stratégie est la bonne.
En 2022, Alliance Automotive a racheté 16 sociétés de distribution à travers l'Europe. De nouvelles acquisitions sont-elles à l'ordre du jour dans les prochains mois en France ?
Nous avons déjà réalisé cinq acquisitions depuis le début de l'année, dont deux majeures avec Paris Pontoise Poids Lourds (PPPL) et Bellecave, auxquelles s'ajoutent MEA, Damtachy et le centre VHU Buquet Auto Pièces. Nous restons dans cette dynamique de croissance externe et nous ne nous interdisons donc aucun autre projet d'acquisition, tout en restant sélectifs dans notre approche. Nous avons pour objectif de faire l'acquisition de sociétés rentables, avec une attention particulière pour la qualité des systèmes informatiques, c'est un point important pour faciliter les intégrations. Nous prêtons aussi beaucoup d'attention aux valeurs de la société, qui doivent être compatibles avec les nôtres en termes de technicité, d'intégrité et de responsabilité sociétale.
Le quotidien d'AAG a été marqué ces dernières années par le déploiement de Napa en Europe, et notamment en France. Que représente aujourd'hui la marque dans vos ventes, et quelles ambitions vous êtes-vous fixées ?
L'arrivée de la marque Napa à travers les réseaux du groupe AAG constitue l'événement des années 2020. Cette marque est bien plus qu'une marque propre de plus, elle a une grande renommée aux États-Unis et dans tous les marchés où elle a été lancée. Elle bénéficie notamment des homologations drastiques définies par GPC qui garantissent la qualité de nos produits. Napa, c'est donc l'assurance d'une marque de qualité à un prix raisonnable, ce qui est important en cette période de tensions sur le pouvoir d'achat. Nous capitalisons sur cet historique solide. En France, nous rencontrons un véritable succès depuis le lancement de la marque.
Nos ventes en Napa sont en croissance de 75 % depuis le début d'année par rapport à 2022. Et nos ambitions restent très fortes puisque nous avons prévu de nouveaux lancements de produits dans nos gammes VL, PL et carrosserie. Actuellement, Napa représente environ 10 % de nos ventes, et j'espère que cette part atteindra assez vite au moins 15 %.
Des points de vente 100 % Napa, est-ce une éventualité envisagée au sein du groupement ?
Non, ce n'est pas dans notre plan. Nous souhaitons préserver la coexistence vertueuse des marques premium et de la marque Napa. Tout comme les enseignes de garages Napa : elles ne font pas partie de nos objectifs aujourd'hui.
AAG s'est illustré en fin d'année dernière avec son partenariat noué avec BMW. Quel premier bilan pouvez-vous tirer de cet accord ?
Ce partenariat se déploie très bien, avec une belle progression de nos ventes qui ont plus que doublé depuis le début d'année. Nous sommes très satisfaits de cet accord qui nous permet de compléter notre offre. Nous répondons à la demande de nos clients dans une logique de "one stop shop". Par expérience, le déploiement de ce type de partenariat nécessite du temps, les équipes doivent s'approprier les produits pour être capables de les promouvoir au mieux sur le terrain.
Compte tenu de ce premier bilan plutôt positif, souhaitez-vous vous rapprocher de nouveaux constructeurs pour développer cette offre de pièces OE ?
Je pense surtout que d'autres constructeurs pourraient aussi manifester l'envie de se rapprocher de nous… Les intérêts sont respectifs ! Je vous confirme que des contacts ont effectivement été noués auprès d'autres marques avec lesquelles nous pourrions travailler. Mais je n'ai pas d'annonce à vous faire pour le moment.
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De nouvelles marques automobiles émergent en Europe avec l'électrique, et recherchent des réseaux partenaires pour entretenir leurs véhicules. Quelle position souhaitez-vous adopter vis-à-vis de ces nouveaux acteurs ?
Sur le sujet du véhicule électrique, la stratégie du groupe est très claire grâce à notre concept Nexdrive, qui a été inauguré aux Pays-Bas avant d'être déployé dans d'autres marchés européens, dont la France, et au Canada. Avec ce programme, nous avons la volonté de former les équipes et les ateliers à la maintenance des véhicules électrifiés tout en leur apportant l'offre de pièces nécessaires à cette activité. C'est donc un concept qui peut être attractif pour ces nouvelles marques souhaitant pénétrer le marché européen en s'associant à un réseau. Alliance Automotive peut représenter un partenaire de choix pour ces constructeurs, et nous sommes ouverts à la discussion.
De nombreuses études font état du poids toujours plus important des flottes professionnelles et grands comptes sur le marché de l'après-vente. Cette clientèle représente-t-elle une cible stratégique pour le groupement ?
Oui, totalement ! Nous sommes présents sur l'ensemble des marchés européens, et seuls deux acteurs peuvent aujourd'hui s'en enorgueillir. Dans ce contexte, les flottes professionnelles et grands comptes sont vraiment à l'écoute de notre offre que nous déployons à l'échelle européenne. Par le biais de nos réseaux de garages mécaniques et de carrosseries, et avec le soutien de notre réseau d'adhérents indépendants.
Avec l'électrification du parc, le pneumatique devrait prendre une part encore plus importante dans l'activité des ateliers. Est-ce une famille de produits que vous souhaitez développer plus activement dans les réseaux du groupe ?
Vous avez raison, le marché du pneumatique va grossir avec l'électrification du parc. Nous adressons déjà ce marché au travers de Solupneu, où l'on peut retrouver une offre extrêmement large aux meilleurs prix. Nous souhaitons apporter en complément plus de service de proximité et travaillons une offre pour nos distributeurs, qui sera déployée dans l'année 2024 en H+4 et J+1.
Un mot sur votre nouvelle plateforme First : quand avez-vous prévu sa mise en œuvre, et quels bénéfices attendez-vous de ce nouvel outil logistique ?
Elle sera opérationnelle début 2024. Son plus gros apport sera très certainement l'amélioration du service fourni à nos clients. C'est la première brique d'un projet plus large d'optimisation de notre supply chain. Avec First, notre offre produits sera significativement élargie avec plus de stock, plus de marques, plus de produits, en particulier sur des produits stratégiques comme les pièces de grandes ventes (huiles, batteries, etc.), les pièces de carrosserie, le pneumatique, etc.
Nous voulons également accélérer le processus de livraison, avec l'objectif de préparer toutes les commandes en moins de 10 minutes. Ce qui va nous permettre de repousser le "cut-off" à 19h. Et même de proposer un "super cut-off" plus tardif – dont l'horaire reste à déterminer – pour nos clients de l'Île-de-France.
First apportera également de nombreux bénéfices à nos collaborateurs, puisque l'entrepôt disposera de postes de travail offrant une meilleure ergonomie. Les nuisances sonores seront considérablement réduites et le port de charges lourdes sera également diminué pour préserver nos salariés. À cette fin, nous travaillons avec les meilleures technologies du marché (Manhattan Associates pour les outils WMS et TMS, Exotec pour les solutions d'automatisation, etc.). Enfin, nous avons privilégié pour cette plateforme des solutions plus vertueuses sur le plan du développement durable. Ainsi, les technologies de supply chain de la plateforme consommeront 50 % d'énergie en moins.
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Le marché de l'après-vente est de plus en plus soumis à des objectifs de développement durable et de décarbonation. Comment prendre en compte ces contraintes tout en maintenant la qualité de service attendue par vos distributeurs et réparateurs ?
C'est un objectif qui me tient particulièrement à cœur : je veux faire d'Alliance Automotive Group une société écoresponsable. Le groupe doit être acteur de ce changement sociétal. Nous étions déjà leaders sur le sujet de l'économie circulaire avec la marque Back2Car. Dans ce domaine, j'ai la volonté de poursuivre nos actions en proposant plus de pièces de réemploi mais aussi plus de pièces remanufacturées, notamment à travers la marque Back2Car Reman qui complète notre portefeuille. Il faut savoir que 12 % du chiffre d'affaires de Back2Car est déjà réalisé à travers le remanufacturing. Le groupe s'appuie aussi sur son concept novateur Nexdrive, qui nous place en pointe sur l'activité maintenance des véhicules à zéro émission.
Comme évoqué, la plateforme First a été conçue dans une perspective de sobriété énergétique. Le groupe a mis en œuvre un ambitieux plan de réduction de son empreinte carbone. D'ici à 2030, nous voulons réduire cette empreinte de 40 %. Cet objectif nécessitera plusieurs éléments, dont l'électrification de la moitié de notre parc de véhicules, notamment ceux dédiés à la livraison, la consommation d'électricité verte sur l'intégralité de nos 300 sites et, enfin, une réduction de 40 % de notre consommation de gaz et d'électricité. Ce sont des engagements très concrets que nous avons déjà initiés en impliquant notamment nos fournisseurs.
Quels sont les autres sujets qui vous mobiliseront à la direction générale d'Alliance Automotive ?
Il faut considérer les objectifs à la fois sur le court et le long terme. À plus court terme, nous avons de grandes ambitions commerciales et devons être à l'écoute de nos clients, qu'ils soient distributeurs, MRA ou grands comptes. Ils sont une priorité pour nous. À plus long terme, nous voulons préparer la révolution qui va toucher notre industrie en accompagnant nos clients via des services de formations et d'informations aux nouvelles techniques. C'est notre rôle en tant que groupements d'anticiper cette mutation et de nous assurer que nos adhérents seront prêts.