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Distribution

Vincent Gorce (Emil Frey France) : "Avec MGA et Barrault, nous doublons de taille"

Publié le 1 décembre 2022
Par Mohamed Aredjal
6 min de lecture
Emil Frey France a officialisé, début octobre 2022, l’acquisition du groupe Barrault et de la marque MGA. Une opération de croissance externe qui s’inscrit dans la stratégie de diversification du distributeur automobile. Directeur général du groupe, Vincent Gorce nous présente sa stratégie de développement sur le marché IAM.
Gorce Emil Frey France
Vincent Gorce exclut toute fusion des réseaux Barrault et Flauraud : les deux enseignes seront maintenues.

MGA et Flauraud ont tous deux pris part à l’édition 2022 d’Equip Auto. Quelles ont été vos ambitions au cours de ce salon ?
Vincent Gorce :
Je ne vais pas forcément m’appesantir sur la participation de MGA qui a été décidée avant l’acquisition, ce qui explique d’ailleurs pourquoi la marque de pièces et le groupe Flauraud exposaient sur des stands différents. Pour ce dernier, l’ambition première au cours du salon était de promouvoir l’offre de services de l’enseigne de réparateurs Club Auto Conseil. C’est un réseau qui compte aujourd’hui plus de 200 garages, qui représente un vrai moteur pour le chiffre d’affaires des magasins Flauraud et de la marque Technik’a. Nous avons de vrais objectifs de croissance et de densification du réseau. Nous voulions donc prendre un maximum de contacts pendant le salon et inviter de nouveaux garagistes à nous rejoindre. Du côté de MGA, Equip Auto représentait une opportunité, après trois ans d’absence du salon, d’aller à la rencontre des professionnels du secteur tout en améliorant la notoriété de la marque.

Comment les rachats de Barrault et MGA ont-ils été perçus par leurs clients et partenaires ?
Pour les partenaires, c’est-à-dire globalement les fournisseurs, nous les avons rencontrés début octobre, juste après la signature de l’acquisition. Leur accueil a été très positif ! Forcément, les négociations engagées ont vocation à aligner désormais nos conditions, mais ils s’y attendaient. Je pense qu’ils sont rassurés par le fait qu’un groupe indépendant puisse encore grandir dans ce secteur et se consolider. Face aux grands groupements de ce marché, nous représentons pour eux un canal de ventes qu’ils tiennent à préserver. Nous restons effectivement l’un des derniers acteurs indépendants de cette filière. Du côté des clients, et c’est aussi un point positif, tous ont accepté de nous suivre. Nous avons fait en sorte que rien ne change pour eux, en conservant les marques commerciales et leurs interlocuteurs.
Mais je tiens à préciser qu’à court terme, le plus important à mes yeux a été d’accompagner les équipes dans cette transition. Il y aura forcément des synergies à développer et des impacts sur les organisations. Je ne parle pas de réductions d’effectifs, mais plutôt de réorganisations. Et je suis agréablement surpris de la façon dont les équipes se projettent et comprennent notre projet. Ils anticipent même parfois les orientations que nous voulons donner aux organisations. C’est très encourageant, puisque ça signifie que ce projet a du sens et de l’avenir.

Aucune fusion n’est donc à l’ordre du jour entre les réseaux Barrault et Flauraud ?
Non, ce n’est absolument pas prévu. Des managements et équipes de direction seront maintenus chez Flauraud et Barrault. De la même façon, nous conserverons les magasins des deux enseignes présents dans les mêmes secteurs, c’est le cas notamment à Bordeaux et à Toulouse. À partir du moment où les deux points de vente peuvent être concurrents tout en restant profitables, il n’y a pas lieu de modifier les choses. Nous avons identifié de nombreuses synergies sur lesquelles nous allons nous pencher, mais cette fusion n’en fait pas du tout partie.

Vous avez affirmé votre volonté de couvrir, à terme, le territoire national. Pouvez-vous nous donner quelques indications chiffrées sur le maillage ciblé ?
Pour le moment, nous sommes en pleine phase budgétaire. Les équipes Flauraud et Barrault ont présenté leurs objectifs d’ouvertures de magasins dans les prochaines années. Ce sont des projets de croissance significative qui vont nous permettre d’optimiser notre maillage local et de nous faire sortir de nos zones géographiques actuelles. Mais ça ne suffira probablement pas pour atteindre nos objectifs. Une fois que nous aurons “digéré” cette acquisition, nous pourrons nous tourner vers le reste du territoire. Si des points de vente sont prêts à être cédés et qu’ils peuvent nous aider à améliorer notre maillage, nous étudierons alors attentivement leurs dossiers…

Comment allez-vous positionner vos deux réseaux ? Avez-vous le souhait de proposer une offre à deux niveaux ?
Non, puisque Flauraud et Barrault ont finalement une stratégie assez proche. Nous n’avons pas forcément besoin d’adopter des stratégies différentes dans leur développement. En revanche, pour leur réseau de réparation [Club Auto Conseil pour Flauraud et Autofit pour Barrault, ndlr], ce sont des questions que nous allons nous poser puisque les deux enseignes proposent des concepts un peu différents.

Vos ambitions nationales impliquent un outil logistique adapté. Les plateformes de Flauraud et Barrault, situées à Clermont-Ferrand et à Niort, suffiront-elles pour accompagner votre expansion sur le territoire ?
Non, ça ne sera évidemment pas possible. Si nous voulons, par exemple, livrer un magasin à Strasbourg depuis Niort avec la qualité de service que nous devons à nos clients, ça ne peut pas marcher. Ça fait donc partie des projets que nous mettrons en œuvre prochainement.

Envisagez-vous de vous appuyer sur les plateformes Distrigo détenues par Emil Frey France ?
Ce n’est pas à l’ordre du jour. L’IAM restera distinct de nos autres activités et nous ne mettrons donc pas à profit nos plateformes Stellantis pour ce développement.

Où en est le déploiement, chez Flauraud, du concept de nouveau magasin présenté début 2022 ?
Aussi bien chez Flauraud que chez Barrault, nous observons dans chaque entreprise des avantages concurrentiels. Chez Flauraud, par exemple, les équipes bénéficient de compétences spécifiques sur les systèmes d’information et les portails de vente, qui pourront être partagées. De son côté, Barrault a une vraie avance sur le concept de magasin. Sur ce sujet, Flauraud a pris un peu de retard car les équipes n’ont pas fait évoluer leur concept, et les points de vente affichaient parfois des surfaces surdimensionnées. Le concept "New Mag", expérimenté depuis quelques mois, doit donc être mûri. Et bien entendu, nous allons nous appuyer sur le savoir-faire de Barrault dans ce domaine.
J’en profite d’ailleurs pour rappeler que Flauraud avait engagé en 2021 un plan de sauvegarde de l’emploi, avant qu’il soit finalement retiré. L’avenir de certains magasins avait alors été remis en cause. Aujourd’hui, avec notre acquisition, la situation change fondamentalement : nous ne sommes plus dans une perspective de rationalisation. L’objectif est de nous appuyer sur les synergies qui vont se mettre en place pour relancer notre développement commercial. Certains magasins Flauraud pourront facilement adopter le concept "New Mag". Quant à ceux disposant d’installations trop importantes, ils seront transférés vers des sites avec des surfaces plus réduites, en conservant l’équipe existante. Ce qui nous aidera à baisser nos charges, et notamment nos dépenses énergétiques, tout en maintenant notre maillage commercial.

Quelles synergies pourront être déployées à court terme entre Flauraud, Barrault et MGA ?
De nombreuses mutualisations sont à l’étude. Nous venons d’évoquer le catalogue électronique de Flauraud, le concept magasin de Barrault… Il y a aussi MGA, qui dispose d’un vrai savoir- faire en termes de couverture de gammes, ce qui pourrait être bénéfique à la marque Technik’a. Il ne faut pas oublier, à ce sujet, que Flauraud permettra à MGA d’avoir un relais logistique en Auvergne, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici.

Avez-vous la volonté de conserver la marque MGA ? Ou pourriez-vous l’intégrer à terme comme une MDD dans vos réseaux ?
Non, la marque sera conservée, c’est une vraie force. Le modèle MGA fonctionne à merveille aujourd’hui, il n’y a aucune raison de le changer. En revanche, l’objectif n’est pas de vendre la marque dans les réseaux constructeurs.

Quelle place occupe aujourd’hui l’IAM dans l’activité globale d’Emil Frey France ?
L’histoire a démarré en 2016 en France avec Flauraud. À l’époque, cette opération répondait déjà à une volonté du groupe de se diversifier. Aujourd’hui, cette stratégie prend tout son sens, à plusieurs titres. Tout d’abord, le groupe dispose de contrats de distribution qui sont désormais remis en cause. Le métier VN a fortement évolué et nous sommes de plus en plus désintermédiés. Ce qui aura des conséquences sur le sourcing VO à terme…
Il faut aussi tenir compte de l’électrification du parc roulant, qui met en péril le business après-vente des concessions dont l’activité se concentre, rappelons-le, essentiellement sur les véhicules âgés jusqu’à 5 ans. Compte tenu de ces multiples évolutions, nos outils immobiliers deviennent surdimensionnés. Notre équilibre économique est incertain et nous devons réduire ce risque en trouvant de nouvelles sources de rentabilité. Il y a plusieurs voies dans ce domaine. Certains groupes de distribution ont investi dans le deux-roues, d’autres dans le poids lourd, mais nous sommes à peu près les seuls à investir autant dans l’IAM. Ce n’est pas notre seule source de diversification, il y en aura d’autres, mais ce sera l’une des plus importantes. D’où la réorganisation que nous avons opérée cet été avec la création de ce pôle IAM, qui a été détaché de la direction générale opérationnelle.

Comment s’est portée l’activité IAM du groupe Emil Frey France dans ce marché perturbé par l’inflation et le manque de disponibilité de certains produits ?
Le marché de la pièce se porte globalement bien. Et même très bien ! Il est le reflet d’une activité très positive chez les garagistes indépendants. Ces derniers bénéficient du vieillissement du parc automobile, mais aussi de la crise économique et des problématiques de pouvoir d’achat. Même si nous constatons quelques reports dans certaines opérations de maintenance, l’activité reste porteuse. Notre chiffre d’affaires est d’ailleurs en croissance, en partie grâce aux augmentations tarifaires mais aussi grâce à une hausse de nos ventes. C’est un constat que nous pouvons dresser aussi bien chez Flauraud que chez Barrault.

Que représente l’IAM dans le chiffre d’affaires d’Emil Frey France ?
Aujourd’hui, ce pôle représente un chiffre d’affaires de près de 170 millions d’euros, quand le chiffre d’affaires global du groupe atteint environ 4,5 milliards. Nous avons encore de la marge de manœuvre ! Même s’il ne faut pas nécessairement tout comparer, car ces activités ne présentent pas la même structure de résultats. En termes de surface couverte, nous occupons environ 35 000 m² d’entrepôts logistiques pour une équipe d’environ 850 collaborateurs.

Quels projets vont prochainement vous mobiliser à la tête de ce pôle ?
Nous allons déjà nous concentrer sur l’intégration ! Avec le rachat de MGA et de Barrault, nous doublons de taille, ce n’est pas rien. Ce qui implique, encore une fois, beaucoup de synergies, de mutualisations, etc. Il faut aussi travailler pour que les équipes de MGA et Barrault se sentent à l’aise et trouvent leur place au sein du groupe. Ce qui devrait amplement nous occuper ces prochains mois.

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