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Carrosserie

Pourquoi le coût des pièces de carrosserie va encore augmenter

Publié le 25 février 2025
Par Nicolas Girault
3 min de lecture
Le coût des réparations automobiles continue de grimper, avec une hausse de 6,2 % en 2024, largement portée par la hausse des prix des pièces détachées. Tandis que le remplacement s’impose de plus en plus face à la réparation, les experts alertent sur les enjeux économiques et environnementaux de cette tendance.
SRA pièce de carrosserie
Le remplacement des pièces de carrosserie reste plus rapide que la réparation. Mais il coûte de plus en plus cher. ©J2R

Selon les rapports d’expertise automobile étudiés en 2024 par l'observatoire SRA, le coût des réparations a grimpé de 6,2 % sur un an. Cette hausse est principalement due à l’augmentation du prix des pièces détachées, qui ont bondi de 7,3 %, tandis que la main-d’œuvre et la peinture ont progressé respectivement de 5,1 % et 5 %.

"Nous sommes sur des augmentations très élevées des coûts de réparation, avec une variation 2023-2024 supérieure à l'inflation générale", commente Nardjesse Bensmina, data scientist GPSA/SRA.

Le poids des pièces détachées dans la facture des carrossiers ne cesse de croître. En 2024, elles représentaient 52,3 % du coût total des réparations, contre 50 % en 2022. La main-d’œuvre s’établit à 37,3 %, et la peinture à 10,4 %. Cette inflation est renforcée par une réduction des réparations au profit du remplacement, souvent plus rapide mais plus onéreux.

Pourquoi les pièces coûtent-elles toujours plus cher ?

En 2024, 71,2 % des pièces endommagées ont été remplacées, soit une augmentation de 3,6 points par rapport à 2020. Un sinistre implique désormais en moyenne 6,4 pièces endommagées (hors visserie et fournitures), un chiffre en hausse en raison de plusieurs évolutions du marché : la norme GSR2 (imposant l'ajout d'Adas), l'électrification des véhicules (avec pièces spécifiques et hausse du poids), ainsi que du design et du confort.

Autre facteur aggravant : les hausses tarifaires imposées par les constructeurs. Entre 2023 et 2024, la majorité des marques ont appliqué deux à trois augmentations successives, portant la hausse moyenne à +5,9 %. Toutefois, l’impact de ces revalorisations varie selon les familles de pièces, certaines subissant une inflation bien plus marquée.

"Le coût des réparations dépend de quatre facteurs clés : le nombre de pièces endommagées, le taux de remplacement, le prix des pièces et le recours au réemploi", explique Bruno Deng, chargé d’étude technique chez SRA. "On observe aussi une multiplication des pièces d’enjolivement et des éléments technologiques comme les LED dans des zones vulnérables, ce qui alourdit encore le coût des sinistres."

Les statistiques confirment cette tendance : 45 % des chocs concernent l’avant du véhicule, 33 % l’arrière et 20 % les côtés. Or, "c’est à l’avant que le remplacement est le plus fréquent, car les éléments y sont généralement démontables, alors qu’à l’arrière et sur les côtés, la réparation est privilégiée car de nombreuses pièces y sont soudées", précise Bruno Deng.

La PRE progresse insuffisamment

L’ensemble des pièces détachées voient leurs prix augmenter, mais certaines subissent une inflation particulièrement forte. Les boucliers avant et arrière enregistrent une hausse moyenne de 6 % et 7 % respectivement. L’éclairage avant, qui figure parmi les pièces les plus fréquemment endommagées, connaît une augmentation spectaculaire de 12 %, tandis que les feux arrière progressent de 10 %.

Les éléments amovibles, comme les ailes et les capots, voient leur prix grimper de 10 à 11 %, tandis que les vitrages enregistrent des hausses de 13 % pour les lunettes arrière et 14 % pour les pare-brise.

Face à cette flambée des coûts, les pièces d’occasion gagnent du terrain dans les dossiers de sinistre. En 2024, elles représentaient 5,3 % des pièces remplacées, contre 3 % en 2020. De plus, 17,3 % des réparations intégraient au moins une pièce de réemploi, contre 9,5 % quatre ans plus tôt. Cependant, plusieurs freins limitent leur déploiement. Les délais de livraison des pièces de réemploi sont souvent plus longs que ceux des pièces neuves.

Elles nécessitent fréquemment des réparations ou une remise en peinture avant d’être utilisées, allongeant le temps d’immobilisation des véhicules. Enfin, les références les plus demandées sont aussi les plus difficiles à trouver. La part des pièces de réemploi devrait continuer à progresser, mais elle atteindra rapidement un plafond, car les pièces neuves restent plus accessibles et rapides à installer.

Une alerte sur la réparabilité des véhicules

À plus long terme, les experts du secteur s’inquiètent des conséquences de cette inflation sur la réparabilité des véhicules. "Nous sommes sur un âge moyen de véhicules réparés de plus de 8 ans. Or tous les constats que nous tirons de nos études sur les optiques de phares, les signatures lumineuses, les designs des boucliers avant nous fait craindre une dégradation du taux de remplacement à l'avenir, craint Rodolphe Pouvreau, directeur de SRA. Car on intègre de plus en plus d'éléments technologiques sur ces zones vulnérables souvent très endommagées. Nous lançons donc une alerte sur cette notion de réparabilité, qui revêt à la fois un enjeu économique et environnemental".

Ce phénomène soulève des enjeux économiques et environnementaux. Ces nouvelles pièces sont souvent électroniques et fabriquées à partir de matériaux très polluants. Il devient crucial de développer des solutions de réparation pour limiter leur impact carbone. SRA prévoit ainsi de concentrer ses prochaines études sur l’amélioration des méthodes de réparation. L’objectif est de déterminer les conditions optimales pour privilégier la réparation tout en préservant la rentabilité des réparateurs.

De nombreux carrossiers se disent prêts à favoriser la réparation, mais à condition que leurs taux horaires soient revalorisés. Sans une meilleure rémunération du travail de réparation, le remplacement des pièces restera la solution privilégiée, au détriment des coûts et de l’impact environnemental. L’avenir de la réparabilité dépendra donc d’un équilibre entre rentabilité économique et réduction de l’empreinte carbone du secteur automobile.

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