TRIBUNE – Combler les lacunes en matière de main-d’œuvre en éveillant la passion des futurs techniciens automobiles
De l’hôtellerie-restauration à la construction, des grandes entreprises aux PME, les difficultés de recrutement persistent. 87 % des sociétés qui recrutent rencontrent des difficultés pour trouver le profil recherché, selon la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). En parallèle, 63 % des dirigeants d’entreprises français redoutent un manque de main-d'œuvre dans les prochaines années en raison du vieillissement de la population, selon une étude Indeed/Glassdoor.
De ces deux réalités émergent des interrogations essentielles : comment motiver davantage de personnes à embrasser ces métiers en tension et comment les fidéliser ? Les jeunes générations doivent donc impérativement être encouragées à explorer ces opportunités professionnelles.
La pertinence des professions essentielles et de leurs programmes d'apprentissage
La pandémie de Covid-19 a introduit le concept de "travailleur essentiel". Celui-ci désigne les professions cruciales pour assurer le bon fonctionnement de la société. Parmi ces métiers figurent les professions techniques de maintenance, responsables de la sécurité et de la fonctionnalité des véhicules et des entreprises. De plus, ces carrières, accessibles via l'apprentissage, offrent une opportunité aux individus qui ne peuvent pas aller à l'université. Elles peuvent être enrichissantes pour eux, avec la possibilité de voir leur rémunération s'améliorer au fil de leur gain d'expérience.
L'un des avantages des programmes d'apprentissage réside dans l'exonération d'impôts dont bénéficient les apprentis. Leurs salaires sont ainsi dispensés de charges jusqu'à 20 815 euros. Ces jeunes en début de carrière peuvent donc percevoir un salaire net significatif.
Dans le secteur de l'industrie automobile, les initiatives visant à attirer de nouveaux talents se sont renforcées en France. Ainsi, selon une étude France Travail BMO 2023, un total de 43 690 projets de recrutement ont été prévus dans le secteur commerce et réparation automobile l'année dernière. Cela représente une augmentation de 10 % par rapport à 2022. Ce dynamisme dans les recrutements est en partie stimulé par l'apprentissage, selon l'Association nationale pour la formation automobile (ANFA).
Ainsi, on observe une légère hausse de 1,3 % des embauches sur un an, soit une augmentation de 4 750 salariés. Celle-ci a principalement été impulsée par la progression des programmes de formation de la rentrée 2022.
Un nouveau type d’emploi de technicien automobile
Avec l'augmentation de la demande de réparations de véhicules électriques (VE) et des tâches impliquant la mise à jour de logiciels et l'amélioration des systèmes embarqués, l'approche du travail dans l'après-vente automobile évolue. Bien que cela puisse paraître décourageant pour certains professionnels du secteur, il est crucial de reconnaître que ces avancées peuvent aussi rendre ce métier plus attrayant.
Elles peuvent séduire des spécialistes de la technologie ne souhaitant pas exercer un emploi de bureau traditionnel. Cette tendance préserverait ainsi l'avenir de cette industrie. Cet aspect est d'autant plus crucial pour les générations actuelles qui sortent de l'école. Car celles-ci sont sensibles au monde numérique et aspirent à un emploi qui les plonge au cœur de cet univers.
Aujourd’hui, le métier de technicien automobile ne se limite pas à serrer des boulons. L'automatisation et la robotique améliorent l'efficacité, la sécurité et la précision dans le secteur. Ces transformations exigent de nouvelles compétences. Elles réclament une expertise technique pour résoudre les problèmes de manière créative. Aussi, susciter l'intérêt des jeunes pour ces évolutions et opportunités est donc essentiel pour inspirer une nouvelle génération de professionnels de l'automobile.
Que doivent faire les employeurs pour susciter l’intérêt chez leurs recrues et les fidéliser ?
Par conséquent, lorsque vous proposez des postes d'apprentis ou de débutants, évitez d'intimider les candidats potentiels avec une liste exhaustive de compétences requises. Rendez l'offre attrayante ! Les compétences spécifiques sont un atout. Donc, même s'ils ne répondent pas à toutes les exigences, ils se sentiront en confiance pour postuler.
Soyez transparents sur les compétences qu'ils acquerront et offrez-leur un aperçu de l'évolution de leur carrière. Décrivez à quoi pourrait ressembler leur vie après l'apprentissage, en mettant en avant les possibilités d'avancement. Informez-les sur la perspective d'obtenir un emploi à plein temps. En leur fournissant un aperçu de leur futur possible, ils seront investis dans votre entreprise et voudront progresser.
Il est primordial d'attirer et de soutenir les nouveaux talents. Il est également essentiel d'investir autant dans les nouveaux employés que dans les collaborateurs plus expérimentés. La fidélisation des techniciens qualifiés s'avère nettement plus rentable que l'intégration répétée de nouvelles recrues. Autrement, les ateliers multiplient les dépenses pour constamment recruter, interviewer, former et intégrer de nouveaux techniciens.
Pour garantir une relation durable avec les techniciens, il est aussi crucial de définir clairement dès le départ les attentes, la culture de l'entreprise, la rémunération et les avantages liés au travail. Il est également important de considérer les avantages offerts. Parmi eux figurent les primes, tickets restaurant en l'absence de salle de repas et majoration des heures supplémentaires. Celles-ci s'élèvent à 25 % pour les 8 premières heures (dès la 36e) et à 50 % à partir de la 44e. Une indemnité de panier de 5,82 euros est prévue en cas de travail de nuit, ainsi qu'une majoration de 100 % du salaire horaire brut de base en cas de travail le dimanche.
Comment faire monter en compétences ses employés et son garage ?
Compte tenu de la complexité croissante de la technologie automobile, il est aussi impératif que les propriétaires d'ateliers investissent dans la remise à niveau de leurs techniciens. Cela peut inclure la prise en charge des coûts de la formation continue. Il est aussi possible de mettre en place des programmes de mentorat et de formation interne. Cette dernière est d'autant plus cruciale à mesure que l'industrie automobile évolue. Elle inclut davantage de nouveaux véhicules, notamment les motorisations électriques.
L'un des plus grands défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui est d’ailleurs le fossé des compétences en matière de réparation des VE. Les causes de ce déficit sont complexes. Les techniciens ne reçoivent pas la formation spécialisée nécessaire. Cela, non pas à cause de leurs propres lacunes, mais en raison des défis auxquels sont confrontés les ateliers indépendants. Ceux-ci comprennent le coût des outils, le manque de soutien institutionnel pour le financement de la formation et le manque de temps pour la formation. Ce dernier frein est dû à la diminution du nombre de techniciens entrant dans le secteur.
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Le manque de temps joue donc également un rôle, malgré les améliorations apportées par les outils logiciels d'atelier. Les professionnels sont donc unanimes : la formation doit être plus facilement accessible. Cela, aussi bien pour les nouveaux techniciens que pour les plus expérimentés. Cependant, cette responsabilité ne devrait pas reposer uniquement sur les ateliers. En effet, un effort collectif est nécessaire pour combler ce fossé de compétences et garantir que la main-d’œuvre soit équipée pour répondre aux évolutions des exigences de l'industrie automobile.