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Distribution

Les franchises bousculent les codes de la distribution

Publié le 11 mars 2024
Par Mohamed Aredjal
5 min de lecture
Depuis quelques mois, le marché de la rechange tricolore assiste à l'émergence de réseaux de franchise. Une vraie nouveauté dans un secteur traditionnellement réservé aux enseignes d'affiliation. Mais le modèle de la franchise offre certains avantages qui semblent séduire les entrepreneurs prêts à s'investir dans la distribution de pièces de rechange.
franchise distribution pièces
Selon la dernière étude de la FFF, les services automobiles constituent l’un des secteurs les plus dynamiques de la franchise avec 10 243 points de vente en 2023 (+6,4 % par rapport à 2022). ©API

Feu Vert, Speedy, Midas, Point S… Jusqu'ici, dans les allées de Franchise Expo Paris, automobile rimait souvent avec réseaux de pneumaticiens, de centres autos ou de réparation rapide. Mais cette édition 2024 du salon parisien (16-18 mars) réserve quelques surprises. Outre ces enseignes de maintenance, le grand rendez-vous de la franchise accueillera de nouveaux venus dont l'activité se porte sur la distribution de pièces de rechange.

Aux côtés de Pièces Auto, qui avait déjà pris part à Franchise Expo Paris en 2023, figurent Pièces et Pneus (groupe Ferron) et Zpare, qui participent pour la première fois au salon. Leur objectif : séduire une partie des 30 000 porteurs de projets qui se rendent chaque année à l'événement tout en profitant de sa notoriété pour promouvoir leur concept.

"Ce salon réunit chaque année beaucoup de visiteurs, et nous permettra de donner plus de visibilité à notre franchise", confirme Yavuz Güllü, directeur général de Zpare. Franchise Expo Paris peut en effet offrir une exposition unique à des enseignes évoluant sur un marché peu connu du grand public. "Peu d'entrepreneurs connaissent le monde de la distribution de pièces automobiles", observe Charles Demillecamps, responsable de la performance chez AAG.

Une dynamique entrepreneuriale

Loin d'être anecdotique, cette présence remarquée des réseaux de distribution de pièces à Franchise Expo Paris reflète une véritable tendance dans un marché de la rechange où les créations de franchises ont été nombreuses ces derniers mois. La dernière en date est à mettre au crédit du distributeur de Beynost (01), BAP, qui s'est lancé dans l'aventure de la franchise en janvier dernier.

Ce projet fait écho à celui, plus remarqué, de Global Auto Pièces (GAP). Imaginée par Jean-Philippe Moyet (patron de Distri Cash), Jean-Philippe Péguenet et Antoine Beaudet (gérant d'Eudiff), cette franchise propose un concept de distribution complet axé sur la proximité et l'indépendance.

Si on y ajoute l'enseigne Zpare, également partie à la conquête du business de la pièce détachée, ce ne sont pas moins de trois franchises qui ont vu le jour sur ce marché où les réseaux d'affiliation restent majoritaires. Pour rappel, seuls deux réseaux avaient jusqu'ici fait le pari de la franchise pour le développement de leur maillage : API (groupe Doyen Auto) et Pièces Auto (AAG). L'arrivée de ces nouveaux franchiseurs constitue-t-elle un vrai tournant dans le secteur ou une simple poussée sans lendemain ?

Pour certains observateurs, cette conjoncture s'inscrirait dans un mouvement global favorable à l'entrepreneuriat. Depuis la crise du Covid, le niveau de création d'entreprises est en effet resté très soutenu dans l'Hexagone, dynamisé notamment par une quête d'autonomie plus affirmée. "Dans un contexte où le besoin de liberté s'est fait ressentir, la franchise permet de répondre à cette envie d'entrepreneuriat tout en apportant de la sérénité et de la tranquillité", analyse Charles Demillecamps.

Cette tendance a été confirmée par la 20e édition de l'enquête annuelle de la franchise, qui a révélé que 32 % des Français souhaiteraient créer leur entreprise (contre 28 % en 2021). Parmi eux, 43 % envisagent de le faire en franchise.

L'atout accompagnement

Il faut dire que le modèle de la franchise apporte quelques gages de sécurité aux entrepreneurs. Du côté de la Fédération française de la franchise, on rappelle en effet que ce modèle d'entrepreneuriat permet de conserver son indépendance tout en s'appuyant sur le savoir-faire, l'accompagnement et l'assistance d'un franchiseur et d'un concept éprouvé.

"C'est aussi la possibilité de bénéficier de la notoriété d'une marque et de la force d'un réseau", ajoute l'organisation professionnelle. Des arguments confirmés par Mickaël Montarou, directeur commercial et marketing de Doyen Auto France : "Pour un franchisé, il est rassurant de faire partie d'un réseau avec des outils et services mutualisés qui ont fait leurs preuves."

Même position du côté d'Alliance Automotive, où le concept Pièces Auto repose sur un accompagnement global. "Le franchisé se concentre principalement sur l'animation commerciale au comptoir. Nous nous occupons du reste : communication, fournisseurs, sélection des marques, gestion du stock…", soutient Charles Demillecamps.

Et de rappeler que l'enseigne Pièces Auto offre aux franchisés des supports inaccessibles à un entrepreneur indépendant. "Nos franchisés ont notamment accès à des outils marketing très puissants : publicité drive-to-store sur Leboncoin, campagne promotionnelle à la télé, opération Fill Up Média dans les stations-service, etc."

Autre atout de la franchise : elle permet aux entrepreneurs de bénéficier d'un accompagnement complet, notamment lors de la création du point de vente. "La location des magasins est stratégiqueSur ce sujet, il y a trois règles : l'emplacement, l'emplacement et l'emplacement, insiste Charles Demillecamps. C'est pourquoi, nous réalisons pour nos franchisés des études locales de marché très précises à chaque implantation."

Le soutien du franchiseur est également très utile lors des démarches auprès des établissements bancaires. "Avoir un franchiseur derrière soi, c'est plus rassurant pour les banques, même si elles sont de plus en plus frileuses", pointe Mickaël Montarou, qui souligne qu'une société appartenant à un réseau de franchise sera, dans le cadre d'une cession, souvent mieux valorisée.

L'enjeu permanent de l'attractivité

Faut-il dès lors voir dans la franchise un modèle d'avenir pour un secteur de la distribution de pièces de rechange qui plébiscite jusqu'ici l'affiliation ? Pour Patrick Fedullo, directeur marketing des groupements d'AAG, cela dépend surtout du profil des investisseurs. "Le franchisé s'inscrit dans une logique entrepreneuriale différente de l'affilié qui permet de concilier vie professionnelle et vie personnelle."

Et si le contrat de franchise s'avère souvent plus coûteux que le contrat d'affiliation, en raison des frais d'entrée et des redevances, l'encadrement qu'il offre en contrepartie lui permet de rester attractif pour de nombreux entrepreneurs. "Dans le réseau Pièces Auto, nos franchisés auraient pu basculer vers nos réseaux d'affiliés car ils moins onéreux, mais ça n'a pas été le cas. Seuls deux d'entre eux ont franchi ce pas", confie Charles Demillecamps.

Mais pour conserver cette attractivité, le franchiseur doit évidemment s'impliquer dans l'animation de son concept et plusieurs obligations lui incombent à ce titre : transmission d'un savoir-faire, mise à disposition de signes distinctifs, assistance… "Un franchiseur demande une redevance sur le CA réalisé. Ce qui implique de fournir un niveau de services très solide et complet avec des concepts clés en main", indique Mickaël Montarou.

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Un discours partagé par Charles Demillecamps, qui tient à rappeler que le contrat de franchise implique, pour le franchiseur, de proposer un modèle économique viable. "Nous devons donner à nos franchisés les bonnes cartes pour que le concept tienne la route", insiste-t-il.

Sur ce sujet, les enseignes Pièces Auto et API estiment partir avec une longueur d'avance, fortes de leur historique sur le marché national. "API, c'est un concept construit depuis plus de vingt ans et qui s'est sans cesse enrichi depuis sa création. Pour arriver sur ce marché, il faut donc proposer quelque chose d'extrêmement complet et d'abouti", lance le dirigeant de Doyen Auto France. Les challengers sont prévenus.

Un modèle avantageux pour fidéliser ses distributeurs

Si le contrat de franchise impose de nombreuses obligations à la tête de réseau, il offre quelques contreparties intéressantes pour un franchiseur. En particulier dans ce marché de la distribution de pièces de rechange. En effet, ce modèle demande aux franchisés de respecter un certain nombre de procédures opérationnelles, notamment dans la gestion du stock. Une manière pour les centrales de mieux "verrouiller" la fidélité de leurs distributeurs…

"La notion de fidélité est importante dans un contrat de franchise, confirme Mickaël Montarou. Cela permet à un franchiseur de capter une grande partie des achats des distributeurs." Quelle part des achats est exigée par la centrale ? Sur ce sujet, les enseignes interrogées se montrent discrètes…

Une chose est sûre, cette part est (très) supérieure aux taux de fidélité moyens observés dans les groupements traditionnels (entre 50 et 70 % selon les réseaux). Mais contrairement à certaines franchises dans la restauration, aucune enseigne n'impose à ses franchisés de réaliser la totalité de leurs achats auprès de la centrale.

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Il faut dire qu'aucun réseau ne semble capable de couvrir les besoins de la totalité du parc roulant et de garantir un taux de disponibilité de 100 %. "Chez McDo, l'offre est relativement réduite, c'est assez simple pour le franchiseur. Dans l'automobile, c'est autrement plus compliqué…", conclut Mickaël Montarou.

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