Comment l'année 2022 s'est-elle terminée pour LKQ-Van Heck Interpièces France ?
Patrick Gauvent : Nous nous attendions à des tensions sur les approvisionnements et sur la chaîne logistique, mais la profession a plutôt bien anticipé cette période particulière. Ponctuellement, quelques fragilités ont pu se faire sentir, mais notre capacité d'achat européenne et la projection annuelle de nos volumes de commandes auprès de nos fournisseurs nous ont permis de délivrer un taux de service plus que correct. Nous avons une tendance habituelle de 97 %, et avons réussi à livrer à 96,3 %. Sauver le taux de service est primordial, car nous sommes avant tout des "épiciers" et donc des logisticiens.
Sauver le taux de service est primordial
Nous avons aussi la chance d'avoir un marché dynamique, qui profite d'une fragilité du nombre d'immatriculations des VN par leur rareté et de la dynamique des ventes de VO. Cette tendance va sans doute continuer à nous porter les 3-4 prochaines années. Par ailleurs, notre réseau de distributeurs "affiliés" (Business Partner Network, BPN) a affiché de très belles performances, au-delà du marché, et continue de se densifier. Nous devrions dépasser les 150 points de vente.
D'un point de vue logistique, LKQ France atteint-il ses objectifs en termes de maillage territorial ?
D'ici à la fin du premier trimestre 2023, la plateforme de Marseille (13) sera opérationnelle. Il s'agira de notre 7e site français, et de la 4e ouverture en moins de 15 mois, après Paris-Les Ulis (91), Toulouse (31) et Nantes (44). Ces nouveaux développements viennent renforcer les sites déjà existants de Lille (59), Nancy (54) et Lyon (69).
Après cette ouverture, nous aurons finalisé notre maillage de proximité et amélioré ainsi nos capacités de livraison H+4 et de nuit. Toutes ces plateformes sont interconnectées avec celles du Benelux, dont celle de Berkel aux Pays-Bas. C'est un accès rapide garanti pour 250 000 références gérées et stockées, et plus de 650 000 références suivies.
Ouvrir une plateforme logistique, c'est couvrir une nouvelle zone, et donc renforcer les équipes. Il y a deux ans, LKQ-VHIP France comptait 91 salariés. Nous sommes aujourd'hui plus de 200. Par exemple avec le renforcement de l'équipe commerce, trois nouveaux area managers nous ont rejoints en janvier, mais aussi plus d'équipes logistiques et support.
Quelles ambitions nourrissez-vous avec le réseau de garages AutoFirst ?
Nous voulons rapidement doubler le nombre de centres, et atteindre les 200 AutoFirst. Nous nous sommes d'abord développés autour de Lille, Nancy et Lyon. Nos autres zones logistiques vont nous aider dans notre objectif. À chaque nouvelle zone "ouverte", nous renforçons notre maillage de partenaires BPN, qui peuvent alors porter l'enseigne AutoFirst auprès de leurs propres clients garages.
AutoFirst est un réseau qui nous va bien, car il est agile, comme LKQ. Il a tout d'un grand, et les entrepreneurs à la tête des centres ont l'autonomie qu'ils recherchent. AutoFirst apporte une solution globale en termes de support technique, formation, marketing et de services.
Où en est le développement de l'offre Moobi ?
C'est notre partie d'avenir, un package complet pour avoir accès au parc électrifié : formation, outils d'intervention, reconnaissance de l'enseigne au niveau européen… En France, Moobi s'adressera essentiellement aux AutoFirst, mais pas seulement. Ayant annoncé le concept lors d'Equip Auto 2022, nous allons commencer le déploiement. Cela implique une montée en compétences, un renforcement des équipes et une communication appropriée. Nous sommes ambitieux et prêts.
Comment l'intégration de LKQ au conseil d'administration de la Feda s'est-elle décidée ?
Il y a deux ans, en étroite discussion avec l'équipe de la Feda, portée par le binôme très efficace d'Alain Landec et Mathieu Séguran, nous avons exprimé la volonté de faire évoluer notre statut et passer de distributeur à groupement d'achat, avec l'envie de pousser encore plus loin notre intégration dans le marché français et de participer davantage à la vie de notre écosystème. La proposition d'entrer au conseil d'administration est devenue une suite logique. Nous avons émis le souhait d'une empreinte plus visible et transparente, nous avons alors commencé cette mue volontaire. L'arrivée au CA de la Feda, aux côtés des grands acteurs de la distribution, est une grande fierté.
En quoi cette intégration est-elle importante ?
Du fait de mon passé, notamment chez des équipementiers, j'ai eu de nombreuses fois l'occasion de mesurer l'importance du rôle de la Feda. Dans un environnement marché en plein questionnement et révolution, se regrouper, relever les défis ensemble, mieux lire les opportunités tout en mesurant les risques, c'est cela que nous apporte la Feda.
Alain Landec et Mathieu Séguran ont élevé la fédération à un niveau d'engagement plus fort encore.
Alain Landec et Mathieu Séguran ont élevé la fédération à un niveau d'engagement plus fort encore. Je l'ai vu ces derniers mois au sujet des ZFE ou des pièces captives : la Feda est devenue un interlocuteur reconnu, dont la voix claire est écoutée et reprise dans les ministères et médias, avec un impact très fort. Même si tous ces dossiers nécessitent une pression continue, la Feda est aux côtés des acteurs de la distribution. En toute logique, LKQ France devait être à ses côtés pour relever les défis présents et futurs.
Vous avez été choisi pour siéger au conseil d'administration, malgré votre arrivée récente chez LKQ…
Peut-être le privilège de l'âge, et les cheveux blancs (rires). Mon parcours professionnel mixte, trente ans côté équipementier et presque dix ans côté distribution, m'a donné une certaine légitimité. Et dans un marché en pleine révolution, c'est vraiment enthousiasmant d'essayer d'apporter sa petite pierre à l'édifice.
Justement, quels projets allez-vous défendre ?
Dans un premier temps, il y en a principalement deux. D'abord, nous rencontrons tous des difficultés à recruter, à rendre la filière attirante pour les jeunes et les futures générations. Pourtant, les métiers sont nombreux, notamment avec l'électrification du parc. Il va nous falloir attirer des profils plus pointus, bien formés et polyvalents. Les jeunes ont parfois une vision archaïque des métiers de l'automobile. Il faut essayer de changer cela et les intéresser très tôt dans leur cursus.
Je remarque que la frontière OEM-IAM semble devenir poreuse
L'autre sujet concerne le marché. Je remarque que la frontière OEM-IAM semble devenir poreuse. Certains groupes de concessionnaires autos, dans lesquels il y a beaucoup de mouvements en ce moment, sont en plein questionnement sur leur contrat. Le cordon qui les liait est remis en cause, et de ce fait, beaucoup s'intéressent à la pièce IAM. Ils voient que la rechange indépendante est résiliente et se réinvente continuellement, plus encore avec la révolution du parc en marche.
Nous devrions créer des ponts avec eux, partager nos visions, renforcer notre légitimité commune, peut-être même imaginer des adhésions à la Feda de certains d'entre eux, déjà actifs sur ce marché. Par exemple, certains ont déjà mis de gros programmes en route pour mettre en avant les métiers de l'automobile auprès de jeunes très tôt dans leur cursus scolaire.